L'information avait provoqué un séisme au sein de l'établissement militaire. C'était en octobre dernier. Cinq généraux-majors, dont trois chefs de région militaire et l'ex-patron de la Gendarmerie nationale, sont inculpés par le tribunal militaire de Blida et placés sous mandat de dépôt pour, entre autres, «enrichissement illicite», «trafic d'influence» et «abus de fonction». Pour la première fois dans l'histoire de la grande muette, de hauts gradés occupant des fonctions importantes sont poursuivis et incarcérés. Il s'agit des généraux-majors Lahbib Chentouf, ex-chef de la 1re Région militaire (RM), Saïd Bey, ex-chef de la 2e RM, Cherif Abderrazak, ex-chef de la 4e RM, Menad Nouba, ex-commandant de la Gendarmerie nationale, et Boudjemaa Boudouaouar, ex-directeur des finances au ministère de la Défense nationale, mais aussi d'un colonel, régional d'Oran, de la direction centrale de la sécurité de l'ANP. Le chef de l'état-major de l'Anp et vice-ministre de la Défense a frappé fort. Profitant de l'affaire des 701 kg de cocaïne saisis au port d'Oran, dissimulés dans une cargaison de viande importée par Kamel Chikhi, un magnat de l'immobilier, il a eu la main lourde en ayant raison des plus influents chefs de Région militaire, du plus ancien directeur central des finances et responsable de la commission des marchés au ministère de la Défense, au commandant de la Gendarmerie nationale, dont les noms été mêlés aux affaires pour certains et à Kamel Chikhi, pour d'autres. Après les avoir radiés de l'effectif au mois d'août dernier, dans le cadre d'un important mouvement dans les rangs de l'armée, qui a touché pour la première fois les chefs des six RM, des forces et des directions clés de l'administration au département qu'il dirige d'une main de fer, le général de corps d'armée, Ahmed Gaïd Salah, a mis en mouvement une action judiciaire contre les mis en cause, qui apprendront à leurs dépens leur mise sous interdiction de quitter le territoire. Des perquisitions à leur domicile sont alors ordonnées, quelques jours avant qu'ils ne soient déférés devant le tribunal militaire qui les a placés sous mandat de dépôt en moins de deux heures seulement. Aucune information officielle n'a été rendue publique par le ministère de la Défense, mais des sources bien informées affirment que les prévenus avaient refusé de répondre aux questions du juge et l'affaire est restée pendante durant 20 jours, avant que la décision de les libérer ne soit prise par la Présidence, sans que les charges ne soient abandonnées.