Du béton, encore du béton, toujours du béton ! Et pour être dans l'air du temps, on prolonge ce matériau qui nous est devenu tellement coutumier jusqu'aux terres agricoles à haute valeur céréalière. En tout cas, il ne faut pas s'étonner de la disparition quasi totale des dernières parcelles de terre qui ont jusque-là échappé par miracle à l'avancée inéluctable du béton qui écrase tout sur son chemin. Ce désastre se dresse malheureusement au su et au vu de tous au niveau de la majeure partie des localités de la wilaya de Sétif, particulièrement dans les daïra d'El Eulma, Aïn Arnat, Aïn Azel et Aïn Oulmène. Dans la daïra d'El Eulma, la commune de Bazer Sakhra, jadis potager et grenier des Hauts- Plateaux, n'est hélas plus qu'un simple décor. Les terres, les vergers, les jardins… ont tous disparu. A leur place se dressent des masses de béton, et les terres agricoles ont cédé la place à des hangars à perte de vue. Même image à Mechta Smara, située à la sortie ouest de la ville d'El Eulma. Cette petite localité agricole, qui faisait vivre des centaines de fellahs, a été à son tour asservie par ce « monstre » qu'est le béton. Evidemment, ces dilapidations se sont faites avec le consentement des propriétaires attirés par le gain. A la faveur de cette situation, le mètre carré qui se négociait autrefois entre 500 et 1000 DA en rase campagne, aujourd'hui, on le trouve, et difficilement, entre 20 000 et 50 000 DA. Cette frénésie n'a épargné aucune localité de la wilaya. A Aïn Azel, tout comme à Aïn Oulmène, les habitations se dressent à perte de vue sur des terres agricoles ; les hangars servant de dépôts et les terres clôturées sont devenus une image coutumière. A Sétif, notamment à Aïn Arnat, le même désastre, à savoir l'empiétement sur les terres agricoles, est omniprésent. En dépit des différentes lois promulguées pour les protéger, le naufrage est complet. Le laisser-faire des responsables concernés a largement contribué à ce désastre. Résultat : les habitants de Bazer Sakhra et Smara, deux localités autrefois agricoles par excellence, se rendent à El Eulma pour l'achat d'un bouquet de persil et d'un sachet de lait, c'est incroyable mais vrai ! Il suffit de se rendre à El Eulma ou à Bazer Sakhra pour constater la catastrophe. Evidement, à ce rythme, la tradition agricole de la wilaya de Sétif, autrefois grenier du pays, va vers une disparition totale et à la place, nos enfants n'auront droit qu'à une image hideuse. Certains fellahs de la commune de Bazer Sakhra, qui ont vendu au prix fort leurs terres à des commerçants venus de divers horizons pour les transformer en dépôts et usines, se sont retrouvés du jour au lendemain sur le carreau après avoir gaspillé tout leur argent. Et du coup, l'image de ces gens ayant abandonné leurs terres au profit d'une véritable mafia du foncier, qui sévit dans la wilaya, notamment à El Eulma et Bazer Sakhra, revient à l'esprit de ceux qui, pour une raison ou une autre, veulent suivre leur exemple. L'argent leur fait tourner la tête, notamment les plus jeunes d'entre eux qui rêvent d'une vie « meilleure », loin de la campagne.