La conférence sur la sécurité nucléaire qui s'ouvre aujourd'hui à Washington sous les auspices du président Obama s'apparente à un procès à huis clos contre l'Iran. Le président américain et ses amis du club nucléaire vont tenter de rallier à leur cause les représentants des pays non nucléaires pour condamner par contumace Téhéran. Pour cause, ce pays, pourtant accusé, n'est pas invité à la barre des puissants de ce monde pour pouvoir se défendre. Le président Obama se chargera juste de lire la sentence sous les acclamations acquises de Sarkozy, Merkel, Brown et celles, espère-t-il, de Medvedev et Hu Jintao. C'est là le principal objectif de cette grand-messe du nucléaire qui prend les allures de monologue du club sur la meilleure stratégie à adopter pour maintenir le monopole de l'atome et empêcher que cette technologie n'irradie les pays situés dans l'autre sphère que l'occidentale. Preuve que cette feuille de route sera cousue à Washington, le secrétaire d'Etat à la Défense, Robert Gibbs, n'a pas attendu le feu vert du club nucléaire pour armer son missile. « Toutes les options sont ouvertes aux Etats-Unis en matière nucléaire avec l'Iran et la Corée du Nord, car ces pays ne respectent pas le Traité de non-prolifération (TNP) », a-t-il averti hier sur la chaîne CBS. En clair, les Etats-Unis, qui tentent de vendre une nouvelle doctrine nucléaire « pacifique », menacent l'Iran et la Corée du Nord de subir une attaque de type nucléaire. Leur tort ? Ne pas respecter le TNP ! Or, le cas d'Israël est encore plus grave en ce sens que non seulement il ne respecte pas ce traité mais il ne l'a même pas signé alors qu'il détient près de 300 ogives nucléaires… Il serait bien sûr naïf, voire fou, d'imaginer les Etats-Unis mettre leur allié, Israël, dans une posture d'accusé et lui réclamer de mettre son arsenal sous la loupe des inspecteurs de l'AIEA. Le Premier ministre, Benyamin Netanyahu, qui n'a pas voulu prendre de risque bête, a préféré zapper la messe de Washington. Il ne souhaitait pas devoir s'expliquer sur son programme nucléaire militaire devant les dirigeants de cinq pays arabes qui ne manqueraient pas de relever le deux poids, deux mesures du club nucléaire. A l'arrivée, la conférence de Barack Obama s'en trouve piégée avant son ouverture. Il y a d'un côté l'Iran qui n'est pas invité alors qu'il est dans le collimateur des grandes puissances et qui clame le caractère pacifique de son programme ; de l'autre, Israël qui est une puissance nucléaire informelle qui a décidé de son plein gré de boycotter, sans coup férir, le rendez-vous. Scénario idéal pour les Etats-Unis : que les 47 pays invités aujourd'hui désignent l'Iran à la vindicte mondiale et passent sous silence la puissance de feu d'Israël. Barack Obama aura ainsi condamné par contumace Téhéran et acquitté de la même manière Tel-Aviv. C'est à peu près cela la sécurité nucléaire, selon le paradigme américain d'un monde dénucléarisé…