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L'artisanat traditionnel étouffe
À Alger, on dénombre quelque 16 000 artisans informels
Publié dans El Watan le 25 - 08 - 2009

L'artisanat traditionnel à Alger patauge aujourd'hui dans les tréfonds de la décadence, à entendre des gens du métier. En effet, ces derniers se plaignent du manque de matières premières, et quand elles sont disponibles, ce qui se produit rarement, leur prix est excessivement cher. Autre écueil, ils n'arrivent pas à écouler leurs produits sur un marché local « déjà inondé par les produits importés ».
Ainsi, les artisans assistent dans une colère impuissante à l'effritement de l'activité, laquelle constitue leur source de revenus. Nacer est cordonnier depuis 1976. A son avis, les instances concernées les gargarisent de discours et ne font rien pour promouvoir l'artisanat traditionnel. « On ne fait rien pour nous aider. Les matières premières, quand elles sont disponibles, coûtent cher », déplore-t-il. Chiffres à l'appui, il dira : « Un mètre de toile, matière que nous utilisons comme doublure, est cédé à 300 DA, il y a six mois. Elle nous revient à 140 DA le mètre aujourd'hui. Depuis quelques années, les produits importés nous étouffent. Un artisan d'une dextérité émérite ne peut pas décorer plus de trois paires de babouches la journée. L'aberration, quand la matière première coûtait moins cher, nous vendions à 480 DA une paire de nos chaussures. Aujourd'hui que le prix de ces matières a augmenté, une même paire est écoulée à 280 DA. Ce n'est que durant la période d'été que nous arrivons à vendre une partie de nos produits. Une quantité insignifiante, mais c'est mieux que de ne rien vendre. Quant au matériel, nous nous le procurons souvent au marché noir. » Un des doyens des dinandiers d'Alger aujourd'hui, Hachemi, indique non sans nostalgie qu'en 1958 La Casbah en comptait une vingtaine. A l'époque, rappelle-t-il, « j'étais apprenti ». La cité abrite aussi des tisserands, des bijoutiers, des teinturiers, des fabricants de soierie, des cordonniers, des vanniers, des armuriers et des corroyeurs, entre autres. Des rues portent les noms de ces métiers comme la rue des Teinturiers et la rue des Bijoutiers. « Aujourd'hui, ces métiers et rues ont disparu », constate-t-il, ruminant son amertume. « Jadis, il n'y avait pas de centres de formation professionnelle. Quand nous quittions l'école, à l'âge de 12 ou 14 ans, nos parents nous orientaient vers un artisan pour apprendre un métier et pouvoir travailler ensuite. Nous vivions à cette époque grâce à l'artisanat », souligne notre interlocuteur. Et d'ajouter : « Les temps ont changé, actuellement, les jeunes ne veulent pas apprendre ces métiers. Ils préfèrent vendre des cigarettes. Ce qui leur permet de gagner leur vie. De mon côté, même s'ils se présentent chez moi pour que je les forme, je ne peux rien leur transmettre, car je n'ai plus de matières premières pour travailler et les initier à mon métier. Un kilogramme de cuivre, quand cette matière est disponible, coûte 1200 DA. En plus, je n'arrive pas à écouler mes produits. Autrefois, nous vivions dans la dignité. De nos jours, nous vivotons dans l'indigence. » Notre dinandier ne croit plus aux « discours des responsables ». « Ils ne donnent pas de l'importance à cette activité. Ils se concentrent sur la course au trésor », regrette-t-il.
