«Qui m'a consulté le jour où vous avez cultivé ? Qui a demandé de mes nouvelles quand vous avez récolté ? Je n'ai acheté de gaz ni vendu du pétrole. Car moi, de ma vie je n'ai été responsable.» Couplet traduit du dialecte algérien de la chanson Manich Mes'oul (je ne suis pas responsable) du groupe Debza, chantée sur le mont de Djebel Chélia, à Batna, par l'un des pionniers de la troupe, Merzouk Hamiane, lors de sa tournée, en janvier dernier, à l'est du pays. Dressé comme une sentinelle sur le sommet de ce mont avec son béret habituel et son regard poignant, Merzouk, accompagné en musique par le jeune couple d'artistes, Fayssal et Nesrine, du groupe Iwal, contemple le paysage qui s'offre à lui : la multitude de sapins de l'Est, lui qui aime tant cette région des Chaouis. Ce sont là des moments rares où Merzouk se lâche et se confesse sur le passé glorieux de sa troupe, créée dans les années 1980, et qui a marqué toutes ces années de combat avec son dévouement pour la culture. Lors de notre voyage d'Ath Ouartilane à Sétif, passant par T'kout et El Madher à Batna, puis par Bouhmama dans la wilaya de Khenchela, là où Merzouk atterrit, il est acclamé, applaudi et accompagné dans ses textes. De plus, qui ne connaît pas Debza ? Et qui ne se souvient pas de ses chansons du temps de la mouvance berbériste de 1980 et de la révolution culturelle katebienne ? En 40 ans d'existence, Debza n'a produit que quatre albums, dont le dernier est sorti en 2015, mais il a mis en scène plusieurs pièces théâtrales, dont nous avons eu le plaisir d'apprécier certaines au cours de notre épopée avec Merzouk. Nous revenons, ici, sur l'histoire de cette belle aventure portée, à l'époque, par de jeunes femmes et hommes de gauche issus de diverses régions du pays. Ces derniers, qui ont cru en leur idéal, l'ont bellement défendu avec le chant et le théâtre. Merzouk, ou la mémoire vivante d'une époque florissante, perpétue aujourd'hui encore la tradition. Il le vit et le dit. «Nous ne sommes pas des artistes mais des travailleurs de la culture», lance-t-il entre deux chansons. Puis ajoute pour rappeler l'œuvre du groupe, lui qui n'aime pas tout rapporter à lui : «Je n'aime pas évoquer seul l'histoire de Debza, car elle est avant tout un esprit de groupe et un travail d'ensemble. Elle n'est pas l'œuvre personnelle de Merzouk.» Combat Des chansons comme Manich Mes'oul, Wash qerawek fi likoul a wlidi (que t'a-t-on enseigné à l'école mon fils), Allez-y allez-y ou Wash Rah sayer fel djazayer ? (Que s'est-il passé en Algérie ?), resteront dans les annales de l'histoire de la musique engagée en Algérie. Plusieurs noms sont revenus lors de nos discussions. Car résumer 40 ans de carrière artistique, c'est aussi évoquer le journaliste Meziane Ourad et l'homme politique Djamel Zenati qui étaient derrière la création de la troupe avec d'autres figures, dont Rabah Belaouane, Salim Bensedira, Abdelatif Bounab dit Titif et la liste est longue. Des souvenirs de militants politiques qui ont marqué les années 1980 ont surgi, des moments de lutte passés avec les étudiants des sciences économiques à la fac centrale d'Alger, du mouvement berbériste et de ses militants ; de la mouvance culturelle de l'époque et de ses meneurs, dont Kateb Yacine dont il était le compagnon, Mohya et d'autres visages du théâtre et de la culture qu'il a connus, surtout, grâce à l'auteur de Nedjma. Ce sont là des souvenirs d'une autre époque, certes, mais qui garde encore tout son sens dans le combat culturel de nos jours. Cependant, nous ne pouvons raconter cette troupe mythique sans parler de Merzouk Hamiane qui continue à sillonner, avec ses propres moyens, les villages et les douars isolés du pays afin de chanter, faire du théâtre et répandre du mieux qu'il peut la culture dans ces régions oubliées du ministère de la Culture et de la politique culturelle