Une quinzaine d'avocats ont plaidé hier devant la chambre d'accusation près la cour d'Alger la liberté provisoire pour les sept détenus poursuivis dans le cadre de l'affaire Sonatrach. Le parquet a demandé la confirmation du mandat de dépôt, alors que le délibéré ne sera connu qu'aujourd'hui. Le ministère de l'Energie est revenu sur sa décision d'assurer la défense des cadres impliqués. Dimanche prochain, la chambre d'accusation examinera les demandes de mise en liberté des prévenus sous contrôle judiciaire, dont le PDG de Sonatrach, contre lesquels le parquet a réclamé la mise sous mandat de dépôt. Jusqu'à une heure tardive, les avocats des personnes détenues dans le cadre de l'affaire Sonatrach n'avaient toujours pas obtenu le délibéré de la chambre d'accusation près la cour d'Alger. Ils étaient une quinzaine à avoir plaidé la mise en liberté provisoire pour les sept détenus, alors que le ministère public a demandé le maintien du mandat de dépôt. Selon certains avocats, les plaidoiries ont été axées surtout sur « les garanties qu'offrent les prévenus du fait que tous ont des adresses et une situation stable ». La défense a souligné « le principe de la primauté » de la loi, notamment l'article 23 du code de procédure pénale qui, selon elle, permet au juge de privilégier la mise sous contrôle judiciaire au lieu de recourir systématiquement au placement sous mandat de dépôt « qui est une violation de la liberté individuelle ». Les avocats représentaient les sept prévenus actuellement en détention, à savoir Hachemi Meghaoui (ancien PDG du CPA), son fils, deux vice-présidents de Sonatrach, Benamar Zenasni (chargé de l'activité transport par canalisation -TRC), Belkacem Boumedienne (chargé de l'activité Amont exploration et production), les deux enfants de Mohamed Meziane (PDG de Sonatrach) et un de leurs associés, un entrepreneur privé, Réda Smaïl. Le parquet a, quant à lui, demandé la confirmation du mandat de dépôt pour les prévenus, du fait, a-t-il expliqué, de « la gravité de l'affaire mais aussi de l'implication des mis en cause ». L'examen des demandes a duré plusieurs heures et le délibéré n'a pu être rendu tard que dans la journée. A signaler que la même chambre va examiner, dimanche prochain, les demandes de liberté provisoire introduites par la défense pour les prévenus mis sous contrôle judiciaire et contre lesquels le parquet a réclamé la mise sous mandat de dépôt. Il s'agit de sept cadres dirigeants de la compagnie pétrolière, dont le PDG Mohamed Meziane et Chawki Rahal, vice-président chargé de l'activité commercialisation. Pour la majorité des avocats avec lesquels nous nous sommes entretenus, il y a peu d'espoir pour que la chambre d'accusation revoie les décisions du juge d'instruction. « Nous espérons cependant qu'elle prendra en compte le volet humanitaire avant toute considération judiciaire », a déclaré un des avocats. Il est toutefois important de signaler que le ministère de l'Energie est revenu sur sa décision de prendre en charge la défense des cadres dirigeants poursuivis dans le cadre de ce dossier. Après avoir constitué deux grands avocats du barreau d'Alger, il a résilié la convention en début de semaine écoulée. Pour de nombreux juristes, « le ministre a été maladroit en annonçant publiquement la constitution d'avocats pour les mis en cause, alors que Sonatrach est obligée de se constituer partie civile dans le dossier. Il est vrai qu'il existe une convention qui oblige la compagnie à défendre ses cadres, mais lorsque l'affaire ne concerne pas une dilapidation de ses deniers ». En fait, cette convention n'est brandie que pour certains cadres seulement. Il y a quelques mois, une secrétaire de direction qui cumule des années de labeur au sein du ministère a introduit une demande d'aide auprès de sa hiérarchie pour l'aider à poursuivre une clinique privée où son unique fille, elle-même secrétaire de direction depuis des années à Sonatrach, est décédée à l'accouchement des suites d'une erreur médicale. La secrétaire a été déboutée alors qu'elle vivait un vrai drame : d'un côté la perte de sa fille unique qui a laissé deux fillettes (des jumelles) que le père lui a arrachées dès la naissance et, de l'autre, l'impossibilité de poursuivre les auteurs de la bavure médicale. L'on se rappelle qu'au procès de Khalifa à Blida, l'avocat d'un dirigeant d'une filiale de Sonatrach, qui a fait perdre à la compagnie des millions de dollars, était constitué par le ministère de l'Energie. Il avait à sa disposition une chambre à l'hôtel El Djazaïr, avec prise en charge totale durant près de deux mois, sans compter sa rémunération. Dans la convention dont a parlé le ministre Chakib Khellil, y aurait-il quelque part deux poids, deux mesures ? En tout état de cause, le scandale qui vient d'éclabousser la compagnie pétrolière ne risque certainement pas s'arrêter uniquement à ceux qui sont actuellement poursuivis et qui bénéficient pour l'instant du principe de la présomption d'innocence. Des informations extrêmement graves circulent sur d'autres gros dossiers liés à des malversations et qui pourraient éclabousser d'autres hauts cadres non encore cités.