Mardi 12 janvier. Route d'Aftis, commune de Boudjellil. Il est 21h et la nuit est tombée depuis au moins trois heures sur cette paisible bourgade où l'on passe souvent sans s'arrêter. Une Renault Clio Classic file sur le chemin de wilaya 42. A bord ils sont quatre ou cinq hommes puissamment armés. Ce sont des terroristes d'Al Qaîda au Maghreb, mais ils sont loin de se douter qu'ils ont été repérés et sont filés par des éléments spécialisés dans la lutte antiterroriste. Des hommes rompus aux opérations les plus dangereuses. D'après des informations fiables, ce sont ceux-là mêmes qui ont à leur actif l'élimination d'un groupe de 10 terroristes à bord d'un fourgon de transport à M'sila, il y a quelques semaines. Les policiers sont arrivés à bord de trois véhicules banalisés, qu'ils garent sur le bord de la route avant de prendre discrètement position en se fendant au sein de la population. Ils ont décidé de tendre leur embuscade à Aftis, au niveau d'une intersection où le véhicule suspect est obligé de ralentir. Un kilomètre plus loin, les terroristes se seraient retrouvés sur la très encombrée RN26, où il aurait été difficile de les appréhender sans commettre un véritable carnage. Quelles étaient leur destination et leur éventuelle cible ? Aucun indice ne permet à l'heure actuelle de le savoir. Toujours est-il qu'aux premiers coups de feu, le chauffeur du groupe tente de faire marche arrière, mais il est tué sur le coup. A l'intérieur de la voiture, ils sont quatre ou cinq terroristes, tous armés de kalachnikovs et de pistolets. Dans le feu de l'action, deux membres du groupe, assis à l'arrière du véhicule, arrivent à s'enfuir. L'un d'eux est le chef. Les deux occupants des sièges avant meurent dès les premières minutes de l'échange de tirs. Des informations non corroborées font état de la mort d'un troisième acolyte assis à l'arrière du véhicule. Sa ceinture d'explosifs aurait sauté. C'est ce qui explique que le toit de la voiture ait littéralement volé en éclats. Sur les lieux de l'embuscade, seul le buste, par ailleurs complètement carbonisé, de l'un des terroristes est retrouvé en une seule partie. Entre temps et à la faveur de la nuit, les deux fuyards coupent à travers champs et se retrouvent face à une rivière. Ils ne connaissent visiblement pas les lieux, sinon ils auraient pris la direction opposée pour se retrouver dans les denses forêts des Ath Abbès. Le chef est grièvement blessé. Ils traversent la rivière, coupent à travers les oliveraies, traversent la RN26 pour se retrouver à Tassergant, sur la route d'Ath Mellikèche, au pied du Djurdjura. L'endroit est un plateau de fermes et de maisons individuelles éloignées les unes des autres. Au petit matin, les deux terroristes se réfugient dans une baraque. Non loin de là, à Aftis, la Renault Clio achève de se consumer. Gendarmes, soldats et patriotes ont pris possession des lieux. Les opérations de recherches pour retrouver les deux fuyards ont démarré aussitôt l'embuscade terminée. Elles sont conduites conjointement par le commandant du secteur militaire, des officiers du DRS et les chefs des patriotes de la région qui ont l'avantage de bien connaître la région. Comment les deux officiers de l'ANP ont laissé leur vie Aux alentours de 9h, le chef blessé va commettre l'erreur qui va précipiter sa perte. Il passe un coup de téléphone, probablement pour demander des secours. C'est ce qui va permettre aux forces de sécurité de localiser avec plus ou moins de précision l'endroit de sa retraite. Policiers, gendarmes, paras et patriotes se déploient tout autour de la zone suspectée. Discrètement, la population est avertie de se cloîtrer chez elle. La zone est ratissée. L'étau se resserre de plus en plus sur les deux fugitifs, mais l'endroit précis où ils se trouvent n'est pas encore connu avec exactitude. Il ne le sera que vers 18h. Une baraque d'une seule pièce, à la porte fermée, est fortement suspectée de servir d'abri pour les deux terroristes. « Ils sont là », dira l'un des officiers en désignant la vieille baraque. Le commandant du secteur militaire et un colonel des renseignements sont à la tête des hommes déployés tout autour. Au moment où le commandant ouvre la porte de la baraque, les officiers sont cueillis par une rafale de kalachnikov. Embusqués derrière la porte, les deux terroristes ont décidé de vendre chèrement leur peau. L'échange de coups de feu durera une demi-heure. Entre temps, les blessés sont évacués vers l'hôpital d'Akbou et l'EPSP de Tazmalt. Le commandant du secteur militaire est évacué dans une 206, mais ses blessures étant trop graves, il n'en réchappera pas. Le colonel du DRS également. L'élimination des deux terroristes a été chèrement payée. Elle laisse un goût d'amère victoire dans la bouche de tous les patriotes qui ont connu et côtoyé El Hadj Bouamama. Un patriote qui a été de tous les combats contre le terrorisme et n'a jamais hésité à mettre sa vie au service de sa patrie à chaque fois que le devoir l'appelait. Les terroristes abattus étaient relativement jeunes, entre 20 et 25 ans, et bien habillés, nous diront les témoins qui les ont vus étendus par terre. « Al Qaîda recrute de plus en plus et paie bien », nous dira l'un des patriotes bien au fait de la situation sécuritaire. De plus en plus de mouvements suspects sont signalés dans la région. Des casemates sont régulièrement découvertes dans les maquis de Tamellaht, Moka et Bouni. Le groupe éliminé préparait-il un attentat ? L'un des terroristes avait-il une ceinture d'explosifs autour de la taille ? Quelle était sa destination ? Quelle était sa cible ? Autant de questions qui restent pour le moment sans réponse, mais qui appellent à la plus grande vigilance.