L'accusé est aussi reconnu coupable de vol de la voiture du défunt. Le verdict a été prononcé à l'issue d'un procès en appel. Le 19 avril 2011, Ahmed Kerroumi avait disparu, avant que son corps soit retrouvé, sans vie, le 23 avril, dans le local du bureau d'Oran du MDS. Le représentant du ministère public avait réclamé la peine de prison à perpétuité à l'encontre de Belbouri Mohamed Abdelkader qui a clamé son innocence devant les juges. Fait inédit dans les annales judiciaires : les avocats de la défense et ceux de la partie civile ont plaidé à l'unisson que «Belbouri Mohamed Abdelkader est innocent et le vrai coupable court toujours». Maître Farid Khemisti, avocat de la partie civile, a été déçu par le verdict : «Belbouri Mohamed Abdelkader est un bouc émissaire.» Dans sa plaidoirie, maître Salah Hanoun, qui s'est constitué bénévolement, a plaidé la non-culpabilité de l'accusé en soulignant que «cet assassinat est plutôt lié aux activités politiques du défunt». «Ahmed Kerroumi a été assassiné en avril 2011, peu de temps après sa rencontre avec le rapporteur spécial des Nations unies sur la liberté d'expression. Le défunt militait au sein de la CNCD d'Oran pour réclamer le changement et la démocratie», rappelle Me Hanoun. Les avocats de la défense et ceux de la partie civile ont demandé «un complément d'information pour aboutir à la manifestation de la vérité». Dénonçant «un verdict expéditif», Me Medjdoub, avocat de la défense, a relevé «des contradictions entre les deux résultats de l'analyse d'ADN faite en l'espace de quelques jours». «Les investigations de la police ont été orientées à charge contre l'accusé. Il y a beaucoup de zones d'ombre», déplore-t-il. Durant son audition par le juge, Belbouri Mohamed Abdelkader a nié totalement avoir tué Kerroumi : «Je n'ai aucune raison de le faire et ma reconnaissance des faits devant la police judiciaire m'a été soutirée sous la contrainte.» Maître Farid Khemisti a réclamé que «justice soit faite» et a plaidé «le bénéfice du doute». Et cet avocat de relever que «le tableau des appels téléphoniques sur lequel s'est basée l'accusation est illégal, annonyme et non daté». La défense a plaidé l'acquittement, de même que les trois avocats de la partie civile ont écarté, dans leurs plaidoiries, la thèse de l'assassinat de droit commun en demandant au tribunal d'éclaircir les zones d'ombre qui caractérisent ce dossier avant de se prononcer. Selon les avocats, «le dossier, dont le traitement a demandé deux longues années, est truffé de contrevérités et d'expertises médicales contradictoires», avançant comme exemple le cas du siège des toilettes trouvé partiellement cassé le jour de la découverte du cadavre, le 23 avril 2011, alors que l'expert médical a indiqué dans son rapport que le siège turc dont dispose le local du MDS, lieu du crime, était totalement fracassé après l'assassinat de Kerroumi. «Les photos contenues dans le dossier en font foi», ont-ils indiqué, dans le sillage de leur énumération des points qui éloignent la culpabilité de Belbouri Mohamed Abdelkader. D'autres points également, évoqués par la défense à l'avantage de cet accusé, ont trait à la surprenante sépulture retrouvée bien bâtie le lendemain de l'enterrement de la victime et la disparition à jamais du torchon bleu imbibé de sang dont l'appartenance est imputée à l'inculpé. Kaddour Chouicha, membre du comité directeur de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (LADDH) n'a pas caché sa déception face à ce verdict : «Beaucoup de questions restent sans réponse», déplore-t-il. Le comité Vérité et justice sur l'assassinat d'Ahmed Kerroumi, qui regroupe des proches, amis et compagnons de lutte du défunt, a déclaré à la presse à l'issue du verdict qu'«il ne va jamais baisser les bras pour que la vérité soit enfin révélée sur les véritables auteurs de son assassinat».