en Algérie. «C'est un combat que nous avons hérité de Kateb Yacine. Il a passé sa vie à militer pour l'action sociale, défendre les travailleurs et les intérêts des classes démunies et revendiquer haut et fort son identité amazighe et son combat contre la réaction et l'arabo-islamisme. Yacine donnait des spectacles chez les paysans, sur les lieux de travail, dans les usines et même dans les prisons. C'était du théâtre de rue avec un discours virulent contre l'idéologie du système de l'époque», se rappelle-t-il. Et d'ajouter avant de reprendre la route d'Alger vers Sétif : «Mon combat, à moi, c'est de perpétuer cette tradition et d'aider du mieux que je peux la nouvelle génération qui porte les mêmes valeurs, comme c'est le cas du groupe Iwal. J'œuvre pour tout ce qui est art et ce qui est en lien avec l'expression libre, l'épanouissement de l'individu et de la culture, comme nous l'avait bien appris Kateb Yacine avant sa mort.» Yennayer Nous sommes le 11 janvier, la veille de Yennayer, à la sortie de Beni Maouche entre la wilaya de Béjaïa et celle de Sétif. Sur ces routes étroites de Kabylie, nous rencontrons constamment des fillettes vêtues de robes berbères sur lesquelles sont dessinés des caractères en tifinagh, accueillant ainsi le nouvel an amazigh avec beauté et originalité. Rien de mieux pour faire plaisir à Merzouk qui, souriant, les saluait à chaque fois sur un fond musical de Slimane Azem, dans une voiture conduite par Ghilas Issiakhem, un descendant du grand M'hamed Issiakhem. Un artiste peintre aussi, peu discret mais qui ne laissera certainement personne indifférent avec son talent dont il parle peu au grand regret des amoureux de cet art. Arrivés dans l'après-midi à Ath Ouartilane, ce sont de jeunes garçons enroulés dans des burnous blancs qui nous accueillent devant la maison de la culture. Merzouk, s'est finalement produit dans la toute nouvelle maison de jeunes, inaugurée il y a quelques mois. Hormis, les quelques rayons d'un soleil timide, il faisait très froid ce jour-là. Mais cela n'a pas empêché les dizaines de familles sétifiennes à sortir et profiter de l'ambiance au centre-ville avant la tombée de la nuit et les retrouvailles autour du couscous de Yennayer. Par manque d'expérience, le spectacle de Merzouk a été peu médiatisé. Dans la salle, dépourvue de tout moyen et d'équipement artistique, Merzouk a animé son spectacle L'accusé devant près de 200 enfants et quelques adultes. L'accusé, adapté du texte original de Nicolas Gogol, romancier, nouvelliste et dramaturge russe d'origine ukrainienne, a été traduit en kabyle par Mohya et en dialecte algérien par Abdelkader Alloula. «J'ai repris l'adaptation de Abdelkader Alloula en hommage à lui après son assassinat. Mon spectacle parle de la revendication identitaire et critique avec une touche satirique l'islamisme et le baasisme en Algérie», explique-t-il avant de monter sur scène. Les enfants, agités, n'arrêtaient pas de parler et de bouger dans tous les sens. Même les organisateurs n'ont pas pu les maîtriser. Merzouk, imperturbable, est allé jusqu'au bout et a tenu à terminer son spectacle. «Je sais que les enfants n'ont rien compris de ce que j'ai dit. Mais j'espère seulement qu'ils garderont le souvenir d'avoir vu du théâtre durant leur enfance. J'espère aussi que cela les incitera à faire de même quand ils seront grands», s'enthousiasme-t-il. Kabylie Notre passage à Ath Ouartilane était court. Sur la route du départ vers Batna, deuxième destination de l'artiste, la discussion s'enchaîne, notamment sur son enfance, et prend place du débat sur le théâtre. Né en 1956 à Bouteldja dans la wilaya de Annaba, il avoue qu'il n'a pas eu la vie facile. Il a été, entre autres, poussé à se prendre en charge très tôt, dès l'âge de 15 ans, et il n'a eu, depuis, que des petits boulots de serveur ou de plongeur dans des