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« La réforme des institutions de Bretton Woods est un axe important » Salah Mouhoubi (Docteur d'Etat en Sciences économiques et en sciences politiques)
Est-ce que cette nouvelle réunion du G20 est de nature à aboutir aussitôt à un accord de sortie de crise ? Permettez-moi d'abord d'aborder le contexte global de cette réunion et voir comment le G8 s'est transformé en G20. Lorsque la crise financière mondiale a surgi, les pays du G8 ne pouvaient pas faire face à cette crise et ont dû inclure les pays émergents qui sont d'un poids important pour stimuler la croissance économique. Les Etats-Unis d'Amérique se sont opposés au départ à cette idée, mais ils ont dû faire des concessions qui étaient nécessaires pour la protection de leurs intérêts. Certains pays, à l'instar de l'Arabie Saoudite, ont été également introduits eu égard à leur poids financier important, nécessaire à la mobilisation des fonds pour faire face à la crise. C'est pourquoi, le G20 répond aujourd'hui beaucoup plus aux besoins des pays développés qu'aux économies de la sphère Sud. Il faut rappeler que pendant la première réunion de Washington, des divergences ont surgi et le seul point de convergence à souligner était celui lié à la nécessité d'adopter des plans de relance à l'économie. Les mesures adoptées pendant la réunion de Washington étaient donc purement économiques, alors que la réunion de Londres est venue apporter quelques percées d'ordre financier. Il fallait s'y attendre car, pendant ce temps-là, des scandales ont éclaté au grand jour, à l'instar du scandale Madoff, les faillites de la Société Générale, des scandales liés aux bonus bancaires, aux parachutes dorés et aux places financières offshore. Des décisions ont été prises dans ce sens, mais au profit toujours des pays développés. Le G20 avait maintenu aussi l'idée de relancer l'économie mondiale par l'adoption de plans susceptibles de stimuler la croissance. Sur le plan financier, les membres du G20 ont évoqué surtout les places financières offshore et les paradis fiscaux, mais sans pour autant s'attaquer aux vrais problèmes qui concernent, entre autres, les pays sans ressources confrontés à la crise. D'autres questions d'ordre financier devraient être débattues encore, à l'instar des bonus bancaires. Pensez-vous que la question des bonus des traders sera traitée de la même ampleur que celle des paradis fiscaux pendant la réunion de Londres ? Il faut s'attendre à ce que l'on évoque à nouveau la question de la croissance économique et la nécessité d'aller plus de l'avant afin de stimuler l'économie réelle. Il y a des frémissements, mais il faut dire que c'est toujours l'incertitude qui plane. Le Fonds monétaire international avait lui-même fait croire récemment que la reprise avait bel et bien commencé. Mais encore une fois, ce nouveau sommet du G20, prévu à Pittsburgh aux Etats-Unis d'Amérique, devrait reprendre les aspects secondaires de la crise économique et financière telle la question relative aux bonus bancaires. Les questions importantes, à l'exemple de la réforme des institutions monétaires internationales, qui étaient exclues des débats du G20 de Londres pourraient être évacuées lors de cette nouvelle réunion. La réforme des institutions de Bretton Woods est un axe important, tout comme la nécessité de réfléchir à des plans d'action pour le soutien aux pays sans ressources. Le Fonds monétaire international a vu ses caisses renflouées lors du G20 d'avril dernier à Londres, mais la question principale relative à sa réforme en tant qu'institution a été occultée. Les Russes entendent justement réclamer une réforme globale du FMI au sommet de Pittsburgh, pensez-vous que la requête des Russes est en mesure d'être prise en charge ? Les Etats-Unis d'Amérique se sont déjà opposés à cette réforme du FMI en tant qu'institution et ont préféré appuyer l'idée selon laquelle il faut surveiller de plus près les vingt premières banques dans le monde. C'est pourquoi les Russes ne voulaient pas participer au renflouement des caisses du FMI, en application des décisions issues de la précédente réunion de Londres. La Russie avait évoqué aussi la possibilité que l'euro puisse devenir une monnaie de référence sur le plan international. Dans la même foulée, la Chine avait, en quelque sorte, conforté la Russie dans son opinion en estimant que les USA allaient perdre le monopole financier. Dans ce cas-là, on voit mal les USA applaudir, ou bien accepter l'idée de réformer les institutions de Bretton Woods, même si les Russes entendent frapper sur la table. Je pense que c'est là le vrai débat. Le G20 se moquait du monde en évoquant la question des bonus bancaires et/ou des paradis fiscaux. Car les vrais paradis fiscaux sont le Wall Street et City de Londres. A mon avis, le sommet de Pittsburgh va revenir sur les plans de relance, l'examen des résultats et les quelques frémissements à mettre en valeur, tandis que les vrais problèmes liés à la réforme des institutions monétaires internationales, le statut du dollar ou encore le soutien aux pays sans ressources et qui ne sont pas d'ailleurs acteurs de la crise, seront occultés à nouveau. Quelle est la place de l'Algérie dans ce débat ? L'Algérie n'est pas le seul pays à être marginalisé. Pendant la première réunion du G20 consacrée à la crise, ayant eu lieu à Washington, le seul pays africain qui a été convié est l'Afrique du Sud, mais qui ne représente pas grand-chose d'ailleurs sur l'échiquier économique mondial. L'Arabie Saoudite, elle, était invitée grâce à son poids financier car la crise était beaucoup plus une crise financière et la nécessité de mobiliser les fonds se posait avec acuité. Pour ce qui est de l'Algérie, je crois qu'il ne faut pas s'étonner de voir l'Algérie absente de cette réunion vu son poids financier et économique qui est insignifiant.