Constat sans complaisance ! Hocine Aït Ahmed, président du FFS, a dressé un tableau peu reluisant sur la situation sociopolitique du pays. S'adressant dans un message vidéo aux membres du conseil national, réunis ce week-end à Alger en session ordinaire, le père fondateur du parti n'a pas manqué de discernement, dénonçant à la fois « la précarité morale et sociale » des Algériens et la poursuite des pratiques liberticides d'un pouvoir, foncièrement opposé au pluralisme et aux droits de l'homme, qui n'a d'autres alternatives que la répression. « La répression et la corruption sont le seul ciment de l'Etat », atteste-t-il. Violence sociale, rétrécissement du champ d'expression libre, asservissement politique, corruption, détournement de la volonté populaire, crise de légitimité… Les institutions, la sphère médiatique et l'essentiel des organisations politiques, associatives et syndicales sont dévoyés de leurs missions et responsabilités, réduites à n'être qu'un outil de contrôle et de corruption politique et sociale », relève-t-il. La vie publique est en voie d'extinction. « Ne demeure plus, dit-il, qu'une gangue institutionnelle. » Cette situation, Aït Ahmed la place dans ce contexte de crise mondiale et de redéfinition des relations internationales. Des relations qui sont basées sur l'intérêt matériel, loin des idéaux et des valeurs démocratiques proclamés par la communauté des nations. Pour lui, il ne faut plus compter sur l'aide des pays démocratiques qu'il accuse sinon de complicité du moins de passivité car, estime-t-il : « Les puissances en mesure d'influer où d'influencer les régimes autoritaires observent une attitude floue et donnent une impression de valse hésitation. » « Au mépris des valeurs qui fondent la communauté des nations, elles (puissances) préfèrent délibérément continuer de soutenir et de protéger ces régimes », ajoute-t-il. L'appui des ONG reste, à ses yeux, insuffisant. Il n'est pas en mesure de renverser cette tendance lourde, « en l'absence d'une véritable société civile internationale ». Ce silence international sur la démocratie et les droits de l'homme dont souffre l'Algérie aujourd'hui est aussi la conséquence, selon lui, des enjeux et des équilibres géopolitiques régionaux voire mondiaux. Des enjeux qui sont à l'origine de cette « bienveillance voire complaisance envers un régime qui ne peut pas moderniser, stabiliser et encore moins démocratiser le pays ». M. Aït Ahmed évoque le destin lié des pays maghrébins et prévient quant à la contagion : « Rien de ce qui se passe dans l'un des pays du Maghreb n'est sans conséquence sur les autres. » La coupe est pleine. Les Algériens en ont marre ! « Autour de nous, la société se déstructure et se disloque. Les femmes et les hommes de ce pays ne savent plus, peut-être ne veulent plus et en tout cas ne peuvent plus, faire de la politique. » Que faire ? Pour Aït Ahmed, il est temps de changer de cap, de chercher d'autres instruments de navigation politique, car les méthodes actuelles, du moins celles employées par son parti, ont montré leurs limites. Il faut donc faire preuve d'ingéniosité en se posant un certain nombre de questions. « Au-delà des utopies mobilisatrices et de la radicalité de nos positions, avons-nous réussi à faire barrage à la restauration de la dictature ? Nos appels aux dialogues, nos mises en garde, nos initiatives, nos contrats et nos campagnes politiques ont-ils eu les résultats escomptés ? », s'interroge-t-il. Pour lui, le FFS ne peut pas « se suffire de déconstruire le discours du régime, dévoiler ses manipulations, ses complots et ses mystifications ». Il se demande ainsi si le parti ne doit pas « redéfinir » son planning stratégique, car, estime-t-il, le projet du FFS « n'est pas de prédire l'avenir mais de donner pour chacune de ses activités des objectifs et de définir la stratégie pour les atteindre ». Il appelle ainsi aux cadres dirigeants de revisiter les perspectives et les modes d'organisation du parti. Il suggère dans ce sens la tenue d'une conférence nationale d'évaluation démocratique et de transparence. Une conférence qui permettra, d'après lui, de trouver les moyens de « travailler plus intelligemment, plus lucidement et plus efficacement ». Pour lui, « la véritable élite politique est celle qui résiste au souci de soi ».