Le Ramadhan et le sport est un thème récurent. Chaque année pendant la période du jeûne, qu'observent les musulmans, il est au centre d'un débat qui, souvent, dérape faute de données scientifiques les plus à même de départager les avis sur cette question. Ramadhan 2009 n'a pas échappé à la règle. De nombreux entraîneurs européens, les Français Guy Roux et Anthoine Kambouaré, respectivement ancien coach d'Auxerre et actuel entraîneur du Paris Saint-Germain, ainsi que « spécial one », le Portugais et entraîneur de l'Inter de Milan, José Mourinho, se sont prononcés ouvertement contre le jeûne le jour du match. Ils ne sont pas les seuls à préconiser cette attitude. Beaucoup de leurs collègues européens adoptent la même position à l'égard de leurs joueurs musulmans. Forts du statut et de la puissance financière des clubs européens, les dirigeants et entraîneurs font le forcing pour obliger les joueurs de confession musulmane à ne pas faire le Ramadhan le jour de la compétition. Cette démarche ne repose sur aucune argumentation scientifique et médicale. Elle est fondée sur des convictions personnelles et « l'expérience du terrain », comme l'indiquent bon nombre d'entre eux. L'idée répandue qu'il y avait une totale incompatibilité entre la pratique sportive, la performance et le Ramadhan est en train d'être battue en brèche par des données scientifiques. Longtemps « cadenassé », le sujet a fini par intéresser des médecins et des scientifiques qui voulaient l'approfondir et ne plus s'en tenir aux clichés. Le professeur algérien Yacine Zerguini, membre de la commission médicale à la FIFA, de la Confédération africaine de football (CAF) et le Comité olympique international (CIO), a été l'un des premiers spécialistes en la matière à prôner une recherche dans ce domaine. L'aspect psychologique en question A force d'arguments et de persuasion, il a fini par convaincre les instances de la FIFA de l'utilité de mener cette recherche. Après plusieurs mois de travail et de recherches en milieu de footballeurs, la recherche a abouti. Abordant ce chapitre, le 24 août 2009, le président de la FIFA, Joseph S. Blatter, dira : « La recherche concernant les effets du Ramadhan sur les joueurs musulmans, menée par le docteur Zerguini, s'est révélée être positive. » Les conclusions de cette recherche scientifique contredisent les assertions avancées par des coaches européens. Le Ramadhan n'est pas incompatible avec la pratique du football. Les conclusions de la recherche préconisent d'entourer la pratique sportive durant le Ramadhan de « précautions utiles », à savoir se réhydrater plusieurs fois dans la soirée, rééquilibrer la prise des repas et aliments entre la rupture et le début du jeûne, la récupération maximale dans la journée, s'entraîner en soirée... Cette recherche bat donc en brèche l'idée reçue selon laquelle Ramadhan ne rime pas avec la pratique du football. Une ébauche, dans ce sens, a été élaborée par le docteur Yacine Zerguini, sous l'égide de la FAF. La commission médicale fédérale a fait subir une batterie de tests à des joueurs de club évoluant en DI pour être fixée sur les capacités des footballeurs à produire des efforts et des performances pendant le Ramadhan. L'équipe chargée de cette recherche n'a rien relevé de particulier ou qui plaiderait en faveur de la non-observation du jeûne. Bien au contraire. Un aspect ignoré jusque-là a pris toute son importance à l'issue de ces examens. Il s'agit de l'aspect psychologique. Un joueur « forcé » à manger le jour du match sera handicapé psychologiquement dans la réalisation de la performance sportive. Nul besoin de souligner l'importance que revêt l'aspect psychologique dans la réalisation d'une performance sportive. Selon de nombreux médecins et scientifiques, qui se sont penchés sur cette question, il n'est pas recommandé d'imposer aux joueurs de manger pendant le Ramadhan. L'influence de l'observation du jeûne sur le footballeur musulman, qui veut faire le Ramadhan, n'est pas à prouver.La recherche menée par Yacine Zerguini a rassuré le Comité international olympique (CIO). Les centaines d'athlètes musulmans,qui prendront part aux Jeux olympiques de Londres (2012), qui auront lieu probablement durant le Ramadhan, pourront faire les deux choses en même temps. Pour souligner l'importance de l'aspect psychologique dans ce débat, il faut rappeler qu'en 1996, lors de la CAN, disputée en Afrique du Sud, les joueurs de l'équipe nationale avaient refusé de manger avant le match contre le Burkina Faso, et ce, malgré qu'une feetwa d'un religieux égyptien, exhibée par des responsables de l'époque, leur indiquait qu'ils pouvaient rompre le jeûne avant l'heure pour jouer. Ramadhan-football continuera de faire débat.