Rien ne peut ébranler cette mobilisation populaire qui continue d'investir la rue pour réclamer, haut et fort, le départ du système. Le 10e vendredi de protestation citoyenne a été aussi des plus grandioses dans la ville de Tizi Ouzou qui a été, encore une fois, au rendez-vous avec les marches hebdomadaires organisées, hier, à travers toutes les wilayas du pays dans le sillage du mouvement populaire enclenché le 22 février dernier. Ils sont venus de toutes les localités de la wilaya de Tizi Ouzou pour prendre part à une imposante marche qui a drainé des foules dans la capitale du Djurdjura. Les marcheurs ont entamé, comme chaque vendredi, leur marche devant le portail principal du campus universitaire de Hasnaoua où les premiers manifestants ont mis en place le décor de l'action avant 12h. Ainsi, l'emblème national et un géant drapeau amazigh étaient déjà accrochés au mur de l'enceinte universitaire. Peu après midi, le flux de citoyens commençait à déferler sur le lieu de départ de la marche. Ainsi, aux cris de «Pouvoir assassin», «Klitou Leblad Ya serakine» (Vous avez dilapidé les richesses du pays, voleurs), la première procession s'ébranle avec, au-devant de la foule, des banderoles sur lesquelles ont pouvait lire des slogans hostiles aux décideurs. «Pouvoir dégage !», «Le peuple veut le départ de la caste !», «Le peuple exige que les responsables de l'assassinat des 128 jeunes par des gendarmes en 2001 en Kabylie soient jugés», «Non à une justice sélective», «Saïd et Toufik doivent être jugés», «Ya El Gaïd, la transition se fera selon le choix du peuple». L'ambiance était véritablement familiale tant le caractère pacifique de la marche a donné à la manifestation une image des plus splendides, notamment avec la participation des femmes, des enfants et même des personnes âgées. Des instants de communion et de solidarité ont, d'ailleurs, marqué l'événement. «On est sortis pour continuer à réclamer le départ, pur et simple, de ceux qui ont ruiné notre pays et compromis notre avenir», nous dit un jeune, la trentaine à peine bouclée. La première procession a atteint le centre-ville et une autre foule impressionnante commençait aussi à se constituer sur la montée qui mène au stade du 1er Novembre. Là aussi, nous avons remarqué des images extrêmement belles. Une camionnette, parée de l'emblème national, sur son capot, des manifestants ont écrit : «Finie El harga, Hadi Bladna» (Finie la harga, l'Algérie est notre pays). Des slogans qui ont beaucoup de significations et puisés, notamment, de la détresse de la jeunesse et du marasme des citoyens qui protestent, comme un seul homme, pour dire : «Y en a marre de ce pouvoir». Des médecins, des universitaires, des avocats et des élus, entre autres, ont pris part à la manifestation. Au carrefour Djurdjura, premier rond-point, sur l'avenue Abane Ramdane, nous avons pu apercevoir certains carrés de marcheurs répartis en fonction des localités, comme celui de Ouaguenoun, que nous avons reconnu à travers un grand étendard de Matoub Lounès avec une banderole sur laquelle est mentionnée «Les Ath Ouaguenoun toujours fidèles au combat du Rebelle». Le carré suivant est celui des marcheurs venus de la daïra de Tigzirt, dont plusieurs militants politiques et animateurs associatifs ainsi que le maire d'Iflissen, le Dr Akli Tizguine. En somme, la mobilisation d'hier a regroupé aussi plusieurs élus de toutes les communes de la wilaya de Tizi Ouzou, à l'image d'Azazga, Beni Doula, Aïn El Hammam, Boghni, Draâ El Mizan, Ouadhias, Beni Yenni, Ouacifs, Iferhounen et Bouzeguene. «Le pouvoir est ébranlé. Restons unis, soudés et pensons à une Algérie florissante dans son intégrité territoriale, unie et indivisible et son identité profonde (amazighe). Des hommes, il y en a et des penseurs, il y en a», est-il écrit sur une pancarte brandie par un septuagénaire. «C'est la fin du clan d'Oujda», lit-on sur une autre portée par un père de famille venu avec sa femme et ses deux enfants. 16h, des marcheurs continuaient à affluer vers la capitale du Djurdjura en scandant «Ulach Smah Ulach». Encore une véritable démonstration de force pour marquer ce 10e vendredi de protestation contre le régime.