bars, des cafétérias ou dans des restaurants de la capitale, et ce, avant que son chemin ne croise celui de l'art. Né dans une famille partagée entre un père, épicier, installé à Annaba et une mère établie en Kabylie, Merzouk finit par regagner la Kabylie vers les années 1970. «Je vivais tout seul avec ma tante dans mon village natal Ath Larbi (Tizi Ouzou) après avoir quitté Annaba. Elle était d'un âge très avancé et ne pouvait pas s'occuper de moi. Je faisais quotidiennement des allers-retours à pied pour rejoindre mon collège sis dans l'ancienne commune mixte Djurdjura (ex-Michelet et actuelle Aïn El Hammam, ndlr), et je revenais souvent très tard la nuit, seul au milieu de la forêt. C'était pénible, surtout que je devais cuisiner aussi pour pouvoir manger le soir. J'ai fini par quitter la Kabylie pour m'installer à Alger, mais rien n'avait réellement changé pour moi», se souvient-il. Installé chez sa sœur dans une famille nombreuse à El Harrach, Merzouk a vite compris que cette dernière n'avait pas les moyens de le prendre en charge. Il décide de son propre gré de quitter le foyer et de faire cavalier seul, en se lançant tôt dans la vie professionnelle. «Je n'ai pas pu reprendre mes études, car j'ai été exclu de mon école pour cumul d'absences. L'administration ignorait ma situation et ne savait pas pourquoi je n'assistais pas aux cours. J'ai donc dû changer complètement de vie pour me retrouver dans la rue», fulmine-t-il. Ben Aknoun Il finit par trouver un boulot de serveur dans une cafétéria à Bab El Oued et réussit même à trouver un refuge près de la mosquée Djamaa Lihoud. D'un établissement à un autre, il avoue qu'à l'époque, il ignorait complètement ce qu'était le théâtre ou le combat culturel pour lequel il s'est engagé. Il lui est même arrivé de servir du café à Kateb Yacine et son groupe, qui préparaient leurs pièces théâtrales dans une structure du ministère du Travail à Bab El Oued, sans savoir réellement qui ils étaient ni ce qu'ils faisaient exactement. «A l'époque, on ne connaît de nom que Slimane Azem et quelques militants berbéristes, comme les poseurs de bombes ou Bessaoud Mohand Arab de l'Académie berbère. Je ne connaissais pas grand-chose», avoue-t-il. Les années passent. Après le travail, son ami poète lui propose de prendre un pot dans une brasserie près du Tantonville et du Théâtre national d'Alger (TNA). «Les clients étaient partagés en groupes. Chacun avait ses amis habituels autour d'une table. Il y avait celles de militants politiques, d'écrivains, d'homme de théâtre et j'en passe. C'est ce jour-là qu'on m'a montré Kateb Yacine. On m'a même proposé de voir l'une de ses pièces programmée dans l'après-midi au TNA. C'était la première fois de ma vie que je voyais une pièce de théâtre», se souvient-il. Vers le début des années 1980, la Kabylie s'embrase. Les vents du Printemps berbère parviennent à la fac centrale d'Alger, où beaucoup d'étudiants étaient déjà partie prenante dans ce combat. Merzouk rejoint alors le mouvement en extra-universitaire et participe même aux manifestations. Il se souvient notamment du journaliste Arezki Aït Larbi, qu'il présente comme un fervent défenseur de la cause amazighe, et de Mustapha Pacha qu'il a eu à connaître pendant ces années de lutte. Merzouk assiste en 1981 à la conférence animée sur le combat identitaire par Kateb Yacine à l'amphithéâtre Benbatouche de la fac centrale. Il découvre qui était en vrai Kateb Yacine et prend conscience de son mouvement, l'Action culturelle des travailleurs (ACT). «J'ai été fasciné par son discours et son intellectualisme. J'ai directement adhéré à ses idées et épousé son engagement pour la culture et l'identité amazighes», témoigne-t-il. Le contact est vite établi entre les deux hommes. Merzouk, qui a rejoint Debza grâce à l'un de ses membres, Mohamed Lahbieb, fréquentait aussi le domicile