Les praticiens de la santé publique ont renoué, hier, avec la protestation. Contraints après deux mois de débrayage à renoncer à la grève, les médecins essayent par tous les moyens de maintenir la pression. Hier comme à l'accoutumée, un dispositif de sécurité des plus impressionnants a été déployé devant et aux alentours de l'hôpital Mustapha. L'objectif n'était pas de traquer une bande de malfaiteurs, mais tout simplement de réprimer le sit-in initié par l'intersyndicale dans l'enceinte de l'hôpital Mustapha. Un rassemblement auquel ont pris part des centaines de médecins venus de différentes wilayas du pays. En toute vraisemblance, les policiers ont reçu ordre d'empêcher les manifestants de sortir dans la rue. Une présence policière qui a outré les blouses blanches : « Nous n'avons pas appelé à une marche dans la rue, mais à un rassemblement pacifique à l'intérieur de l'hôpital alors pourquoi autant de policiers », s'est interrogé un médecin. Un autre praticien qualifie de honteux le dispositif de sécurité dépêché tout au long de la place du 1er Mai. « Le pouvoir réagit très vite lorsqu'il s'agit de réprimer et d'étouffer dans l'œuf une manifestation pour revendiquer les droits des fonctionnaires, mais trouve des difficultés et hésite à mettre la main dans la poche afin d'améliorer les conditions socioprofessionnelles des fonctionnaires », a-t-il fulminé. Deuxième du genre, le sit-in observé hier par l'intersyndicale regroupant le SNPSP et le SNPSSP au CHU Mustapha, se veut en quelque sorte une réponse « au comportement indigne et arbitraire opposés par les pouvoirs publics à leur grève de la dignité ». Praticiens et spécialistes du secteur public, chirurgiens-dentistes, pharmaciens ont tous manifesté pacifiquement leur colère. Vêtus de blouses blanches et portant des brassards noirs en signe de deuil et de colère, les médecins ont improvisé une marche à l'intérieur de l'hôpital où ils ont criés haut et fort leur attachement à leur plateforme de revendications, comme ils ont brandi des pancartes où l'on pouvait lire des slogans hostiles aux pouvoirs publics. « Ponctions, sanctions, debout nous resterons », « Barkat, barakat », « Ya raïs ya Aziz, la santé agonise (M. le Président la santé agonise) », « Barkat dehors, les médecins ne reculent pas ». A travers cette action de protestation, les médecins ont voulu démontrer à ceux qui veulent les museler qu'ils ne comptent pas abdiquer ni baisser les bras et encore moins abandonner le terrain de la contestation. En dépit de l'arrêt de la grève, qui avait paralysé le secteur de la santé pendant des mois, le bras de fer avec la tutelle est loin de connaître son épilogue. Le conseil national des deux syndicats s'est réuni et a décidé entre autres le boycott de toute relation de travail dans le cadre syndical avec le ministère de la Santé, et ce, jusqu'à l'ouverture de négociations sérieuses et responsables et d'intenter une action en justice contre le ministère de la Santé pour non-respect de procédures en matière de règlement du conflit collectif du travail ainsi que pour diffamation. Par ailleurs, les syndicats de la santé publique ont décidé de contracter des alliances avec les organisations syndicales activant dans d'autres secteurs et ayant les mêmes objectifs. Des alliances à même de faire le poids face aux pouvoirs publics. A cet effet, des contacts ont été entrepris ces derniers jours entre le Cnapest, l'Unpef, le SNPSP et le SNPSSP pour unir leurs efforts et se battre ensemble. Pour ce faire, une réunion de concertation est prévue entre les quatre formations syndicales demain à Alger. « Plusieurs sujets d'actualité sont à l'ordre du jour de cette première rencontre intersyndicale. Il s'agit dans un premier temps de discuter de la manière de travailler avant d'arrêter une feuille de route », nous confie docteur Lyes Merabet. Si certains syndicalistes évoquent la création d'une confédération lors de ce conclave, docteur Merabet, fait remarquer qu'il s'agit là d'une prise de contact et éventuellement réfléchir sur la meilleure manière de riposter aux atteintes à l'exercice du droit syndical. S'agissant des actions futures, l'intersyndicale se réunira et arrêtera une série de propositions qui seront votées par la base. Il est prévu des rassemblements dans les wilayas et probablement devant le siège de la présidence.