L'enfant terrible du théâtre local et national ne ratait aucune occasion pour se retremper dans l'ambiance particulière de chaque édition du festival du théâtre. C'est dans une grande discrétion que s'est éteint, à l'âge de 78 ans, l'acteur le plus populaire de Mostaganem. Diminué par un terrible mal, il avait disparu du devant de la scène depuis près de 5 ans. C'est sur un fauteuil roulant qu'il fera une brève apparition à l'ouverture de la dernière édition du festival du théâtre amateur, en juin dernier. Arrivé très jeune dans la première troupe théâtrale constituée par son compère tout juste à la sortie de la Seconde Guerre mondiale, à la faveur du frémissement nationaliste de l'époque. C'est donc dès sa tendre jeunesse qu'il fréquentera les planches pour ne jamais plus les quitter jusqu'à son dernier souffle. Même si, durant les 10 dernières années, il ne sera que de manière épisodique appelé à jouer dans des films et autres courts métrages, ses apparitions sur la scène du festival du théâtre qu'il aura indubitablement marqué de son empreinte se limitant à de brèves apparitions pour meubler les lourdes cérémonies de clôture. En effet, l'enfant terrible du théâtre local et national ne ratait aucune occasion pour se retremper dans l'ambiance particulière à chaque édition. Très connu pour sa fameuse réplique qu'il entonnait à chaque fois qu'il était sollicité, Si Abdelkader n'hésitait pas à remettre ce costume qui fera de lui l'une des rares icones du théâtre de Mostaganem. C'est dans la pièce « El Guerrab oua Es Salhinne » de Ould Abderrahmane Kaki qu'il s'imposera comme un véritable acteur à la voix chevrotante et limpide, à la démarche singulière et à la gestuelle mesurée. Que ce soit dans des rôles comiques ou tragiques, Si Abdelkader n'avait pas d'équivalent sur la scène algérienne. Généreux dans l'effort, raffiné dans la démarche, il savait occuper l'espace scénique avec rectitude et habilité. Il avait également acquis un sens développé de l'improvisation à telle enseigne qu'il parvenait, avec une aisance singulière, à trouver des répliques fulgurantes lorsque la situation l'exigeait. Mais ce qui le caractérisait le plus c'était incontestablement sa profonde modestie. Evoluant dans un milieu où l'ingratitude, les coups tordus, les complots et les trahisons étaient légion, Belmokaddem avait résolument fait le choix de ne s'en tenir qu'à l'essentiel, à ne jamais se départir de son rôle et ne jamais s'encanailler avec les fossoyeurs de tous bords ! Le public avait gardé de lui l'image d'un homme sage, modeste, fier malgré une relative indigence, au contact facile et extrêmement chaleureux. Sa frêle silhouette, sa faconde, sa modestie et sa perpétuelle jovialité manqueront aux habitués de la sphère culturelle régionale, où jeunes et moins jeunes venaient s'abreuver à satiété ; désormais, le porteur d'eau ne sévira plus. Au matin de ce 18 janvier 2010, la source de Sidi El Okbi est orpheline, car plus personne ne la chantera avec autant de passion, de verve et de fidélité que ne le fit, 50 années durant, feu Abdelkader Benmohamed.