de Kateb Yacine à Ben Aknoun. «Yacine était déjà responsable du théâtre régional de Sidi Bel Abbès (TRSBA) depuis 1978. Un jour, il me propose de rejoindre son équipe du TRSBA et j'ai accepté. Depuis, ma vie a complètement changé. J'étais partagé entre ma tâche d'accompagner Yacine dans tout ce qu'il faisait et mon engagement avec Debza», confie-t-il. Yennar Arrivés dans la nuit à T'kout, ce sont les reflets d'une lumière lointaine qui nous ont le plus attirés. A l'entrée, on a découvert que ce sont des bougies disposées sur une colline qui domine la vallée, grâce auxquelles, on a pu dessiner la lettre Z en tifinagh avec le chiffre 2968 pour symboliser le nouvel an amazigh. «Bienvenus à T'kout. C'est une tradition chez nous. On allume ces bougies à chaque veille du nouvel an amazigh», explique Fayssal Achoura, fondateur avec sa compagne Nesrine du groupe Iwal et neveu du fervent militant de la cause amazigh dans la région chaouie, le défunt Tahar Achoura, décédé des suites d'un long combat avec la maladie. La soirée, dans le domicile de Fayssal où nous avons passé la nuit, venait juste de débuter. Nous avons d'abord commencer par la dégustation d'un plat traditionnel, irchem, préparé à base de blé dur trempé dans l'eau pendant 24 heures et d'un fromage local appelé ici haklilt, que les Chouis préparent une fois par an en l'honneur de Yennayer. Les jeunes artistes présents ce soir-là, majoritairement musiciens ou choralistes, venus appuyer le groupe Iwal dans sa performance prévue le lendemain à l'école primaire de T'kout, découvrent alors que Merzouk connaît toutes les pièces de Kateb Yacine. Mohamed prend ta valise, Palestine trahie, La guerre de deux mille ans ou d'autres, aucun détail ne lui échappe, lui qui reste une mémoire vivante des œuvres de Kateb, dont il regrette l'inexistence d archives. «Yacine est un dramaturge au sens propre du mot. Il est pour moi l'un des rares intellectuels communistes algériens qui ont laissé leurs traces aux côtés de ceux que j'ai côtoyés, comme Bachir Hadj Ali, Abdelhamid Benzine ou Ahmed Akkache. Il a commencé quand même trop top. Il a publié Nedjma en 1956 et il a donné sa première conférence au Parc des princes à l'âge de 17 ans. Il a été beaucoup sollicité par l'étranger. Il a contribué notamment par une pièce sur Nelson Mandela, l'ANC et l'apartheid, intitulé, Un pas en avant et trois pas en arrière. En 1988, il a été encore sollicité pour écrire sur le bicentenaire de la révolution française. Il a pondu sa pièce Le bourgeois sans culotte ou le spectre du parc Manceau, où il a parlé de Robespierre et de tous les révolutionnaires français de l'époque. C'est une pièce qui a même participé au Festival international du théâtre d'Avignon. Mais il dérangeait beaucoup en Algérie. D'ailleurs, c'est la raison pour laquelle, il a été envoyé à Sidi Bel Abbès. C'est quelque part, une manière de l'éloigner d'Alger», affirme Merzouk. Solidarité Le lendemain, soit le jour de Yennar, à 14h, le public était au rendez-vous à l'école primaire de T'kout. Les présents étaient de tous les âges et des deux sexes. Les drapeaux berbères dont celui qui représente la région chaouia, couleur jaune et noire avec son caractère berbère au milieu, étaient hissé partout. Ici, Merzouk se sent chez lui, car, il est connu de tout le monde. Applaudi et acclamé, Merzouk a enflammé la foule avec son spectacle L'accusé. Les spectateurs ont même exigé son retour sur scène. Il a fini par revenir quelques minutes plus tard, mais en musique cette fois-ci avec le groupe Iwal. Même ambiance le lendemain à Bouhmama dans la wilaya de Khenchela. Sauf qu'ici, le programme a été un peu perturbé avec l'annulation de la conférence que devaient animer les blogueurs du site Inumiden, spécialisé dans la culture amazighe en générale et de celle des Chaouia en particulier, par le chef de la