Les massacres de la décennie noire, les inondations, les séismes… Depuis quinze ans, le SAMU se démène pour sauver des vies. Sans trop de moyens. Rencontre avec ces héros du quotidien. Quinze ans à se débrouiller avec les moyens du bord pour sauver les gens. Quinze ans qu'ils répondent tous – pour la plupart – présent aux appels d'urgence. 1995, le premier Service d'aide médical d'urgence (SAMU) d'Algérie (il en existe sept aujourd'hui dans la wilaya d'Alger) voit officiellement le jour par décret ministériel. Sur le terrain, les urgentistes ont déjà commencé à travailler depuis un an pour répondre à l'urgence née de la situation sécuritaire. D'abord installée à Sidi Yahia avec quatre ambulances, l'équipe intervient sur les attentats terroristes. « Un vrai travail de pompier ! Nous allions constater les dégâts et essayer de sauver le peu de rescapés qu'il pouvait y avoir, nous étions au premier rang de ces horribles spectacles », raconte le docteur Choukri Fellouh, chef de service et un des membres fondateurs du service. Suite au décret de 1995, l'administration et l'unité plièrent bagage et s'installèrent à l'hôpital Mustapha. Très vite, la cellule principale fut dépassée, il fallait créer d'autres unités afin de couvrir au mieux la wilaya. Dans un premier temps, trois nouvelles unités ouvrent : à Beni Messous, Rouiba et Bab El Oued. Problème : comme aucun décret présidentiel n'a suivi le décret ministériel – la démarche habituelle – le SAMU dépend depuis toujours des hôpitaux… Résultat : peu de moyens et aucune prime de risque. Mais un avant-projet de loi en débat à l'Assemblée pourrait bientôt changer la donne. « Il nous est arrivé de payer l'essence de notre poche, car l'administration de l'hôpital refusait de nous prendre en charge », avoue le docteur. Injoignable Pas évident de gérer quand on sait que le SAMU de Mustapha effectue en moyenne… 60 sorties par jour ! Derrière : 2 médecins permanents et 2 aide-médicaux. Un staff insuffisant pour les citoyens qui déplorent le manque de prise en charge des doléances. Quand ce n'est pas le service qui est injoignable… « Nous n'avons qu'une ligne à Mustapha pour répondre à tous ceux qui nous appellent pour des urgences qui ne le sont pas. Une crise d'asthme est une urgence, les effets secondaires d'un cancer ne le sont pas forcément, mais nous essayons d'orienter les citoyens au mieux. » Raison pour laquelle des campagnes de sensibilisation au travail du SAMU ainsi que des journées portes ouvertes seront bientôt lancées. « Les questions que l'on pose lors de l'entretien téléphonique nous permettent de cerner l'urgence à laquelle nous avons à faire, si de l'avis du permanent médical et du médecin, cela ne nécessite pas un déplacement, ils se contenteront de guider le citoyen par téléphone, un gain de temps et d'argent ! » La semaine dernière, toute l'équipe a déménagé à nouveau à Sidi Yahia (voir infographie) où davantage de lignes et de personnel seront là pour répondre à tous les appels. « Je me souviens qu'un jour, un homme nous a appelés en nous alarmant sur son état ‘‘critique'', témoigne Choukri. Une fois arrivés sur les lieux, on s'est aperçus qu'il n'arrivait tout simplement pas à dormir, seul dans cette maison. Alors nous sommes restés avec lui jusqu'à ce qu'il s'endorme. C'est aussi ça le SAMU. »