Métiers à l'abandon
Driss est lui aussi dinandier. Un métier que la famille pratique depuis quatre siècles, d'après lui. Son père possédait son propre atelier à La Casbah dans les années 1940. « Mon père a formé beaucoup d'artisans dans son atelier. Nombreux parmi ces derniers ont travaillé chez nous jusqu'à la retraite. Dans les années 1970 et 1980, nous employions 70 à 80 artisans. Aujourd'hui, je me retrouve tout seul et incapable de me prendre en charge. J'ai quitté même La Casbah. Je n'ai pas transmis mon savoir-faire à mes enfants pour leur éviter la situation dans laquelle je me suis embourbé. Ces derniers m'ont demandé d'abandonner ce métier mais cela m'est impossible même si je n'arrive même pas à payer les factures d'électricité et d'eau. Je ne les ai pas honorées. Alors, on m'a exhorté à payer et les factures et les pénalités. A ces charges, il faut ajouter le loyer fixé à 5000 DA l'année. Je ne peux pas m'acquitter de toutes ces dettes, faute d'argent. Ce sont mes enfants qui me prennent en charge », raconte Driss. Pour se procurer de la matière première, relate-t-il, « je suis obligé d'acheter des déchets de cuivre pour fabriquer des cendriers alors qu'une de mes pièces est exposée au musée du Louvre, en France. J'ai travaillé au Maroc où mon savoir-faire est apprécié. Des jeunes viennent me voir pour me demander de les former. Mais je n'ai pas de matière première. Je suis dans l'incapacité de m'approvisionner en cuivre, même à 200 DA le kilogramme. Quant aux clients, il n'y en a plus. » Ahmed est bijoutier. Il représente la huitième génération d'artisans de la famille. Il dresse un constat amer sur un métier devenu ingrat par les caprices du temps. Pourtant, être bijoutier, au-delà de l'opulence matérielle, procure un capital symbolique. Capital qui joue un rôle important dans les relations sociales. En effet, il n'est pas donné à n'importe qui d'être bijoutier. Mais cela relève du passé. De nos jours, explique ce bijoutier, des difficultés corrodent ce métier. « Cela fait six mois que j'ai confectionné des broches. Je les ai mises, à ma déception, de côté pour les finir. Il me faut du corail néanmoins, je n'en ai plus. On utilise du corail saisi. L'émail est souvent introuvable. On s'en procure grâce à des proches ou amis qui voyagent à l'étranger. L'émail coûte 60 000 DA le kilogramme et l'argent est cédé à 46 000, 7 DA le kilogramme. Nous utilisons aussi ce que nous appelons la casse. Ce sont des bijoux défectueux que nous récupérons pour les fondre. Avec la matière retirée ainsi, nous confectionnons de nouveaux bijoux. Cela dit, nous gérons ces matières avec parcimonie. Pour ce faire, nous mettons moins de motifs et filigranes, à titre d'exemple. D'ailleurs, les bijoux anciens sont lourds contrairement à ceux d'aujourd'hui », fait-il remarquer. Il considère que « sans le développement du tourisme, l'artisanat sera maintenu dans la précarité ». A l'instar des autres artisans, Ahmed trouve des difficultés à écouler ses produits, sauf durant l'été grâce aux émigrés. « Pour le reste de l'année, c'est la dèche », lance-t-il. A son tour, Lyes, céramiste depuis 1999, qualifie les artisans de « fantômes avant de finir dinosaures à mettre au musée vu leur situation désastreuse les menaçant de disparition. » Il voit son avenir dans la rue. « Les gens qui me connaissent ne s'étonneront pas de me retrouver un jour en train de vendre des cigarettes dans la rue. Au moins cela me permettra de gagner ma vie. Le marché de l'artisanat n'existe plus, les responsables concernés sont indifférents à cette activité. Ils voyagent et font des discours. Le matériel et la matière première coûtent cher. Le prix d'un pinceau varie entre 600 et 2000 DA, un kilogramme d'argile coûte 46 DA au lieu de 10 DA. La pénurie en ces matières sévit souvent. Le loyer est de 5000 DA l'année. C'est avantageux, mais comme il n' y a pas de clients, nous ne pouvons pas couvrir nos charges. Personnellement, je ne peux pas m'acquitter de mes factures d'électricité et d'eau », affirme-t-il. Ali, son voisin, céramiste comme lui, estime : « Nos responsables ont une vision folklorique de l'artisanat. » Selon lui, « il faut donner à cette activité une dimension économique. Sinon, toute mesure incitative à la relance de ce secteur sera conclue par un échec. » Ali dénonce une « classification hasardeuse des artisans. »
La matière première coûte cher
« Un plombier, un électricien ou un maçon sont classés artisans au même titre qu'un dinandier ou un vannier. Cela relève de l'aberration. Il faut un débat de fond sur l'industrie traditionnelle avec la participation des artisans. Ils organisent des salons, comme il y a des musées d'arts populaires et des maisons d'artisanat, mais à quoi servent tous ces événements et infrastructures ? Où sont les résultats ? Il faut un traitement de choc et non des discours et des manifestations d'apparat », observe cet artisan. Et de poursuivre : « J'ai visité 23 pays et vu comment les artisans travaillent et écoulent leurs produits. J'ai assisté, à titre d'exemple en Tunisie, à une opération de vente d'un dinandier. A 2h du matin, il continue à servir des clients. Ce qu'un artisan tunisien écoule en produits en une année est supérieur à ce que cèdent l'ensemble des artisans algériens pour une même période. Pour arriver à gagner juste l'équivalent d'un salaire, un artisan algérien doit écouler pour une valeur de 10 millions de ses produits par mois, vu les problèmes dans lesquels il continue à se débattre. Notre artisanat est malade et j'en suis déçu. » Un autre voisin fait savoir, laconiquement : « Nos magasins sont inondés de produits asiatiques. Les clients les préfèrent à nos produits. En tout cas moi, cela fait longtemps que j'ai abandonné ce métier. » A entendre ces artisans et à voir les conditions dans lesquelles ils travaillent, il est permis à tout commun des mortels de se dire que dans la capitale, l'artisanat traditionnel est maudit. Une activité pourtant ancestrale qui constitue la fierté d'Alger.


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