Après une série d'enlèvements sans précédent vendredi dans la bande de Ghaza, la scène politique est en train de vivre de profonds remous. L'enlèvement du chef de la police palestinienne, le général Ghazi El Jabali, par des membres des Brigades des martyrs de Jénine, appartenant aux comités de résistance populaire, proches du Fatah, qui l'accusent de corruption, ainsi que du responsable de la coordination militaire avec les Israéliens dans le sud de la bande de Ghaza, le colonel Khaled Abou Eloula, et de quatre ressortissants français par des membres de services de sécurité récemment licenciés, qui exigeaient d'être réintégrés dans leur poste, a poussé le président palestinien à reformer les services de sécurité. Ils étaient au nombre de huit, dorénavant ils ne seront que trois : le service de sécurité générale, la police et le renseignement. Le président palestinien a, par ailleurs, décrété l'état d'urgence dans la bande de Ghaza. Des policiers armés se sont déployés autour des bâtiments publics. Il a aussi décidé le limogeage de Ghazi El Jabali et a nommé à la tête du service de sécurité générale son cousin le général Moussa Arafat qui dirigeait le service de renseignement militaire. Toutes ces décisions ont été prises avant une réunion d'urgence du gouvernement à Ramallah, à l'issue de laquelle le Premier ministre Ahmad Qorei a présenté sa démission. Ce dernier a justifié son geste par la confusion qui caractérise la situation sécuritaire qui a atteint un point de « crise ». Sa démission a été rejetée par le président palestinien, mais un proche de M. Qorei, Jamal Elchobaki, le ministre des Collectivités locales, a affirmé que celui-ci veut quitter ses fonctions. « Je pense qu'il s'en tiendra à sa décision et qu'il démissionnera », a-t-il déclaré. Une autre réunion du cabinet est prévue aujourd'hui. Les rebondissements ne se sont pas arrêtés là. Samedi en fin de journée, des milliers de Palestiniens sont sortis dans les rues, à l'appel des Brigades des martyrs d'El Aqsa, la branche armée du Fatah, pour protester contre la nomination du général Moussa Arafat à la tête du service de sécurité générale. Dans un communiqué, ces brigades ont qualifié celui-ci de « symbole de la corruption » qui « ouvre la porte à des conséquences dangereuses qui vont mener à un conflit interne ». Samir Al Machharaoui, dirigeant local du Fatah, a déclaré : « Nous avons envoyé un message au président Yasser Arafat : ne remplacez pas la corruption par une corruption encore plus vive. » Les réformes annoncées par le président palestinien, qui étaient souhaitées par la communauté internationale, en particulier le Quartette (Etats-Unis, Union européenne, Russie, ONU), parrain de la « feuille de route », le dernier plan de paix international pour la région, resté jusqu'à maintenant lettre morte, ne semblent pas suffisantes pour atténuer la très vive tension qui règne dans la bande de Ghaza. Des mesures concrètes doivent être prises au plus haut niveau afin de stopper la dégradation de la situation sécuritaire. La crise de l'Autorité palestinienne ne semble qu'à ses débuts. Des événements dramatiques peuvent survenir dans les jours qui viennent. L'attaque et l'incendie, hier par un groupe d'hommes armés, d'un poste du renseignement militaire à Khan Younès, au sud de la bande de Ghaza, font craindre le pire dans les jours à venir. Le président Yasser Arafat a rencontré, pendant quatre heures hier à Ramallah, son Premier ministre Ahmad Qorei pour tenter de résoudre la crise provoquée par la démission présentée la veille par celui-ci et que M. Arafat a refusée. M. Qorei n'a fait aucun commentaire à la presse à l'issue de ces entretiens qui ont eu lieu au QG du président de l'Autorité palestinienne. Dans la journée, M. Qorei devait prendre part à une réunion du comité exécutif de l'OLP, que préside M. Arafat.