L'Assemblée populaire de la wilaya de Béjaïa est mal en point. Elle se réunira aujourd'hui dans une session extraordinaire qui n'est pas, pour une fois, convoquée par son président, mais par le wali. Hamou Ahmed Touhami intervient à quelques jours de la fin de l'année, qui a risqué de s'achever sans l'adoption du budget primitif 2015. La dernière session ordinaire a achoppé sur l'objection d'une opposition qui réclame le renouvellement des structures de l'Assemblée à la lumière de la nouvelle majorité qu'elle constitue désormais. Le président de l'APW, Mohamed Bettache, a annoncé une session pour le début janvier 2015, mais l'opposition l'a accusé de vouloir gagner du temps, malgré le retard constaté. Une invitation a même été adressée à la presse pour l'informer de la tenue d'une session le 4 janvier, dont l'ordre du jour est la mise en «conformité de l'Assemblée aux textes» et règlements et l'examen du BP 2015. Face à cette impasse, le wali s'en mêle «conformément aux articles 15, 16, 17, 165 et 168 de la loi n°12-07 du 21 février 2012 relative à la wilaya», précise la cellule de communication de son cabinet. Deux rendez-vous donc pour une seule session. Une première dans les annales de l'APW de Béjaïa. Le bras de fer risque de continuer avec le maintien éventuel de la session du 4 janvier, mais surtout l'absence probable du P/APW à la session d'aujourd'hui. Se posera aussi la question de qui présidera cette session, sachant que l'apposition a signé la désapprobation des vice-présidents. En cela, la session d'aujourd'hui est «très extraordinaire». La crise qui a couvé ces derniers temps a amené l'opposition et le président de l'Assemblée à s'échanger les accusations à coups de déclarations publiques, le tout sur fond d'une reconfiguration politique. Une nouvelle majorité s'est constituée à la faveur de tractations politiques et met dos au mur le groupe FFS qui a, désormais, en face de lui un bloc conjoncturellement soudé autour du RCD, du FLN, du RND et des dissidents du FFS émargeant au «Forum socialiste» (FSLD). Soit vingt-deux élus dans une assemblée de 43 membres. Tout juste ce qu'il faut pour convoquer, jeudi 18 décembre, une réunion, tenue au sein même de l'APW, et installer en présence d'un huissier de justice de nouveaux présidents à la tête de trois commissions de l'APW. Ce coup de force qui exacerbe la crise manifestée jusque-là dans les débats mouvementés lors des sessions, dont la dernière a été bloquée, a fait réagir le P/APW. Mohamed Bettache, qui a refusé d'accéder à la demande de renouvellement des instances de l'Assemblée, a essuyé des accusations de non-respect de la majorité, et de fermer l'œil sur le fait que des élus de son parti (FFS) «ont déserté depuis longtemps» l'APW, parce que «se trouvant à l'étranger». «Depuis quand l'installation des présidents des commissions de l'Apw échappe-t-elle aux prérogatives du président de l'Apw et se fait sous l'œil d'un huissier de justice ?» s'est-il interrogé dans une déclaration transmise à notre rédaction. Mohamed Bettache considère la sortie de l'opposition comme «un précédent grave et dangereux» qui «porte atteinte à la crédibilité d'une institution». Il confie avoir projeté «d'élargir l'alliance au FLN pour stabiliser l'APW». Mais le FLN, qui avait manifesté, pour rappel, son soutien politique au groupe FFS depuis le début du présent mandat, a fini par claquer la porte de l'alliance. Déclarant être un «démocrate convaincu», non sans dénoncer des «intérêts inavoués» insinuant même une coalition contre «le projet de la reconstruction du consensus national», Mohamed Bettache a promis sur les ondes de la radio locale que «c'est la majorité qui va être souveraine». Et la nouvelle majorité, qui n'en demande pas plus, entend continuer sa démarche en mettant pour la première fois le FFS en minorité impuissante. Pour les 22 élus, le fonctionnement interne des commissions ne relève pas des prérogatives du P/APW. Leur réunion du 18 décembre «dénote de leur prise de conscience», écrivent-ils dans une déclaration signée par les chefs des groupes du RCD (M. Deboub), du FLN (H. Sadji), par deux élus du RND (A. Boukendoul et Z. Meloui) et par Y. Baloul au nom du FSLD, dont les élus réclament leur «droit» à avoir aussi leur groupe. La session extraordinaire prévue pour aujourd'hui promet en tout cas d'être très en relief.