Le président sortant Hamid Karzaï et son principal rival Abdullah Abdullah sont au coude à coude, avec un léger avantage pour le premier, après dépouillement de moins de 10% des votes de la présidentielle afghane de jeudi, a annoncé hier la commission électorale. Les résultats finaux sont attendus pour la mi-septembre. Cette annonce intervient alors que les combats entre forces internationales et rebelles talibans se poursuivent dans le Sud. Avec la mort de 4 soldats américains mardi, 2009 est déjà, avec 295 morts en moins de huit mois, l'année la plus meurtrière pour les soldats étrangers depuis leur arrivée en 2001. D'après les premiers résultats de l'élection présidentielle, très peu significatifs, a insisté la commission, M. Karzaï obtiendrait 40,6% des suffrages déclarés valides, contre 38,6% pour son principal rival, l'ancien ministre des Affaires étrangères, Abdullah Abdullah. Suivent ensuite le candidat indépendant Ramazan Bashardost avec 10,2% des votes valides, et l'ancien ministre des Finances Ashraf Ghani avec 2,9%. Ces résultats concernent un peu moins de 10% des suffrages exprimés. Ils proviennent de différents bureaux de vote de 21 provinces sur les 34 du pays. L'Afghanistan avait organisé jeudi dernier la seconde présidentielle de son histoire tourmentée, après celle de 2004 remportée au premier tour par M. Karzaï avec 55,4% des voix, et des scrutins provinciaux. Les bureaux de vote avaient été relativement épargnés par les violences, en dépit des menaces d'attaques des rebelles talibans. Mais les observateurs s'inquiètent d'un faible taux de participation, largement en deçà des 70% de 2004, à cause, notamment, des menaces et de la désillusion de la population vis-à-vis de la classe politique. La commission n'a pas donné de chiffres de participation mardi soir. « La participation tourne autour de 30 à 35% », a indiqué dans l'après-midi un diplomate occidental ayant requis l'anonymat. Hamid Karzaï et Abdullah Abdullah clament depuis le lendemain du scrutin qu'ils sont en tête, le camp du premier affirmant même avoir gagné au premier tour, alors que celui du second dénonce des fraudes massives orchestrées par l'Etat en faveur de M. Karzaï. Illusion d'optique Peu avant l'annonce des premiers résultats, M. Abdullah avait appelé la population au « calme », à la « patience » et à faire preuve de « responsabilité » en évitant les violences. Le challenger, qui a acquis pendant la campagne une stature nationale, a au passage réitéré ses accusations contre le camp Karzaï. « Il n'y a aucun doute qu'une fraude organisée et mise en place par l'Etat, généralisée, est en cours (...). Nous saisirons tous les moyens légaux (...) pour éviter qu'une fraude massive ne décide du résultat de l'élection », a-t-il souligné. De nombreux observateurs afghans et internationaux ont signalé des irrégularités à plus ou moins grande échelle lors du scrutin. 790 plaintes pour fraude et irrégularités à propos du scrutin sont parvenues à la commission des plaintes électorales, chargée d'enquêter sur chacune d'elle avant la certification des scrutins. M. Karzaï est au pouvoir depuis fin 2001, lorsqu'une coalition internationale menée par les Etats-Unis avait chassé les talibans. Près de 100 000 soldats étrangers sont déployés dans le pays pour soutenir son gouvernement face à une rébellion islamiste qui a gagné du terrain depuis deux ans. Un éventuel second tour risque, selon certains analystes, de raviver les divisions historiques entre le Nord tadjik (deuxième ethnie du pays), où M. Abdullah a sa base électorale, et le Sud pachtoune (première ethnie), réservoir de voix de M. Karzaï, mais déchiré par les violences et l'insurrection islamiste.