Lors de la conférence de presse qui a sanctionné mercredi les travaux de l'Alliance présidentielle, le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, s'est exprimé brièvement sur la crise algéro-égyptienne née à la suite de l'élimination au Mondial 2010 de l'équipe de football égyptienne par les Verts et de la campagne anti-algérienne d'une rare virulence qui avait suivi. Dans sa réponse, le Premier ministre alterne fermeté et volonté d'apaisement. Sur l'obsession des responsables égyptiens exigeant de l'Algérie, pour la normalisation des relations entre les deux pays, des excuses officielles pour les « événements (!!!) » de Khartoum, M. Ouyahia aura été intransigeant pour rejeter toutes excuses de la part de l'Algérie pour des événements imaginaires inventés par la presse égyptienne pour faire passer auprès de l'opinion égyptienne la pilule amère de l'élimination au Mondial. Une réponse qui a certainement été bien accueillie par la vox populi qui verrait d'un mauvais œil l'Algérie se prosterner et demander pardon pour une faute qu'elle n'a pas commise, surtout après la campagne de haine et d'invectives égyptiennes contre le pays et son histoire. Les Egyptiens sont donc fixés sur la position de l'Algérie sur ce point. Il reste à savoir quelle va être l'attitude du Caire après cette mise au point d'Alger. Cependant, si M. Ouyahia s'est montré très à l'aise sur la question des excuses exigées par l'Egypte, il a affiché en revanche un certain embarras en abordant le volet diplomatique de la crise. L'ambassadeur d'Egypte à Alger, rappelé par son gouvernement pour consultation au lendemain du match du Caire entre les équipes nationales des deux pays, n'a toujours pas encore rejoint son poste et ne semble pas pressé de le faire de sitôt si l'on analyse bien les signaux politiques par médias interposés en provenance du Caire. Face à ce chantage inadmissible qui n'a déjà que trop duré, l'Algérie privilégie une autre démarche qui consiste à laisser le temps faire les choses. L'Algérie a ainsi refusé de suivre l'Egypte dans son escalade diplomatique et verbale en ne convoquant pas – du moins officiellement – notre ambassadeur au Caire, M. Hadjar, qui s'était seulement offert, selon une déclaration à la presse de notre représentant diplomatique au Caire, quelques jours de vacances pour expliquer sa présence à Alger au lendemain des événements. Contrairement à son homologue égyptien, il avait rejoint son poste après seulement quelques jours à Alger. Pour l'Algérie, il n'y a donc ni crise politique ni crise diplomatique. Les Egyptiens se trouvent dans une autre logique de confrontation, contrastant avec les appels de l'Algérie à la sagesse et à transcender les contingences du moment. « Si l'ambassadeur d'Egypte ne rejoint pas son poste à Alger, le poste restera inoccupé » : voilà la réponse officielle de l'Algérie face au chantage égyptien ! Pour de nombreux observateurs politiques dans cette bataille diplomatique ouverte entre les deux pays, c'est l'Egypte qui tire les marrons du feu. L'Egypte qui se trouve ainsi en phase avec son opinion publique, laquelle chauffée à blanc au plus fort de la crise, exigeait même des réponses plus radicales encore. L'absence de fermeté de la diplomatie algérienne, ne serait-ce que pour faire appliquer à la partie égyptienne le sacro-saint principe de la réciprocité qui régit les relations internationales en rappelant notre ambassadeur en attendant de voir plus clair quelles sont les intentions des Egyptiens, est vécue par l'opinion publique algérienne comme un acte de faiblesse et de capitulation qui s'ajoute à la frilosité avec laquelle l'Etat a réagi face à la campagne de dénigrement tous azimuts de l'Algérie. Le défunt président Houari Boumediène doit certainement se retourner dans sa tombe face aux compromis, pour ne pas dire compromissions de l'Algérie.