Les élections législatives du 10 mai ne sont qu'une illusion de plus pour maintenir le statu quo», il s'agit là d'une réflexion faite par le parti de Saïd Sadi pour justifier sa position de boycott de ce rendez-vous. Le temps a-t-il donné raison à cette formation puisque, aujourd'hui, l'Algérie vit réellement un statu quo politique ? Pour le RCD, cette situation inquiétante et d'une gravité sans précédent était prévisible. Pourquoi et comment on est arrivé à cette léthargie institutionnelle ; le RCD l'explique par l'incurie et l'incompétence du pouvoir. Un pouvoir qui affiche, de l'avis de cette formation, un mépris total face à la population. «On est tombé en déliquescence totale. Un président qui ne se manifeste pas et trouve normal qu'un gouvernement fonctionne avec des ministres par intérim illustre le mépris qu'affiche à l'égard de son peuple le pouvoir qui se succède à lui-même depuis l'indépendance à la tête de ce pays», déplore Hakim Saheb, rappelant au passage que le RCD avait anticipé sur cette situation de vacance du pouvoir. Au lendemain des élections législatives, le pays est carrément en «panne». La formation de Saïd Sadi est, en outre, persuadée que le retard accusé dans la nomination d'un gouvernement trouve ses origines dans les luttes intestines qui existent au sein du sérail, d'où l'absence de consensus autour de la composante du gouvernement. Le RCD pense que nos institutions sont artificielles et les véritables décisions sont prises ailleurs. «Comment permettre la vacance d'un département ministériel pendant plus de trois mois ? Pourquoi la désignation de ministres, si tout fonctionne sans ministre ?», s'interroge le RCD, qui qualifie le pouvoir de secte prônant l'autoritarisme. De son côté, le MSP, qui a basculé récemment dans l'opposition, ne mâche pas ses mots. Abderrezak Mokri, membre influent du MSP, parle d'une crise sans précédent. Une crise aggravée par les résultats des élections législatives du 10 mai dernier. Pour lui, un pouvoir qui peine à former un gouvernement est un signal grave : «Il y a une cristallisation totale de la vie politique.» «Le système politique est défaillant et la responsabilité incombe aux dirigeants qui ne se soucient guère des préoccupations du peuple», explique M. Mokri. Notre interlocuteur persiste et signe que les élections législatives ont été entachées d'irrégularités. En somme, de l'avis de M. Mokri, il y a eu une fraude dont les conséquences sont visibles aujourd'hui. Comment ? Pour le MSP, la logique veut que le président puise de la majorité pour composer un gouvernement, mais vu qu'il n'a pas encore formé le gouvernement, cela prouve qu'il a des difficultés à trouver des hommes compétents au sein de cette majorité composée du FLN et du RND. «Pour former un gouvernement, le Président, à qui échoie cette prérogative, doit se concerter avec les partis concernés. Mais si dans les partis majoritaires ne se trouvent pas les compétences requises, pourquoi alors opérer une fraude en leur faveur ?», s'est interrogé M. Mokri. Celui-ci pense que gouverner, c'est prévoir, malheureusement, en Algérie, on navigue à vue. Le Parti des travailleurs affiche également son inquiétude par rapport à ce statu quo. Louisa Hanoune évoque une rentrée universitaire compromise et une rentrée sociale explosive avec la cherté de la vie… Le PT s'inscrit, certes, dans l'après-législatives et sa lecture de cette période n'est pas empreinte d'optimisme. Djelloul Djoudi confirme l'existence d'une vacance au sein du pouvoir et craint pour l'intégrité du pays. Sans avoir digéré le «hold-up électoral» dont il a été victime, le PT considère que la situation de statu quo que vit notre pays est la résultante de la fraude enregistrée lors des élections législatives. «Les législatives ont été biaisées et la fabrication des résultats donnant pour gagnants le FLN et le RND a mené vers la gouvernance par intérim, d'où la paralysie du pays», note Djelloul Djoudi qui conforte les dires affirmant que dans des situations normales, le gouvernement est installé quelques jours après l'annonce des résultats d'une élection et un plan d'action approuvé par l'Assemblée est mis en œuvre. «Aujourd'hui, nous constatons un blocage. Il y a des émeutes en raison du problème d'électricité, de cherté de la vie, une rentrée sociale qui s'annonce difficile et le pouvoir ne dit pas un mot», déplore-t-il. A la question de savoir pourquoi ce silence du Président, notre interlocuteur se contentera de répondre qu'effectivement, le président de la République a les prérogatives de nommer un gouvernement et de prendre des décisions en vue de sortir le pays de cette impasse. Certains partis politiques refusent d'être alarmistes, mais tirent la sonnette d'alarme, mettant en garde contre l'absence manifeste d'autorité.