Désigner l'Algérie comme une « source intarissable » de terrorisme et, par ricochet, une menace permanente pour la France, voire l'Europe participe d'une entreprise de dénigrement visant à ternir l'image d'un pays qui lutte depuis de longues années contre ce fléau planétaire. Quand un « Marsien » se fait exploser sur la lune, la France s'arrangerait à trouver un « lien » avec son ancienne colonie, l'Algérie, de laquelle elle a été durement chassée. Et lorsqu'un jeune Nigérian tente sans succès un attentat kamikaze sur un vol Amsterdam-Detroit, Paris agit comme si le coup est venu de l'Algérie. Pour se prémunir donc contre d'éventuelles attaques terroristes, elle décide de « neutraliser » les voyageurs algériens à l'entrée et à la sortie de ses aéroports, donnant « gracieusement » le statut de « potentiel terroriste » à tout un peuple, comme elle le faisait jadis avec les moudjahidine. Bien que l'attentat avorté ciblait les Etats-Unis, la France était la première à réagir en actionnant son plan Vigipirate contre l'Algérie et six autres pays. Le Nigeria ne figure pas sur la liste française, même si le présumé auteur de la tentative d'attentat porte la nationalité de ce riche pays en pétrole. Outre l'humiliante fouille corporelle et l'inspection minutieuse des effets personnels de nos voyageurs, la France exige des compagnies aériennes de communiquer les informations personnelles des passagers au moment de la réservation et non plus à l'embarquement comme c'est le cas actuellement. Le ministre français de l'Intérieur, Brice Hortefeux, ira jusqu'à menacer de « représailles » d'ordre économique contre les compagnies qui ne respecteraient pas ces nouvelles mesures. Il parle d'une amende qui peut aller jusqu'à 50 000 euros contre les compagnies aériennes qui refuseraient de jouer le jeu. Une mise en garde contre Air Algérie qui opère des dizaines de vols par semaine vers la France ? Parmi les sept pays « à risque », selon les « critères » de l'Elysée, l'Algérie est de loin le pays qui a plus de relations et de circulation de personnes avec la France. Pourquoi donc stigmatiser l'Algérie ? Xavier Driencourt, ambassadeur de France à Alger, l'explique par la persistance de la menace terroriste sur le territoire national. Mais ce diplomate français à Alger ne voit aucunement en ces mesures un « caractère discriminatoire », affirmant dans un entretien accordé à El Watan que « le dispositif n'est dirigé contre aucun pays et n'a pas pour stigmatiser telle ou telle population ». Diplomatique, l'explication de l'ambassadeur est loin d'être convaincante. Comment peut-on dire que le dispositif n'est pas dirigé contre l'Algérie et en même temps on intensifie le contrôle de tous les passagers en provenance de ce pays sans que cela soit élargi à d'autres nations du Maghreb par exemple ? Bien que les passagers puissent être issus de différentes nationalités, le dispositif vise sans aucun doute à présenter au reste du monde l'Algérie comme une « nation de terroristes » comme l'Afghanistan, le Yémen ou encore la Somalie. Pourtant, l'Algérie est le premier pays au monde à lutter contre le terrorisme et à subir ses affres. Un pays qui ne cesse d'être sollicité pour son expérience en la matière depuis les attentats du 11 septembre 2001 contre les tours jumelles américaines. Mais la conjoncture semble être en défaveur de notre pays qui s'oppose à l'ingérence des puissances occidentales, à leur tête la France et les USA, dans la région du Sahel, aux portes du Sud algérien. La volonté affichée de la France de « donner un coup de main » dans la « lutte antiterroriste » dans cette sous-région n'a pas été du goût d'Alger qui considère cet espace comme un domaine de souveraineté des pays « frontaliers ». Désigner l'Algérie comme une « source intarissable » de terrorisme et, par ricochet, une menace permanente pour la France, voire l'Europe participe d'une entreprise de dénigrement visant à ternir l'image d'un pays qui lutte depuis de longues années contre ce fléau planétaire. Et donc tenter d'isoler ce pays et d'affaiblir son rôle régional au profit d'entités plus « dociles ». Pouvoir s'implanter dans la région, c'est arriver à la contrôler et à mieux défendre ses intérêts. Le plus étonnant dans cette affaire, ce n'est pas le dispositif de contrôle à l'égard des ressortissants algériens. C'est plutôt le silence d'Alger qui a quand bien même réagi aux mesures américaines allant dans le même sens en convoquant lundi son ambassadeur à Alger. Une convocation qui n'a pas été destinée à l'ambassadeur de France à Alger. Encore une fois, notre diplomatie adopte profil bas envers l'ancienne puissance coloniale. Une attitude que peut-être va expliquer le ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, lors de son passage aujourd'hui sur la Chaîne I de la Radio nationale.