Déposer plainte chaque fois que de graves détournements sont commis et qu'ils ne sont pas suivis d'une enquête judiciaire. C'est sans surprise que Me Mostefa Bouchachi a été réélu ce vendredi à la tête de la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme (LADDH). C'est l'une des principales résolutions du troisième congrès de la ligue qui vient de se tenir à la Maison des syndicats les 25 et 26 mars. « Maître Bouchachi a été élu à l'unanimité », a annoncé le docteur Kamel Daoud, président du congrès, lors d'une conférence de presse qui s'est tenue hier au siège de la Ligue, rue Didouche Mourad, en présence de Me Mostefa Bouchachi et de Me Aïssa Rahmoune, porte-parole du Congrès. Selon les statuts de la LADDH, c'est au Conseil national qu'il appartient d'élire le président de la ligue. Et ledit conseil, composé de 56 membres, s'est prononcé donc à l'unisson en faveur du président sortant, en clôture des travaux de ce 3e congrès. Maître Bouchachi a tenu à apporter une précision de taille en affirmant que « le congrès n'a pas fait l'objet d'une interdiction. Les autorités n'ont pas interdit le congrès mais une réunion publique ». Toujours est-il que l'administration a refusé de délivrer une autorisation à la LADDH pour tenir son congrès, comme prévu, à la mutuelle de la construction, à Zéralda. Maître Bouchachi confie à ce propos : « J'ai même écrit une lettre à M. Zerhouni dans laquelle je me suis évertué à le sensibiliser sur l'importance de cet événement en faisant valoir le fait que la ligue s'apprêtait à recevoir des invités prestigieux, des représentants de pays étrangers ainsi que des ONG internationales, et qu'il serait un honneur, pas seulement pour la LADDH, mais avant tout, pour l'Algérie, de tenir un tel congrès. » Une exhortation qui n'a manifestement pas trouvé écho en haut lieu, ce qui fera dire au président de la LADDH : « Quand l'année prochaine seront établis les rapports internationaux sur la situation des droits de l'homme en Algérie, ce n'est pas la LADDH qui sera mise à l'index, mais les autorités algériennes. Quand le ministre des AE ira à New York et à Genève pour dire que l'Algérie respecte les droits de l'homme, ils lui rappelleront que les pouvoirs publics n'ont pas autorisé la LADDH à se réunir à Zéralda. » Cette situation ubuesque où le congrès de la ligue n'est ni interdit ni autorisé, posera-t-elle un problème en termes de « validation » ? « La balle est dans la camp de l'administration », tranche Kamel Daoud, avant d'ajouter : « Nous, nous sommes une organisation légale et notre congrès ne s'est pas tenu dans la clandestinité comme certains l'ont écrit. Nous n'avons pas porté atteinte à l'ordre public, ni appelé à la violence. Nous sommes dans la légalité démocratique. » Aïssa Rahmoune renchérit : « Nous allons déposer notre dossier pour validation. Nous sommes avant tout des légalistes dans nos actions. » Sur les motifs invoqués par la wilaya d'Alger pour ne pas délivrer d'autorisation, Kamel Daoud dira : « C'est toujours ainsi : ils n'expliquent jamais rien. Mais personnellement, je suppose que c'est une décision qui s'appuie sur l'état d'urgence. » Interrogé à propos de sa feuille de route pour ce nouveau mandat, Me Bouchachi indiquera que l'une de ses priorités absolues sera d'œuvrer pour la levée de l'état d'urgence. « C'est une initiative que nous sommes en train de mettre en œuvre dans le cadre de la coalition nationale pour la levée de l'état d'urgence, en association avec des partis politiques et des organisations de la société civile. » Maître Bouchachi s'est engagé également à s'impliquer davantage dans la défense des droits économiques et sociaux des Algériens. Autre chantier brûlant : la lutte contre la corruption. « Nous réfléchissons à la mise en place d'un mécanisme de lutte contre la corruption qui permet de déposer plainte chaque fois que de graves détournements sont commis et qu'ils ne sont pas suivis d'une enquête judiciaire. » Enfin, Me Bouchachi a souligné qu'il poursuivra avec vigueur la campagne de la LADDH en faveur de l'abolition de la peine de mort.