Lors de son intervention, Saïd Sadi a estimé que «l'argent ne peut pas corrompre ces milliers de personnes venues pour se mobiliser contre la mascarade électorale du 17 avril». «Le boycott en Kabylie est décisif pour l'avenir du pays», a-t-il martelé. La marche à laquelle a appelé le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) a drainé, hier, des milliers de personnes venues manifester pour réclamer l'officialisation de tamazight, exprimer leur rejet de l'élection présidentielle de demain et s'élever contre le système. Il était 10h quand les premières grappes humaines ont commencé à affluer vers le lieu de départ de la manifestation, devant le portail principal du campus universitaire de Hasnaoua. Une demi-heure plus tard, le premier carré s'était constitué alors que d'autres citoyens, des militants, des élus, des cadres du RCD, des étudiants et des animateurs du mouvement associatif rejoignaient par dizaines la foule. Les organisateurs, à l'aide de mégaphones, exhortaient en continu les présents à s'organiser en procession. 11h. Les lieux sont noirs de monde. «Il y a une grande mobilisation : des milliers de personnes ! C'est une réussite, surtout qu'il est difficile de mobiliser dans la conjoncture actuelle», laissaient entendre des confrères, avant l'entame de la marche par foule. Celle-ci s'ébranle sous un soleil de plomb, arpentant la montée du stade du 1er Novembre. Les manifestants ont mis en avant l'emblème national, le drapeau amazigh et des banderoles sur lesquelles on pouvait lire des slogans hostiles au scrutin du 17 avril et en faveur de l'officialisation de la langue amazighe. Ainsi, au fur et à mesure de la marche, des citoyens rejoignaient en grand nombre la procession. Parmi les présents à cette marche, nous avons remarqué l'actuel et l'ancien présidents du RCD, Mohcine Belabbas et Saïd Sadi. Les manifestants ont scandé haut et fort des mots d'ordre au vitriol à l'égard du système, comme «Système dégage !», «Pouvoir assassin !», «Bouteflika, Ouyahia Houkouma Irhabia !». Ils ont marqué une halte au carrefour Djurdjura, non loin de la maison de la culture, où des dizaines de policiers ont été déployés pour sécuriser l'infrastructure. Les marcheurs ont crié, à gorge déployée : «Non à la mascarade électorale!» et «Non aux opportunistes !» Ils ont également scandé «Assa Azekka, Sadi Yela Yela !» et «Ulach elvot ulach !» (Pas d'élection) avant de continuer jusqu'à l'ancienne mairie en face de laquelle un meeting a été organisé. Sadi Hadibi, élu à l'APW, a pris la parole pour saluer cette grandiose mobilisation. Selon lui, cette forte présence de marcheurs est une preuve tangible que le citoyen rejette «le système totalitaire qui a bradé les richesses du pays». L'orateur a également invité l'assistance à s'incliner devant la mémoire des martyrs de la Révolution et ceux de la démocratie. Ainsi, les manifestants ont observé une minute de silence, doigts en V en signe de victoire. Ouahab Aït Menguellet, maire de Tizi Ouzou, a lui aussi mis l'accent sur la réussite de cette action, comme il a exhorté les présents à préserver le caractère pacifique de la marche. «Nous avons réussi le pari, celui de faire une démonstration grandiose. Nous devons continuer à donner une leçon cinglante au pouvoir», a-t-il dit. S'ensuivit l'intervention du président du RCD, Mohcine Belabbas, qui a fustigé les décideurs, sans ambages, de vouloir accuser les démocrates de servir «une main étrangère». «La main étrangère est à El Mouradia. Le système est fragmenté. Il faut s'unir pour faire face à cette mascarade électorale qui n'arrangera que les affaires du système», a-t-il martelé devant une foule nombreuse qui répliquait par des applaudissements. Puis, ce fut au tour de Saïd Sadi qui a précisé que l'action est une protestation de rue pour disqualifier «les urnes de la mafia». «Le boycott en Kabylie est décisif pour l'avenir du pays. L'argent ne peut pas corrompre ces milliers de personnes venues marcher aujourd'hui contre la mascarade électorale du 17 avril», a-t-il déclaré. Et d'ajouter : «Il est impossible d'aller vers une transition avec le système en place.» «Il faut une nouvelle Constitution où tamazight sera consacrée langue officielle», a-t-il préconisé. Notons enfin que les marcheurs se sont dispersés, vers 13h, dans le calme et sans le moindre incident. Les commerçants du centre-ville de Tizi Ouzou ont également baissé rideau lors de la marche en signe de soutien à cette action.