Le chiffre de 6000 malades du cancer de l'année dernière est monté à 8000 cette année, dont 70% nécessitent un traitement combiné : chimio-radiothérapie. Pour cause de travaux et équipement du service de radiothérapie, les patients inscrits pour effectuer des séances de radiothérapie au centre anticancer (CAC) du CHU Ben Badis ont été dispatchés dans les quatre centres de radiothérapie existant à travers le pays : Alger (CPMC), Blida (deux centres, public et privé), Oran et Ouargla. Mais pourront-ils tenir jusqu'à… 2014 et… 2015 (pour Oran) ? Ce sont là, nous dit-on, les dates des rendez-vous qui ont pu être obtenues pour les malades de tout l'Est. «Honnêtement, si les malades ne peuvent pas se débrouiller par leurs propres moyens pour aller en Tunisie ou ailleurs, ils feront des métastases, car la maladie évolue très rapidement ; ces rendez-vous sont surréalistes, et beaucoup sont en train de mourir en silence», regrettent les spécialistes que nous avons questionnés à ce propos. Nous avons vu des cas de cancer insoutenables, des malades qui auraient pu être sauvés s'ils avaient pu bénéficier de quelques séances de radiothérapie après avoir été traités à la chimiothérapie, nous a-t-on assuré. A titre d'exemple, nous citerons le cas d'un jeune père de famille, hospitalisé, dont la tumeur évolutive a spectaculairement dégénéré au point où son visage est totalement déformé. Les médecins le maintiennent sous traitement symptomatique palliatif pour le soulager un tant soit peu. Cette situation, il faut le rappeler, a été signalée par des oncologues dès 2002. Les deux machines à cobalt étaient déjà, à cette époque, arrivées au terme de leurs capacités, avec un accélérateur réformé. Non seulement les pannes étaient récurrentes, mais ces vieilles machines qui datent des années 1980 étaient devenues, selon des médecins et des paramédicaux, un danger tant pour le malade que pour les manipulateurs. Et l'on ne peut dire que la sonnette d'alarme n'a pas été tirée ! Curieusement, rien n'a été fait par les autorités compétentes. «On aurait pu gagner beaucoup de temps ; aujourd'hui, les nouveaux équipements seraient fonctionnels et beaucoup de vies auraient été sauvées», déplore-t-on. A rappeler encore que ce service qui s'occupe de pathologies très lourdes accueille les patients de 17 wilayas de l'est du pays. Entre-temps, en l'absence d'équipements performants en adéquation avec le nombre de malades, 10% de ces derniers meurent avant d'accéder au traitement. Entre espoir et découragement L'espoir est permis, bien sûr, même si les sacrifices ont été et sont encore déraisonnables à cause d'une bureaucratie qui ne dit pas son nom. Après d'impardonnables tergiversations, les travaux pour l'installation des équipements de radiothérapie flambant neufs sont enfin lancés, d'autant plus que l'entrepreneur qui en a la charge est «très sérieux» (pour une fois !), nous fait-on remarquer. Le chantier est réellement impressionnant. Le service, qui a longtemps été sinistré sera métamorphosé. L'électricité, la climatisation et une partie des accélérateurs ont déjà été installées au niveau du bunker, et les fosses devant recevoir de nouveaux cobalts creusées. A côté de ce formidable chamboulement induit par les travaux, le service continue d'assurer les consultations, soit pour des dépistages de tumeurs ou le contrôle de leur évolution – vu que certains nécessitent d'autres traitements, comme la chirurgie, par exemple –, tout en dispensant les dernières séances de radiothérapie (avec une des deux vieilles machines) à quelque trente malades dont le rendez-vous remonte à un an. «Ceux-ci bénéficient encore de leurs séances de radiothérapie avec l'une des deux vieilles machines maintenue tant bien que mal en service, avant l'arrêt complet, soit vers la mi-janvier, en attendant l'installation complète du nouveau matériel.» Néanmoins, la situation de ce service qui a fait couler beaucoup d'encre est loin d'être reluisante ; elle risque de piétiner encore, si la procédure de rapatriement (au Canada) des sources radioactives des deux anciens cobalts n'est pas effectuée, a-t-on appris de sources officielles. L'achèvement des travaux est prévu en août prochain, sous réserve qu'il n'y ait aucun arrêt ni aucun autre atermoiement, sous quelque prétexte que ce soit, espèrent, tous ensemble, les malades, leurs proches et le personnel médical.