«Cela fait longtemps que je voulais venir dans ce pays cher à mon cœur. Je suis très contente d'être enfin en Algérie et de vous présenter mon nouvel album. J'espère faire d'autres concerts à Alger et à Oran aussi», a déclaré la chanteuse, fortement applaudie. Constantine est l'une des premières destinations du «Zarabitour», la tournée de promotion de l'album Zarabi (tapis). A travers ce titre, Oum — Oum El Ghaïth Benesahraoui de son vrai nom — a voulu rendre hommage aux tisseuses de tapis du village M'hamid El Ghizlane, dans la province de Zagora, au sud-est du Maroc, à la frontière avec l'Algérie. C'est dans ce village qu'Oum et son orchestre ont enregistré le nouvel album. «Zarabi n'a pas été enregistré en studio mais en plein air. Les micros ont été plantés dans le sable. Nous avons chanté sans casque et sans retour. L'idée était d'accepter les imperfections et ce que le climat et l'espace allaient nous imposer. Le désert impose l'humilité. Nous voulions faire quelque chose de terre à terre, de très humain, d'éviter trop d'arrangements», a expliqué Oum. Accompagnée notamment du virtuose du oûd marocain Yassir Rami et du percussionniste cubain Inor Sotolongo, ainsi que d'un contrebassite et d'un trompettiste, Oum a interprété Nia, Lila, Hna, Jini, Mansit, Wali, N'Nay, Saadi… bref, tous les titres ou presque de son dernier album. Elle a également repris des extraits de son précédent album, Soul of Marocco (l'âme du Maroc). La voix d'Oum est sensuelle, l'interprétation raffinée et la musique riche. Il y a du jazz, du soul, du targui, du hassani, du gnaoui, de l'african beat. Il y a même de la musique spirituelle soufie ou de la salsa cubaine. Oum refuse de se fermer dans un style, d'être classée dans une case. «Ma musique est maghrébine contemporaine. C'est-à-dire sans limite de genre. La musique devrait être un espace de liberté. Je n'ai pas envie de rester dans un seul genre, faire que du jazz ou du chaâbi uniquement. Nos cultures ont été traversées de courants différents. Je pense qu'il faut mettre tout cela dans la musique», a déclaré Oum après le concert. Cette Casablancaise de Marrakech est souvent accompagnée de musiciens de différentes nationalités : d'Autriche, de Cuba, d'Italie, du Maroc… «C'est également une manière de montrer notre ouverture, ici au Maghreb, à d'autres cultures qui nous ont touchés dans notre histoire. Nous sommes ouverts à l'échange. Ce n'est pas parce qu'on est Algérien ou Marocain qu'on ne doit forcément jouer que du raï !» a-t-elle appuyé. Dans Zarabi, Oum a réduit le nombre d'instruments par rapport à son précédent album. Elle a notamment supprimé le saxophone et la guitare. «Nous avons voulu faire une musique plus acoustique, naturelle, épurée, moins dans les effets et la performance musicale et plus dans le chant. Une musique accessible au public», a-t-elle affirmé. Oum, qui écrit elle-même ses textes en arabe dialectal, s'intéresse beaucoup à la culture hassanie et aux musiques sahéliennes (elle a notamment joué avec le groupe malien Tinariwen). Elle a été ravie par l'adhésion totale du public du dimajazz à sa musique, parfois rythmée et souvent colorée. «Cela fait du bien. On reconnaît les siens. On se sent à la maison», a-t-elle lancé sur scène. Oum revendique totalement son africanité tant dans les tenues qu'elle porte que dans la musique. A Constantine, elle est entrée sur scène vêtue d'une robe verte et d'un turban jaune. «L'Afrique est la mère du monde. L'Afrique fait bouger rythmiquement et musicalement. Dans tous les continents, il y a un peu d'Afrique. Au Maghreb, nous avons quelque chose de très solide en nous, en notre culture. Cette multiplicité culturelle et ethnique doit être considérée comme une richesse», a-t-elle plaidé. Oum souhaite animer des concerts partout en Afrique. Après le concert, elle a signé son album Zarabi dans le hall de la salle Ahmed Bey au milieu d'une grande foule. Oum a déjà produit plusieurs opus comme Lik'oum, son premier titre (2009) et Sweerty (2012).