daïra. L'association qui a organisé l'événement a même dénoncé l'acte à travers une déclaration lue publiquement. Seul Jugurta, était présent parmi les blogueurs concernés. Après un moment de concertation entre Iwal et Merzouk, ces derniers ont décidé de monter sur scène et de manifester leur solidarité avec Inumiden en musique. Mais contrairement à Bouhmama, l'événement organisé à El Madher, à Batna, a été soutenu par le P/APC qui a même assisté aux performances de Merzouk et d'Iwal. Ce qu'on peut retenir de cette tournée, c'est surtout l'émergence d'une nouvelle génération de militants amazighs défendant tant bien que mal leur culture tout en ayant un esprit ouvert sur le monde et sur les autres cultures, à l'exemple de Hichem, jeune enseignant de langue française d'El Madher et l'un des organisateurs de l'événement dans sa région. «Nous sommes profondément attachés à notre culture chaouie et amazighe. Mais il faut savoir que ce n'était pas facile pour nous d'activer dans nos régions respectives. Nous n'avons commencé à fêter Yennar que récemment. Ça peut paraître bizarre pour certains, mais c'est la réalité. Le pouvoir a réussi à nous détacher de nos traditions et de nos valeurs. Nous travaillons, justement, pour les ressusciter. Nous nous préparons d'ailleurs pour célébrer la double commémoration du Printemps berbère et du printemps noir. Vous êtes invités si vous êtes intéressés», explique-t-il à Merzouk. Funérailles Sur le chemin du retour vers Alger, Merzouk raconte qu'après 1984, les membres de la troupe composée majoritairement d'étudiants en sciences économie ont soit rejoint leur ville d'origine à la fin de leur cursus ou trouvé du travail dans d'autres régions du pays. «Je me suis retrouvé seul. Mais je n'ai pas baissé les bras. Beaucoup viennent et repartent. Je me souviens qu'après, j'ai monté El Qesba (La Cabah) avec l'actuel avocat et défenseur des droits de l'homme, Noureddine Ahmine. C'était en lien avec les événements qu'a vécus La Casbah pendant cette période. Et c'est ce qui m'a motivé à interpréter des monologues. En 1986, j'ai joué En attendant Godot en kabyle, une pièce montée par Mohya dont le texte orignal était celui de Samuel Beckett. Depuis, j'ai pris l'habitude de voyager seul et monter aussi seul sur scène», explique-t-il. Merzouk est aussi témoin des derniers jours de Kateb, décédé juste après la diffusion d'un documentaire qui raconte sa vie. Réalisé par Kamal Dahane, il a été diffusé à Oran en 1989. «C'est moi qui a enterré Kateb Yacine. J'ai préparé ses funérailles avec des activités culturelles comme il l'a toujours souhaité. C'était un grand homme. Je lui dois tout», confie-t-il les larmes aux yeux. Notre voyage prend fin ici. Questionné à la fin de sa tournée, il avoue qu'il reviendra à l'Est dans les mois à venir. D'autres spectacles de Debza seront probablement programmés dont on peut citer Sandouk La3djeb (la boîte à merveille), qui a déclenché les événements de 1981 à la fac centrale et qui, durant lesquels, huit membres de la troupe ont été emprisonnés. Il y a aussi La voix, une création collective avec un style katebien où Amar El Boudjadi, adapté par Titif du texte de Bertolt Brecht, Turandot ou le congrès des blanchisseurs, qui peuvent être programmés. Mais avant de nous quitter, Merzouk a tenu à nous rappeler une citation de Kateb qui l'a marqué et pense qu'elle est d'actualité avec tous les maux que vivent la société et l'Etat algériens depuis déjà plusieurs décennies. «Je me suis insurgé contre l'Algérie française, je m'insurge contre l'Algérie arabo-musulmane. On ne ligote pas un peuple à travers une langue ou une religion. Je ne suis ni arabe ni musulman, je suis Algérien.» Extrait d'un entretien accordé par Yacine Kateb en 1986 au journal Le Monde, lors de la 2e édition du Festival national du théâtre professionnel, repris par Merzouk. n