"Cette acquisition change la donne pour PSA, car nous devenons une entreprise avec un chiffre d'affaires de l'automobile de 55 milliards d'euros et une solide deuxième place sur le marché européen" derrière Volkswagen, s'est réjoui le patron de l'entreprise française Carlos Tavares, lors d'une conférence de presse commune avec GM à Paris. Mary Barra, PDG du géant américain, a de son côté reconnu que la cession constituait "une décision difficile". "Mais nous pensons tous que c'est la bonne pour nos employés, nos clients et nos actionnaires", a-t-elle affirmé. Le groupe français met ainsi la main sur l'ensemble des activités automobiles de GM en Europe, qui comprennent six usines de montage et cinq usines de production de pièces, un centre d'ingénierie (à Rüsselsheim en Allemagne) et environ 40.000 salariés. GM conserve seulement le centre d'ingénierie de Turin, en Italie. PSA (marques Peugeot, Citroën et DS) va également reprendre conjointement avec la banque française BNP Paribas la filiale financière de GM Europe pour 900 millions d'euros, ce qui porte la valeur totale de la transaction pour le groupe automobile à 1,8 milliard d'euros. Sur le sujet délicat des obligations de retraites pour les salariés d'Opel/Vauxhall, qui se chiffrent en milliards d'euros, PSA et GM ont coupé la poire en deux. GM va en transférer une partie à PSA, et lui versera une soulte de 3 milliards d'euros. Opel/Vauxhall continuera par ailleurs d'utiliser des technologies de GM, pendant une période transitoire. Enfin, General Motors sera intéressé à la réussite de l'opération via des bons de souscription d'action de PSA d'une maturité de 9 ans, pour un montant de 0,65 milliard d'euros. PSA s'attend à finaliser d'ici à la fin de l'année cette acquisition, menée au pas de charge depuis la révélation les négociations entre les deux groupes le 14 février, à la surprise générale.
– Synergies importantes – Après avoir frôlé la mort début 2014 et connu depuis une renaissance, le groupe français compte mettre son expérience à la disposition d'Opel et Vauxhall. La division européenne de GM, en déficit chronique (15 milliards de pertes en 16 ans), a encore brûlé 257 millions de dollars l'année dernière. PSA vise un retour à la rentabilité dans les trois prochaines années, tablant sur une marge opérationnelle courante de 2% d'ici à 2020 et 6% d'ici à 2026 pour Opel et Vauxhall. Grâce à des économies d'échelle dans les domaines des achats, de la production et de la recherche et développement, PSA vise des synergies de 1,7 milliard d'euros par an d'ici à 2026, qui devront se matérialiser en grande partie d'ici à 2020. Une grande inconnue demeure: les conséquences sur l'emploi. Les représentants du personnel des deux marques ont réagi lundi à l'annonce du rachat en demandant à être impliqués dans les discussions à venir, après avoir été mis au courant sur le tard des négociations de rachat. "Les accords collectifs existants (en Allemagne, NDLR) apportent de la sécurité pour les sites de production et l'emploi dans cette importante période de transition", mais "les employés d'Opel (…) attendent une sécurité à long terme", a estimé Jörg Köhlinger, responsable du puissant syndicat allemand IG Metall. M. Tavares a affirmé qu'il ne serait pas nécessaire de fermer des usines d'Opel/Vauxhall tant qu'elles parviendraient à respecter des objectifs de productivité, estimant que la solution consistant à fermer des sites était "simpliste". Il a réitéré l'objectif de faire de son entreprise un "champion européen de l'automobile" avec cette acquisition, qui placera son entreprise à la deuxième place du marché européen des véhicules avec 17% de part de marché derrière Volkswagen (24%). Il s'agit d'un pas vers la "taille critique", notion essentielle dans une industrie automobile gourmande en capitaux, sur fond de resserrement des normes et d'explosion des budgets de recherche et développement. Opel et Vauxhall ont immatriculé 1,2 million de véhicules en 2016, qui vont s'additionner aux 3,15 de PSA. Ces 4,3 millions d'unités sont loin des géants du secteur (Volkswagen, Toyota, GM et Renault-Nissan) qui oscillent autour de 10 millions. Le retournement est en tout cas spectaculaire pour PSA, qui n'avait été sauvé de la faillite il y a trois ans que par l'entrée à son capital de l'Etat français et du chinois Dongfeng, au côté de la famille Peugeot.