Le professeur Bekkat-Berkani, président du conseil de l'Ordre des médecins, précise que le rôle de la structure qu'il préside est de défendre d'abord l'honneur de toute la corporation qui se trouve désavouée par les agissements d'un seul individu. Quelle est, selon le code de déontologie médicale, la définition d'une erreur médicale ? La faute médicale est définie, en droit médical, comme l'erreur que n'aurait pas commise un médecin placé dans les mêmes circonstances du dommage. Explication : il s'agit d'un médecin moyen qui, avec toute sa science, aurait pu passer à côté de cette situation. Toutefois, il faut savoir que la médecine n'est pas une science exacte. Le médecin est tenu à une obligation de moyens, mais pas à une obligation de résultats. Il ne promet pas de guérir mais de donner au patient des soins consciencieux, attentifs, conformes aux données actuelles de la science médicale. Partant de là, il n'est absolument pas comptable des résultats. Mis à part dans des situations particulières comme la biologie ou encore la chirurgie plastique et esthétique où le praticien est dans l'obligation d'obtenir le résultat souhaité par le client et promis par le médecin. Les médecins, en raison de leur négligence ou de leur incompétence présumée, peuvent-ils être tenus pour responsables de ces dérives ? Un médecin est responsable de ses actes, à chaque fois qu'il entreprend un diagnostic ou un traitement. Parfois le médecin, même en étant le plus consciencieux du monde, peut malheureusement tomber dans l'erreur. Cependant, dans la plupart des cas, d'autres facteurs doivent être pris en considération. Par exemple lorsque lors de l'interrogatoire, le patient fournit des données inexactes ou erronées, il induit de ce fait le médecin traitant en erreur. Dès lors, à qui incombe la responsabilité ? De plus, la médecine algérienne est assujettie à des conditions et des moyens qui sont ce qu'ils sont. Nous avons remarqué que la plupart des bévues sont dues à une circonstance « extra travail » médical. L'acte médical est le fruit de toute une chaîne qui commence à la porte de l'hôpital, à l'accueil, se poursuit à la radio, par exemple, et comprend le déplacement par ambulance ou autre. Comment déterminer les responsabilités de tout un chacun dans le cas où il y a défaillance à un moment ou l'autre de la chaîne ? Le médecin a un travail technique et plusieurs facteurs doivent être réunis pour qu'il puisse établir un diagnostic juste et dispenser des soins fiables. La médecine n'est pas une science exacte ; elle est d'une extraordinaire complexité et encore plus en Algérie. Le médecin algérien est prisonnier de l'environnement « hostile » dans lequel il évolue. L'on arrive à des situations de blocage où les hôpitaux sont des mouroirs, parce qu'il y a mauvaise gestion, manque de moyens, manque de sérieux et de professionnalisme. Cela est tout bonnement inacceptable. L'on parle souvent de connivence et de solidarité entre praticiens, d'omerta. Qu'en pensez-vous ? Le conseil de l'Ordre défend non pas le médecin suspecté, mais la médecine et l'exercice de cet art. Nous défendons l'honneur de toute la corporation, qui se trouve désavouée par les agissements d'un seul individu. D'ailleurs, lorsque l'erreur est avérée et que le suspect représente réellement un danger, nous nous portons partie civile. Cependant, tout comme le malade a le droit d'avoir accès à une médecine moderne, le médecin a le droit de se prévaloir de la présomption d'innocence. C'est pour cela que nous attendons d'avoir tous les éléments afin de statuer, et ce, dans un seul but : défendre l'exercice contre tout excès, de quelque nature qu'il soit. Selon les témoignages, nombre d'erreurs médicales ont pour origine la négligence, mais aussi et surtout la pratique d'actes médicaux injustifiés. Est-ce vrai ? Tous les actes médicaux sont codifiés et sont sujet à tout un protocole ; lorsque ce protocole n'est pas suivi à la lettre, il y a déjà erreur. Il a été décrié de nombreux cas d'actes chirurgicaux et médicaux gratuits, sans fondement ni justification, ce qui en soit est une faute, et grave même. Toutefois, l'opinion publique a tendance à juger à l'emporte-pièce, sans connaître le contenu du dossier. Par exemple, une affaire a récemment fait beaucoup de bruit et a agité les médias : une femme a accusé le médecin qui l'a accouchée d'avoir procéder à l'ablation de son utérus sans aucune motivation. Pourtant, de tels actes, qui peuvent paraître extrêmes, sont totalement salutaires. Si le chirurgien a dû procéder à cet acte, c'était pour sauver la vie de sa patiente et non par pur sadisme ou autre. Cependant, si effectivement quelqu'un a fait un acte gratuit, qui n'est pas sous-tendu par une complication ou une difficulté médicale, ou parce qu'il s'est ainsi « facilité la tâche » afin d'éviter d'en faire plus, il se doit d'être traduit en justice. De toute façon, il y a un dossier technique à dresser, où sont enregistrés les signes vitaux du patient. C'est grâce à cette fiche que l'on peut déterminer si un acte est justifié ou non. Car il y a des indications peropératoires qui font parfois faire faire au chirurgien des actes non programmés avant l'intervention. Dans les cas de contamination, lors de l'hospitalisation, par des agents pathogènes, infections nosocomiales ou autres, à qui la responsabilité incombe-t-elle ? L'entière responsabilité revient à l'administration de l'établissement public, dont l'assurance payera des dommages et intérêts au malade ayant contracté de telles infections. Mais comment s'étonner que des bactéries, des microbes et des virus circulent dans ces lieux censés être totalement aseptisés, dès lors que l'on sait que des pigeons vivent dans les toits de l'hôpital de Beni Messous, par exemple ?