La nouvelle de la mort du moudjahid authentique et du grand poète, auteur et compositeur, Maître Mustapha Toumi, m'accable de douleur et m'afflige de tristesse. De partager la même terre et le même ciel que ce patriote, digne fils de l'Algérie, et éminent créateur de la culture algérienne, m'emplit de fierté. Mustapha Kamel Toumi, naquit à Bir Djebah, à La Casbah dont il a puisé tous les savoirs, tous les codes et toutes les valeurs de dignité, de fierté et de liberté si bien que naturellement, il fit don de sa jeunesse pour libérer le pays au maquis de la Wilaya IV, puis fit don de sa force créatrice et de sa sève nourricière à la construction de l'Algérie culturelle. Maître Mustapha Toumi, à la fois érudit et savant des choses de notre pays – et même au-delà –, de son histoire millénaire et tumultueuse, de sa culture profonde et diversifiée, de ses femmes et de ses hommes et de leurs hauts faits d'art, nous lègue une œuvre qui puise sa saveur, son intelligence et son acuité d'un patrimoine immémorial qu'il a renouvelé, approfondi et enrichi. Mustapha Toumi était un véritable créateur, repris non seulement par les artistes les plus prestigieux, mais également par tout un chacun sous forme de dits, d'adages, de proverbes : «Sebhan Llah Ya Ltif. Kayene chi nass men sthhahoum iqoulou khaf !» Sebhan Llah Ya Ltif, Incomparable pièce ciselée à l'aune de la sagacité populaire, à celle de la métaphore tissant la trame qui fait sens et à celle de la parabole réfléchissant cet univers culturel qui imprègne tout à la fois le ciel de sa Casbah natale et ses venelles dans lesquelles Maître Mustapha Toumi a puisé pour notre enchantement. Il était de toutes les espérances, il a chanté tous les hymnes à la liberté, tous les chants d'espoir, tous les airs de dignité et tous les appels au respect des droits humains. En toute l'Afrique, résonne encore aujourd'hui «Ana houra fi El Djazaïr» qu'il avait créée pour Myriam Makeba en 1969, à la manière d'un chant général. Il est parti rejoindre El Hadj M'hammed El Anka, sans doute pour apporter une dernière touche au chant qu'ils nous dédieront pour conduire nos pas et rester dignes d'eux. Je m'incline avec respect et déférence à la mémoire du moudjahid authentique, de Maître Mustapha Toumi.
Nous bouclions la dernière parution d'Arts & Lettres quand Mustapha Toumi nous quittait puis que ce texte nous parvenait. Nous n'avions pu qu'insérer, in extremis, un petit extrait de «Sebhan Allah yal ltif» pour nous associer à la reconnaissance générale envers le grand poète.