Propos recueillis par Lyes Mechti Les autorités algériennes s'apprêtent à revoir certaines dispositions de la loi sur les hydrocarbures, afin d'améliorer l'attractivité de l'Algérie dans le secteur pétro-gazier. Qu'est-ce qui a fait que cette loi ait empêché une plus grande affluence des compagnies étrangères ? Les derniers amendements à la loi sur les hydrocarbures de 2005 remontent à février 2013. En 2013, le prix du brent de la mer du Nord était supérieur à 100 dollars le baril et il en était de même pour le prix du panier OPEP, qui est la moyenne des prix des pétroles bruts produits par les différents membres de l'organisation. Les cours du pétrole ont commencé à baisser à l'été 2014 et se sont effondrés en 2015 pour tomber à 44 dollars/baril seulement en 2016 (moyenne du brent sur l'ensemble de cette année-là). Cela a évidemment très largement changé la donne pétrolière mondiale. Dans un contexte très difficile, la concurrence s'est accrue entre pays producteurs pour attirer les investisseurs étrangers. Un autre élément-clé des bouleversements de la scène des hydrocarbures a été la montée en puissance des hydrocarbures de schiste aux Etats-Unis. Cette évolution avait commencé dans les années 2000, mais elle s'est poursuivie en 2013 et au cours des années suivantes, à l'exception d'une baisse de la production pétrolière de ce pays en 2016. Les Etats-Unis sont devenus le premier producteur mondial de liquides et de gaz naturel à la fois et le potentiel de hausse de leur production d'hydrocarbures n'est pas épuisé. Rappelons enfin que l'appel d'offres lancé après l'adoption de la loi de février 2013 avait débouché, fin septembre 2014, sur l'octroi de quatre permis seulement sur les 31 offerts. L'attractivité de l'Algérie n'était donc clairement pas suffisante, même si cette loi a constitué un progrès significatif à l'époque. Selon vous, quels sont les aspects qui doivent être revus et modifiés dans ce texte de loi ? Il faut travailler sur au moins cinq aspects et tous ne portent pas sur la loi elle-même. Il y a d'abord un travail d'explication et de promotion à poursuivre et à intensifier, car les apports, bien réels, de la loi de février 2013 n'ont pas toujours été bien compris. Il faut en second lieu améliorer les conditions fiscales dans une période de prix du pétrole plus bas qu'avant l'été 2014. Le troisième point important, selon moi, concerne l'introduction de plus de flexibilité dans la gestion des contrats. L'inertie bureaucratique doit être combattue. Enfin, il est nécessaire d'adapter les systèmes de prise de décision pour accélérer celle-ci. Aujourd'hui encore plus qu'hier, le temps, c'est de l'argent. Il faut noter que le ministre de l'Energie, Mustapha Guitouni, Sonatrach et Alnaft, l'Agence nationale pour la valorisation des ressources en hydrocarbures, sont très conscients de ces priorités et ont la volonté de renforcer la politique de partenariat avec les compagnies pétrolières et gazières étrangères. Un autre point positif est que des firmes étrangères ont été consultées pour préparer ces modifications. Il reste à présent à transformer l'essai. On sait déjà que cette révision ne touchera pas la règle des 51/49 régissant les investissements étrangers en Algérie. Est-il possible d'intéresser les investisseurs étrangers sans modifier la loi ? Les investisseurs étrangers ne s'attendent pas à un changement sur ce sujet précis. Ils n'y seraient pas opposés bien sûr, mais ils peuvent vivre avec. Dans le secteur pétrolier et gazier, des évolutions significatives portant sur les cinq domaines que je viens d'évoquer permettraient d'améliorer de façon importante l'attractivité de l'Algérie, un pays qui conserve un potentiel fort intéressant dans l'exploration et le développement de pétrole et de gaz conventionnels et non conventionnels ainsi que dans l'aval pétrolier (raffinage et pétrochimie). Mais il ne faut pas hésiter à frapper fort. Dans une période marquée par des bouleversements sur les marchés énergétiques mondiaux, des réformes profondes sont requises pour relancer les partenariats entre Sonatrach et les sociétés étrangères. Les petits pas ne suffisent plus.