Le Collectif des pilotes algériens au chômage (CPAC) a tenu hier, lors d'une conférence de presse organisée à Alger, à « démentir » l'information selon laquelle les élèves pilotes envoyés en formation à Oxford, par l'ex-groupe Khalifa, sont issus des familles de privilégiés du régime. « Nous sommes comme beaucoup d'Algériens, de modeste condition, contrairement à ce qu'avait affirmé la juge Mme Brahimi », soutient le représentant du collectif, Saidane Khalil. Pour rappel, la présidente du tribunal criminel de Blida a déclaré lors de la comparution de l'ex-DG de la CNAC, accusé dans l'affaire El Khalifa Bank, et dont le fils avait bénéficié de ladite formation, qu'« aucun des 400 élèves de la promotion n'était issu des quartiers populaires. » « La juge a sûrement été mal informée », a estimé M. Saidane. « UN CHOIX SANS EQUITE » Celui-ci réagira également aux déclarations de Tayeb Benouis, PDG d'Air Algérie, qui affirmait mardi dernier que la compagnie nationale n'est pas « concernée » par le dossier des pilotes stagiaires affiliés à Khalifa Airways, expliquant qu'Air Algérie a recruté une cinquantaine de pilotes à partir d'une liste « présentée » par les pouvoirs publics. « Si M. Benouis présente les choses ainsi, c'est pour diluer la responsabilité, car le choix des pilotes a été fait sans équité », clarifie Saidane Khalil. « Parmi tous les noms figurant sur cette liste, beaucoup doivent leur intégration parce qu'ils sont fils de X ou de Y », ajoute-t-il excédé. Après quatre années d'attente, ces pilotes inexpérimentés se disent « floués » et « abandonnés » par les pouvoirs publics. Les nombreuses promesses qui leur ont été faites, disent-ils, demeurent à ce jour « lettre morte ». Citant celles qu'a faites à ce titre, l'ex-chef de cabinet du ministère des Transports, à la sortie de promotion en Jordanie, où il était question d'embaucher la première promotion (122 pilotes) à Air Algérie, une partie à Tassili Airlines et une autre à Air Express. Le responsable évoquera même le ministère de la Défense qui pourrait prendre « quelques-uns » des diplômés. Pour sauver les 310 élèves pilotes de la compagnie aérienne privée Khalifa Airways, en stage de formation de 24 mois à l'école d'aviation d'Oxford et au British Aerospace Equipment (BAE) au Royaume-Uni, le gouvernement a dû débourser 16 millions d'euros pour la poursuite du cursus de formation à l'Académie de l'aviation royale de Jordanie. Le non-paiement par la compagnie Khalifa Airways des frais de formation qui s'élevaient à 27,5 millions d'euros, selon des informations publiées par la presse, a amené BAE à décider de la suspension des cours et des vols et le rapatriement des élèves. L'effort fourni par l'Etat n'a pas été pour autant mené jusqu'à aboutissement, soutient de son côté Ahcène Hamoud, SG du syndicat autonome des pilotes de lignes algériens. Apportant son « soutien » au collectif, qui regroupe actuellement 160 jeunes pilotes, le syndicaliste pense, contrairement aux affirmations de la tutelle, qu'il ne faudrait pas attendre 2010 pour les recruter. Il en voudra pour arguments, les « moyens énormes » dont disposent les compagnies algériennes. « Lesquelles compagnies, souligne-t-il, préfèrent plutôt “surexploiter” les pilotes en poste que d'en recruter de nouveaux, “au détriment des exigences de sécurité" ». L'ouverture prochaine de nouvelles lignes aériennes desservant, notamment, la Chine et le Canada, le départ à la retraite, d'ici 2010, d'une soixantaine de pilotes et les acquisitions de nouveaux appareils sont autant d'arguments qui plaideraient, d'après le SG, pour un plan d'embauche et éviter ainsi un « gâchis "humain et financier". La licence de vol expire au bout de 5 ans et passée cette période, il faudrait refaire complètement la formation », fait-il remarquer. Et d'ajouter que pour régler les problèmes socioprofessionnels dans lesquels plongent, depuis fin 2004, ces pilotes dont certains, d'après leurs témoignages, sont devenus des veilleurs de nuit ou des chauffeurs malgré leur haute qualification, il faudrait appliquer la « préférence nationale » dans les recrutements pour ce corps de métier. Ahcène Hamoud fustigera, à ce propos, la conduite des responsables des deux départements ministériels du Travail et des Transports, qui « délivrent des permis de travail aux étrangers alors que les Algériens formés avec les moyens de l'Etat sont laissés sur le carreau », dit-il. Les pays voisins semblent très intéressés par ce potentiel en jachère. Les syndicats des pilotes de ligne du Maroc, de la Tunisie, de la Mauritanie et même du Sénégal qui participaient, à la mi-février, à Alger, à la conférence annuelle de l'Union maghrébine des pilotes de ligne, ont « promis » de les enrôler…