La Côte d'Ivoire, adversaire de l'Algérie demain en quarts de finale de la 27e édition de la CAN (Angola 2010) est, sans nul doute, la sélection africaine la plus prometteuse pour les prochaines années. Tous les observateurs internationaux de touts bords, entraîneurs, joueurs, journalistes, dirigeants… s'accordent sur une chose : la Côte d'Ivoire dispose, et de loin, du meilleur potentiel (joueurs) sur le continent. La montée en puissance de ce football, jadis inconstant, a coïncidé avec la mise en place (heureuse) de l'académie Mimosas, au milieu des années 1990, fruit d'un projet initié et mené à terme par deux hommes : l'Ivoirien et président de l'ASEC Mimosas, maître Ouénguenné, et l'ancien international français Jean Marc Guillou. Cette association allait jeter les bases de la construction d'une redoutable sélection dix ans plus tard. Entre-temps, les deux hommes se sont déchirés, fait la guerre, sont allés devant les tribunaux… et les enfants de Sol Béni (le camp d'entraînement) sont allés au bout de leur préparation. Ils avaient pour noms, les frères Touré, Eboué, Zokora, Dindane, Koné, Kader Keita … qui font le bonheur de grands clubs européens. Le phénomène Sol Béni a fait prendre conscience aux dirigeants de la Fédération que dorénavant la Côte d'Ivoire allait disposer des moyens humains et techniques pour s'installer au hit-parade du football africain. Le président de la Fédération ivoirienne de football (FIV), Jacques Anouma, un haut cadre à la présidence de la République, s'est complètement investi dans la mission de conduire les Eléphants vers les sommets. Mais comme tout dirigeant de Fédération en Afrique, il faisait face à d'énormes problèmes en matière d'organisation de la compétition, la faiblesse des structures et infrastructures, un championnat national à deux groupes totalement dominé depuis des années par l'ASEC Mimosas et l'Africa Sports. Le dernier coup d'éclat de la Côte d'Ivoire remonte à la CAN 1992 que les camarades d'Alain Gouamené ont remportée au Sénégal, après avoir étrillé l'Algérie (3-0) à Ziguinchor en ouverture du groupe B. Le divorce Ouénguenné- Guillou accéléra la progression des joueurs de la génération de Sol Béni. Presque tous, une trentaine environ, s'éparpillèrent en Europe sous les conseils de leur mentor, Jean Marc Guillou, qui avait pris soin de préserver ses intérêts en leur faisant signer des contrats au début de leur initiation au métier de footballeur. C'est à cette époque, sous la direction de Jacques Anouma, membre du comité exécutif à la FIFA, que la Fédération décide de mettre de l'ordre dans la maison. Avec l'aide de sponsors et partenaires, elle réorganise la compétition nationale avec une première division à 16 clubs et une deuxième à deux groupes de 14 clubs chacun. Au bout de trois ans, le niveau atteint un stade appréciable. Entre- temps, des académies ont vu le jour un peu partout. Un terrain vague clôturé sommairement, deux ballons usés, des dossards qui ont rendu l'âme servent d'outils et de matériel de travail. La Fédération planche sur un projet de règlement qui précise qui peut monter une académie et surtout sur quels moyens doit reposer une telle entreprise ? Les clubs adhèrent à la nouvelle stratégie de la Fédération. Celle-ci se tourne alors vers la sélection. Justement, les joueurs formés à Abidjan et ailleurs dans le monde, plus particulièrement en Europe, à l'instar de Didier Drogba, sont prêts à relever tous les défis, entre autres celui de dominer le football africain. Jacques Anouma reprend son bâton de pèlerin et frappe à toutes les portes. L'Etat ivoirien n'hésite pas à fournir tous les moyens (financiers) pour concrétiser ce grand projet. Qui faut-il mettre à la tête de la sélection ? L'option de l'étranger est vite prise et des contacts sont rapidement pris en Europe, principalement en France. Tour à tour, Troussier, Nouzaret, Henri Michel, Gérard Gilli, l'Allemand Stielike et enfin le Bosniaque Vahid Hallilhodzic prennent successivement les commandes, sans grand bonheur jusqu'ici. Les joueurs éparpillés en Europe encouragent ce choix. Il faut dire que la Côte d'Ivoire fait rêver nombre de coaches dans le monde (voir par ailleurs l'article sur la guerre Hallilhodzic - Ancelloti). Les Eléphants se sont facilement qualifiés à la CAN et Coupe du monde 2010. Le groupe actuel est guidé par une seule ambition : être dans le dernier carré en Coupe du monde 2010. C'est de la prétention ? A voir. Le dernier mot revient au secrétaire général de la Fédération, notre confrère Ouattara Hegaud, ancien responsable de la rubrique sport à Fraternité Matin : « Avant de venir en Angola, le staff technique a dressé une liste de 85 joueurs, pas un de moins, qui sont susceptibles de porter le maillot des Eléphants. Presque tous jouent en Europe. Le coach a l'embarras du choix et l'avenir à moyen terme est assuré. » C'est cet adversaire qui est sur la route des Verts dans la course à la qualification aux demi-finales de la CAN 2010. Les entraîneurs étrangers se bousculent Les entraîneurs étrangers, plus particulièrement européens, se bousculent pour prendre la direction des Eléphants. Chaque semaine, la Fédération est destinataire de demandes d'emploi émanant des quatre coins du monde. Même les entraîneurs les plus huppés sont intéressés par le challenge. Ils sentent la bonne affaire. Cela ne va pas sans créer certaines situations difficiles à gérer. Par exemple, avant la coupe d'Afrique 2010, l'entraîneur italien de Chelsea (Angleterre), Carlo Ancelloti, a ouvertement déclaré sa flamme et s'est dit prêt à prendre congé de Chelsea, l'espace de deux mois, pour diriger les Eléphants en Coupe du monde 2010. Ce manque de classe de la part du coach italien n'a pas été apprécié par le sélectionneur en place. Par médias interposés, les deux hommes ont échangé des « politesses ». Carlo Ancelloti n'est pas le seul à s'être mis dans les rangs. Du côté d'Abidjan, on laisse entendre que Phillipe Troussier, qui vient d'être naturalisé ivoirien, s'est renseigné pour le poste qu'il a occupé il y a des années déjà. La Côte d'Ivoire, génération Drogba, fait tourner la tête à plus d'un entraîneur. Tous demeurent convaincus qu'avec son potentiel actuel, cette sélection a de bons coups à jouer. Gagner une Coupe du monde à la tête d'une sélection africaine serait fabuleux … pour un entraîneur européen. C'est ce qui les fait courir. En attendant, le Bosniaque est en place et bénéficie du soutien (très important) des leaders du groupe. Au fond de lui-même, il sait que sa présence à la tête des Eléphants dépend des résultats sur le terrain. Sera-t-il aux commandes en juin prochain ? Oui, s'il décroche le trophée mis en jeu par l'Egypte et que le président Gbagbo lui a demandé de ramener à Abidjan.