Les Algériens ne connaissent pas tous les dessous du scandale qui secoue, depuis plus de dix jours, Sonatrach, la mamelle du pays. Les nouvelles autour de cette grosse affaire de corruption sont distillées au compte-gouttes. La presse nationale rapporte, chaque jour, de nouveaux éléments qui confirment que le scandale est immense. Ainsi, le quotidien le Soir d'Algérie nous apprend, dans son édition du jeudi 21 janvier 2010, beaucoup de détails qui, jusque-là, étaient ignorés de tous. Dans un article, sous le titre « Scandale de Sonatrach : voici pourquoi Chakib Khelil savait », le Soir d'Algérie affirme d'emblée que « le président Bouteflika était au courant du déclenchement de l'enquête et qu'il l'aurait autorisée ». Le ministre de l'Energie et des Mines, Chakib Khelil, qui avait affirmé récemment qu'il ignorait les détails de l'affaire, selon l'auteur de l'article, « se tenait quotidiennement informé de l'évolution du dossier, depuis le début des auditions des cadres dirigeants de Sonatrach (…) en septembre 2009 ». Le journal croit savoir que le ministre « se serait plaint auprès du chef de l'Etat d'un harcèlement dont il ferait l'objet, à travers l'audition des dirigeants de Sonatrach, par les services de sécurité ». « Ce à quoi Bouteflika aurait répondu qu'il était au courant de l'ouverture de l'enquête et qu'il fallait laisser les choses suivre leur cours normal », lit-on dans cet article. Citant des milieux proches du dossier, le Soir d'Algérie relève que « le nom du premier responsable du secteur revient dans la quasi-totalité des dossiers dans lesquels sont mis en cause des cadres dirigeants de Sonatrach ». Plusieurs marchés « juteux » auraient été attribués de gré à gré avec l'aval de Chakib Khelil. Le premier est celui des bouées flottantes du port de Béjaïa. Un marché confié à deux bureaux d'études, l'un appartenant au fils du PDG de Sonatrach et l'autre au fils d'un ancien PDG du CPA, en sa qualité de représentant d'une entreprise allemande spécialisée dans les équipements de sécurité. « Khelil serait au courant de tous les détails » « Ce qui constitue une violation du code des marchés publics qui stipule que le responsable d'une entité publique ne peut contracter un marché avec un proche direct », note-t-on dans le même article, en précisant de surcroît que « le marché a été facturé à des prix dépassant de loin ceux pratiqués sur le marché international ». L'exception devient une règle. L'octroi de marchés selon la formule de gré à gré s'étend ainsi à d'autres chantiers relatifs à la protection des pipelines et autres installations isolées de Sonatrach. « Les détachements de surveillance et de protection (DSP) constitués essentiellement de patriotes ont été dissous et remplacés par des sociétés de sécurité, dont les propriétaires sont loin d'être d'illustres inconnus, sur la base de la même formule de gré à gré et du sacro-saint impératif des plus brefs délais », rapporte aussi le Soir d'Algérie. Le même article cite encore le marché du gazoduc GK3 qui aurait été accordé « de gré à gré à la compagnie italienne Saipem ». Les enquêtes des services de sécurité s'étendent également, selon le quotidien El Khabar, à l'autorité de régulation des hydrocarbures. Dans un article publié mercredi dernier, sous le titre « Après Sonatrach, les enquêtes s'étendent à l'autorité de régulation des hydrocarbures », El Khabar précise que les services de sécurité ont ouvert une enquête « suite à des lettres internes au ministère de l'Energie et des Mines évoquant des pratiques illégales dans les filiales gaz et dérivés ainsi que dans les huiles et dérivés ». L'article évoque le non-respect de la loi du 22 avril 2002 obligeant les entreprises, publiques et privées, spécialisées dans le remplissage des bonbonnes de gaz, d'équiper ces dernières par des vannes de sécurité. Une obligation non respectée. Visiblement, c'est tout le secteur de l'énergie et des mines qui est touché par le tourbillon.