Le mal avance insidieusement à grandes enjambées, gagnant la majorité des villes, villages et chaumières avec, toutefois, des pics alarmants enregistrés dans les agglomérations urbaines. Les bonnes mœurs, a-t-on constaté, dépérissent de jour en jour et les règles de bon voisinage, le respect d'autrui et la décence ne sont plus que des concepts creux. D'aucuns affirment qu'un trop-plein d'irrespect et de haine envers les autres, d'actes répréhensibles et de propos orduriers et blasphématoires meublent le quotidien d'une société qui a perdu tous ses repères. Beaucoup d'avis attestent que ces dérives sociales latentes, voire quasiment bannies de nos traditions socioreligieuses, se sont manifestées au grand jour et se sont exacerbées à la faveur de la crise économique des années 1980-1990 et ses répercussions douloureuses (perte de milliers d'emplois, érosion vertigineuse du pouvoir d'achat, propagation des drogues et des psychotropes, effet du terrorisme sur les couches pauvres et vulnérables). De nombreux échos convergent, par ailleurs, vers l'idée que « le dérèglement des mœurs et ses incidences désastreuses sur la vie communautaire que nous continuons à subir de plein fouet est une punition divine, car nous nous sommes écartés et avons bafoué les préceptes religieux prescrits par l'Islam ». Réduites à leur plus simple expression, en raison du divorce patent des pouvoirs publics qui laissent faire, du mouvement associatif (ou ce qui en reste), des parents d'élèves cédant au défaitisme, les traditions ancestrales d'entraide dans les moments difficiles, de tolérance et de générosité spontanée qui fondent notre culture et notre identité sont tombées en lambeaux. Des prêches moralisateurs à la rescousse Elle semble désormais bien lointaine la belle époque où les parents, les proches voisins, l'instituteur et les personnes âgées étaient respectés par tous au point d'être vénérés. Des enfants en manque d'éducation, des voyous et autres loubards bombardant un voisin de tous les noms d'oiseau, débitant un chapelet d'insultes choquantes devant les maisons de paisibles citoyens ou, pire encore, agressant aux frontons des établissements scolaires des enseignants et des collégiennes, sont des agissements qui prennent des proportions alarmantes. Le dérèglement des mœurs, couplé à une recrudescence d'agressions verbales (parfois physiques) et des écarts de conduite sous de multiples formes, est, à moins que l'on veuille se voiler la face, une réalité palpable qui s'incruste dangereusement dans notre quotidien déjà très mal au point. Si bien que les imams ne ratent pas une occasion pour multiplier les prêches en direction des fidèles, car, faut-il le rappeler, le fléau a atteint des pics alarmants. Est symptomatique à cet égard cette troublante et réelle histoire d'un père de famille qui s'est confié à un imam lui faisant la révélation suivante : « J'ai honte, car je viens de dissuader mon frère de me rendre visite pour quelques jours au motif qu'il est quasiment impossible de rester en paix avec un proche de famille sans entendre des obscénités qui fusent de toute part même en fermant porte et fenêtres ».