Les intentions du gouvernement concernant l'ouverture, promise, de l'audiovisuel au privé commencent à se dessiner. Les autorisations se limiteront à la création de chaînes thématiques, dont les capitaux doivent être à 100% algériens. C'est ce qu'a révélé le ministre de la Communication, Mohamed Saïd, lors de son passage hier sur les ondes de la Chaîne I de la Radio nationale. Selon lui, la première mouture du projet de loi sur l'audiovisuel, qui devrait consacrer cette ouverture, est actuellement en débat au niveau du gouvernement. «Je ne peux pas donner plus de détails sur le contenu du projet, tant que le gouvernement n'a pas donné son accord. Le texte n'est pas définitif et peut être modifié ou amendé», déclare-t-il. Affirmant que l'ouverture du secteur audiovisuel est une décision politique annoncée par le chef de l'Etat dans son discours du 15 avril 2011, le ministre précise que la création de nouvelles chaînes se fera conformément à un cahier des charges bien précis. Le premier responsable du secteur de la communication, qui s'est montré peu loquace sur le contenu de ce texte tant attendu par l'opinion nationale, s'est contenté de donner seulement un second message. Celui-ci concerne les financements des futures chaînes privées algériennes. Selon lui, le projet, qui devrait atterrir sur le bureau de l'APN au mois de juin prochain, codifiera ce volet afin de barrer la route aux financements étrangers. «Les capitaux de ces chaînes doivent être à 100% algériens», lance-t-il. Ainsi ce texte risque de décevoir, encore une fois, les professionnels et l'opinion publique qui attendaient depuis des années la naissance de nouvelles chaînes généralistes pour en finir avec le monopole de l'Etat sur le secteur. Pour Mohamed Saïd, l'audiovisuel public restera «la colonne vertébrale». «Plus de 30% d'invendus pour la presse quotidienne» Evoquant la situation de la presse écrite, publique et privée, Mohamed Saïd donne de nouvelles informations, concernant le nombre de titres quotidiens, le tirage et les invendus. Jamais annoncé par un officiel algérien, le taux d'invendus des journaux en Algérie dépasse de loin la norme. Sur les trois millions d'exemplaires tirés quotidiennement par les 130 quotidiens, 30% sont des invendus. «C'est un taux très important. La norme internationale est de moins de 15% d'invendus», explique-t-il. Dans ce sens, Mohamed Saïd accuse directement les distributeurs et les vendeurs qui, selon lui, combinent pour avoir un tel taux d'invendus afin de pouvoir revendre le papier journal au kilo. «Ils sont bénéficiaires de cette situation. C'est pour cela que nous avons décidé de réduire de 25% le tirage de la presse publique», dit-il. L'orateur parle également de la suprématie de trois à quatre journaux qui totalisent, à eux seuls, 50% des tirages quotidiens (1,5 million d'exemplaires/jour). «Le reste est réparti entre les différents titres. Il y a un déséquilibre dans les tirages», reconnaît-il. Ce faisant, Mohamed Saïd revient sur la distribution de la manne publicitaire. Il insinue, à cet effet, un changement de politique. «La presse publique capte actuellement moins de 50% de cette manne. Le reste va à la presse privée (…) Les nouveaux journaux seront aidés dans un premier temps pour leur permettre de se placer sur le marché. Mais au bout d'un certain temps, s'ils n'arrivent pas à grandir, ils n'auront pas de publicité», soutient-il, en affirmant que les projets de loi sur la publicité et sur les sondages d'opinion seront élaborés au courant de l'année en cours. Remédier au handicap de la communication institutionnelle Toujours concernant l'organisation du secteur de la presse écrite, le ministre reconnaît également l'existence des difficultés dans l'installation de l'instance de régulation, de la commission de la carte nationale de presse et du conseil d'éthique et de déontologie. «Les journalistes doivent s'organiser», lance-t-il. S'agissant de l'éternel handicap de la communication institutionnelle qui s'est fait ressentir, notamment lors de l'attaque terroriste d'In Amenas, l'orateur promet des changements. Ces derniers interviendront, peut-être, après l'organisation d'un séminaire national sur la communication institutionnelle. «Ce séminaire sera organisé dans deux ou trois mois afin d'améliorer notre communication et de définir les difficultés qui font que l'administration algérienne ne communique pas avec la presse», dit-il. Il rappelle, dans ce sens, que le gouvernement avait examiné, en 2011, un plan de communication institutionnelle. «Mais, malheureusement, il n'a pas été mis en application», dit-il.