Le président de la Commission électorale indépendante a reçu des plaintes dans plusieurs régions. Un diplomate occidental a qualifié le taux de participation annoncé (50% ndlr) de « blague ». A peine achevée que l'élection présidentielle afghane d'hier est déjà assombrie, comme celle de 2004, par des accusations de fraudes et d'irrégularités diverses, sur lesquelles les autorités électorales ont promis d'enquêter au cas par cas. Le président de la Commission électorale indépendante, Azizullah Lodin, a déclaré à la presse avoir reçu des plaintes sur « trois, quatre types de problèmes dans certaines provinces » concernant les scrutins présidentiel et provinciaux organisés dans la journée. Dans plusieurs régions, de nombreux observateurs ont signalé que les poinçonneuses utilisées pour marquer les cartes des électeurs ayant déjà voté ne fonctionnaient pas. Une autre controverse concerne l'encre censée être indélébile dans laquelle chaque électeur doit tremper son doigt pour éviter qu'il ne vote plusieurs fois : comme en 2004, des observateurs ont relevé qu'elle pouvait s'effacer facilement. Un des 41 candidats à la présidentielle, Ramazan Bashardost, qu'un sondage diffusé récemment plaçait en troisième position, affirme avoir réussi à nettoyer son doigt avec un détergent, le Vitex. « J'ai trempé mon doigt pendant cinq minutes dans du Vitex et, vous voyez, l'encre est toujours là », a rétorqué M. Lodin. « Néanmoins, c'est un point sur lequel il faut enquêter », a-t-il admis. De son côté, l'équipe de campagne de l'ancien ministre des Affaires étrangères, Abdullah Abdullah, principal adversaire du président sortant et favori du scrutin Hamid Karzaï, a annoncé dans un communiqué avoir déposé « 30 plaintes très précises » auprès de la Commission. Karzai coûte que coûte Certaines concernent des policiers et des représentants du gouvernement qui ont appelé à voter spécifiquement pour M. Karzaï, et d'autres le manque de sécurité, selon le communiqué. Des bureaux de vote n'ont pas eu assez d'encre indélébile, ou ont souffert de l'absence d'observateurs électoraux indépendants, a déploré la même source. Dans d'autres régions, des assesseurs se sont plaints de ne pas avoir reçu assez de bulletins de vote. « Nous avons demandé à nos bureaux (..) de déterminer si cela est vrai ou si dans certains cas il y a plus de cartes d'électeurs que d'inscrits », a dit M. Lodin. A l'inverse, l'organisation International crisis group (ICG) indiquait dès juin que dans plusieurs provinces, les listes électorales avaient été gonflées. Ainsi, dans le Nouristan (est), on compterait 443 000 électeurs inscrits pour 130 000 habitants. Par ailleurs, une dizaine de plaintes déposées par le camp Abdullah mettent en cause le rôle de la Commission elle-même, qui dans certains bureaux de vote « n'a pas livré les bulletins avant 11h », alors que le scrutin commençait à 7h, ou « a fait évacuer les urnes à midi », accuse l'équipe du candidat. L'organisation de défense des droits de l'homme Human Rights Watch avait elle aussi exprimé mardi des réserves à l'égard de la Commission électorale, dont le chef a été nommé par M. Karzaï sans contrôle parlementaire et qui, selon HRW, s'est montrée exagérément critique envers certains autres candidats. Un porte-parole de la Commission a annoncé dans la journée que la participation pourrait atteindre 50%. C'est « une blague », lâche un diplomate occidental, qui précise que « selon des rapports parcellaires, la participation semble extrêmement faible, aux alentours de 10%, dans certaines régions du sud, moyenne ou bonne dans le nord », et « faible dans tout l'arc sud-est ». Environ 17 millions d'Afghans étaient inscrits sur les listes électorales. La Commission a indiqué en fin de journée que 90% des bureaux de vote avaient pu ouvrir leurs portes, en dépit des menaces des talibans et de l'intensification des violences ces derniers jours. 26 civils tués Vingt-six civils et membres des forces de sécurité ont été tués dans des attaques des rebelles islamistes hier lors des élections présidentielle et provinciales en Afghanistan, a annoncé le gouvernement. Huit soldats ont été tués dans la journée, a annoncé le ministère de la Défense, en ajoutant que 135 incidents avaient été recensés dans le pays. « Neuf civils innocents » et « neuf policiers » ont également péri jeudi, a ajouté le ministre de l'Intérieur, Hanif Atmar, dans une conférence de presse. Les élections d'hier se sont déroulées sans trop de violences, avec de multiples attaques à l'impact limité, compte tenu des menaces proférées et des attaques perpétrées ces derniers jours par les talibans.