Lundi, les forces proches du gouvernement d'union nationale (GNA) «ont pris le contrôle du quartier Al Dollar dans le centre de Syrte après leur assaut lancé dimanche», selon le communiqué. Lundi, les avions de combat américains ont mené des raids contre des positions de l'EI à Syrte, à la demande du GNA dont les forces peinent à reconquérir le bastion djihadiste situé à 450 km à l'est de la capitale Tripoli. Profitant du chaos en Libye depuis la chute du régime dEl Gueddafi en 2011, l'EI s'y est implanté et s'est emparé de Syrte en juin 2015. Deux gouvernements se disputent le pouvoir dans ce pays livré aux milices : le GNA installé à Tripoli et reconnu par la communauté internationale et un cabinet parallèle basé dans l'Est. La percée des progouvernementaux est intervenue quelques heures après que le chef du GNA, Fayez El Sarraj, et le Pentagone aient annoncé les frappes américaines à Syrte. A la faveur d'une offensive lancée le 12 mai pour reprendre Syrte, les forces du GNA sont entrées le 9 juin dans la ville et assiègent depuis les djihadistes. Elles ont toutefois été ralenties par les contre-attaques de l'EI. Les forces du GNA sont composées de milices issues des villes de l'Ouest, principalement celles de Misrata, qui se sont illustrées durant la révolte de 2011. Les Etats-Unis ont indiqué que les raids contre l'EI à Syrte se poursuivraient, mais El Sarraj a relevé qu'ils seraient «limités dans le temps» et «ne dépasseraient pas Syrte et sa banlieue». Tout en reconnaissant avoir demandé l'aide de Washington, il a en revanche déclaré qu'«il n'y aura aucune présence étrangère sur le sol libyen». La Maison-Blanche a confirmé que cette aide «se limitera aux frappes et au partage de renseignements». Les Etats-Unis et leurs alliés européens veulent éviter tout engagement formel en Libye tant que le GNA n'en fait pas la demande, l'opinion publique libyenne restant opposée à une nouvelle intervention étrangère. Le chef du gouvernement a toutefois reconnu, fin juin, que ses forces recevaient de l'aide étrangère en «expertise et logistique». Elles pourraient notamment être assistées pour la localisation et le ciblage de combattants de l'EI. Les Etats-Unis ont bombardé pour la première fois le groupe EI en Libye en novembre 2015. En février dernier, des avions américains ont attaqué un camp d'entraînement de ce groupe à Sabrata, à 70 km à l'ouest de Tripoli. Les 18 et 23 août 2014, des avions de chasse des Emirats arabes unis ont bombardé secrètement le sud de Tripoli avec le soutien logistique de l'Egypte. Le 15 février 2015, Le Caire a effectué des raids sur des positions de l'EI à Derna, à l'est de Tripoli, en représailles à la décapitation de 21 coptes égyptiens revendiquée par l'organisation djihadiste. Installé fin mars dernier, le gouvernement d'union dirigé par Fayez El Sarraj et soutenu par l'ONU tente d'asseoir son autorité, comme il doit faire face au groupe EI. Il a pu rallier les forces et milices présentes dans l'Ouest et compte restructurer les forces de sécurité pour asseoir son autorité. En mai dernier, il a annoncé plusieurs mesures sur le plan sécuritaire. Ainsi, il a mis sur pied un commandement des opérations militaires contre l'EI interdisant à tous les groupes armés du pays d'agir sans avoir obtenu son autorisation. Il a aussi annoncé «la formation d'une cellule spéciale des opérations militaires» contre l'organisation djihadiste. Cette cellule coordonnera les opérations de lutte contre l'EI dans une zone s'étendant de Misrata à Syrte, en demandant à tous les groupes armés de s'abstenir d'agir sans son feu vert, à l'exception d'opérations de légitime défense. Suit la création d'une nouvelle force armée chargée de protéger les sièges gouvernementaux, les postes-frontières et les hautes personnalités. Basée à Tripoli, cette «garde présidentielle» sera exclusivement composée de soldats et de policiers «sélectionnés dans les différentes régions» libyennes, a annoncé le GNA. Elle devra sécuriser les «sièges présidentiels (…) et les bâtiments publics», en plus de la protection rapprochée des membres du gouvernement et des délégations étrangères. Elle aura aussi pour mission de protéger les «sites sensibles, y compris les postes-frontières maritimes, aériens et terrestres, les sources et le réseau de fourniture d'eau et les centrales électriques». Les infrastructures, notamment pétrolières, ont été attaquées à plusieurs reprises par l'EI. Imbroglio politique Néanmoins, dans l'est du pays, une autorité parallèle est encore en place avec des forces armées qui lui sont loyales, notamment sous le commandement du général Haftar. Le GNA craint que ce dernier ou d'autres milices ne lancent une offensive unilatérale contre l'EI à Syrte, ce qui pourrait entraîner le pays dans une nouvelle guerre civile. Sachant qu'il n'a, jusque-là, aucune autorité sur les forces commandées par le général Haftar. Ce dernier s'est illustré en lançant sa première opération contre les islamistes en mai 2014. Les autorités l'ont accusé alors de «tentative de coup d'Etat». En octobre de la même année, bénéficiant du soutien du Parlement et du gouvernement reconnus par la communauté internationale, il lance une contre-offensive dans le but de reconquérir Benghazi. Le général Haftar est chef proclamé de l'armée nationale libyenne (ANL). Il s'est engagé dans la lutte contre les islamistes à Benghazi, principale ville de l'est du pays et s'oppose toujours à l'autorité du GNA, soutenu par les Occidentaux et est resté loyal aux autorités parallèles de l'Est.