La rivalité algéro-égyptienne se limite-t-elle au sport ? Les couacs entre les deux nations ont toujours existé même en politique. Autant leurs liens historiques sont profonds, autant les différends sont grands. Mais il n'y a eu aucune crise politique majeure entre les deux pays. Ce qui se passe depuis mercredi dernier, suite à la défaite de l'équipe égyptienne face à l'Algérie en match d'appui pour la qualification au Mondial sud-africain de 2010, constitue un précédent dans l'histoire des relations entre les deux pays. Le président égyptien, Hosni Moubarak, convoque le conseil national de sécurité et fait des déclarations qui s'apparentent à « une mise en garde contre les Algériens ». « Durant toute ma carrière, je n'ai jamais vu ça. Le président Moubarak n'a jamais convoqué un conseil national de sécurité même pour l'agression israélienne contre Ghaza », a affirmé l'ancien ministre de la Communication et diplomate, Abdelaziz Rahabi. Selon lui, les déclarations des officiels égyptiens et leurs attaques contre l'Algérie sont d'une extrême gravité. « C'est inadmissible ! Les officiels égyptiens s'attaquent à l'Algérie sans retenue. Je pense que les responsables algériens sont en train d'examiner la situation pour comprendre les raisons de cette réaction. Mais il ne faut pas se taire face à ce genre de déclarations », estime-t-il. Ira-t-on vers une crise diplomatique ? Pour notre interlocuteur, il n'en est rien pour le moment. « Il faut être vigilant. Cette réaction égyptienne n'est qu'une diversion, car l'Algérie n'a aucune responsabilité pour protéger les supporters égyptiens au Soudan. Et ensuite, c'est l'Algérie qui doit demander des comptes au pouvoir égyptien qui s'est engagé à assurer la sécurité des Algériens au Caire », ajoute-t-il. Comment expliquer cette rivalité ? Pour les spécialistes, les différends algéro-égyptiens sont directement liés à un souci de leadership dans le monde arabe. Ce n'est bien sûr pas l'Algérie qui cherche à se positionner. Ce sont en revanche les Egyptiens qui veulent à tout prix récupérer un leadership perdu depuis les accords de Camp David entre le président Anouar El Sadate et les Israéliens en septembre 1978. Voulant garder sa position de pont entre l'Orient et le Maghreb, l'Egypte ne tolère même pas une défaite sportive. C'est ainsi que le fair-play ne s'est jamais invité à l'occasion de toutes les confrontations entre les deux pays. En 1983, et pour un simple match préliminaire des Jeux olympiques, la tension était grande. La haine entre les deux pays s'est installée depuis le fameux match de foot pour la qualification au Mondial italien de 1990. La rencontre s'est jouée au Caire en 1989 et l'Egypte avait éliminé l'Algérie. Une violente bagarre a eu lieu entre les joueurs des deux équipes et un médecin de la sélection égyptienne avait perdu un œil dans l'affaire. En réaction à cet acte, la justice égyptienne avait émis un mandat d'arrêt international contre Lakhdar Belloumi, le légendaire numéro 10 des Verts. Comme elle a privé l'Algérie d'un troisième mondial, l'Egypte, elle aussi, a été empêchée d'une participation en Coupe du monde de 2002. C'était en 2001 à Annaba, et l'Algérie qui était déjà disqualifiée, a renvoyé l'Egypte à la maison en refusant de lever le pied lors de cette rencontre. Et comme aujourd'hui, l'animosité égyptienne contre l'Algérie est sans limite. En plus de la guerre sportive, les deux pays ont connu aussi une concurrence sur le plan politique. Le fait le plus important est la polémique éclatant, en mai 2004, entre les deux pays sur la démocratisation de la Ligue arabe et l'instauration d'une présidence tournante de cette organisation. Touché, semble-t-il dans son « amour- propre », le pouvoir de Hosni Moubarak a réagi fermement à la demande du ministre algérien des Affaires étrangères de l'époque, Abdelaziz Belkhadem. Il a dû recourir au lobbying pour maintenir Amr Moussa à la tête de l'organisation panarabe et de sauvegarder son siège au Caire. En outre, il faut dire que le rôle de l'Egypte dans le conflit arabo-israélien a complètement altéré l'image de ce pays chez l'opinion publique arabe et algérienne en particulier.