Les locaux de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (LADDH), sis à la rue Didouche Mourad, se sont avérés trop exigus pour contenir les nombreuses personnalités venues rendre hommage au vieux routier des droits de l'homme en Algérie, Ali Yahia Abdennour, dans la soirée d'avant-hier. La Ligue a tenu à honorer son président d'honneur et rendre ainsi un hommage au parcours exceptionnel de cet infatigable militant à l'occasion de son 89e anniversaire. Dans l'assistance, on pouvait remarquer la présence d'anciens chefs de gouvernement, Sid Ahmed Ghozali, Mokdad Sifi, Ahmed Benbitour, d'anciens ministres, Abdelaziz Rehabi et Saïd Bendakir. Il y avait également Abdelhamid Mehri, Mohamed Saïd, l'ex-candidat à la dernière élection présidentielle, mais aussi d'anciens compagnons de prison de Ali Yahia, comme les frères Aït Larbi, Arezki et Mokrane. Des universitaires, des militants anonymes et surtout beaucoup de femmes n'ont pas raté cette occasion. Ils étaient nombreux à venir saluer le combat courageux du fondateur de la LADDH. Seul Ali Yahia Abdennour peut réunir dans une même salle autant de personnes d'horizons politiques différents. « C'est là justement la force de Ali Yahia. Il a su incarner, tout au long de son itinéraire, l'esprit d'un homme tolérant et généreux. Il a été le défenseur de tous les militants politiques, les communistes, les berbéristes et les islamistes », a témoigné un proche de Ali Yahia. Ce dernier aimait répéter « la défense des droits de l'homme, c'est défendre la personne pas son idéologie ». Le président de la LADDH, Mustapha Bouchachi, dans sa courte intervention, a estimé que « le nom de Ali Yahia Abdennour est étroitement lié à la défense des droits de l'homme en Algérie comme partout ailleurs », avant de dénoncer le fait que Ali Yahia continue à être ignoré dans son pays. « Il a été honoré dans le monde entier, aux USA, au Mexique, en France, en Suisse, à Londres sauf en Algérie », s'est indigné M. Bouchachi. Ali Yahia Abdennour qui garde toujours sa vivacité, prêt à en découdre malgré ses 89 ans, était très ému. Il s'est contenté de dire : « Je suis très touché par cet hommage et ému par votre présence. Je vous en remercie. » A l'occasion, un film documentaire retraçant le parcours du militant, depuis son adhésion au PPA-MTLD, vers la fin des années 1930 a été projeté. Le film réalisé par la fondation Alkaram, basée à Genève, fait un zoom sur les différentes étapes qui ont marqué l'engagement de l'enfant de Michelet (Aïn El Hammam). Cette fondation, faut-il le rappeler, lui a décerné le prix « Elkarama », à l'occasion du 10 Décembre (anniversaire des droits de l'homme). Monsieur droits de l'homme est sans doute né pour être un défenseur acharné des droits, tous les droits de la personne humaine. Très actif durant la guerre de Libération, il a succédé à Aïssat Idir à la tête de l'UGTA combattante, avant d'être arrêté par l'armée française. A l'indépendance, il participe à la fondation du FFS, avant de rejoindre le gouvernement, en tant que ministre des Travaux publics puis de l'Agriculture, dans le gouvernement de Boumediène, qu'il quitte en 1967. Depuis, il se consacre entièrement à la défense des droits de l'homme. Une lutte qui le conduit au sinistre bagne de Berrouaghia en 1985. La même prison qui l'a « accueilli » durant la guerre de Libération. Que de chemins parcourus, mais « il faut regarder le chemin qui nous reste à parcourir et les conquêtes à conquérir », a tranché Ali Yahia Abdennour.