La puissance publique semble prendre le taureau par les cornes pour mettre fin à cette anarchie générée par ce qu'on nomme par fausse pudibonderie, le marché informel qui squatte les espaces publics. Une opération coup-de-poing a été menée, ces derniers temps, par les policiers qui traquent les revendeurs qui congestionnent les trottoirs et les abords des cités et des marchés communaux. Une opération de ce type n'est pas nouvelle, mais a tendance à faire dans le mythe de Sisyphe. A chaque fois que des lieux publics sont libérés, ils ne tardent pas à être réinvestis par les récalcitrants, comme ce fut le cas le long de la rue Ahmed Bouzrina (ex-la Lyre) où les places des étals de fortune deviennent « propriété privée » et sont louées ou revendues au meilleur enchérisseur à coup de dizaines de millions de centimes par les squatters. Si dans certaines rues et ruelles riveraines des marchés on joue au chat et à la souris avec la puissance publique, d'autres espaces urbains où l'affluence est grande, le négoce de la rue continue à braver l'autorité. Les petits nababs, alimentés par l'économie de bazar des barons de l'import-import, continuent sans bourse délier à accaparer le moindre empan, notamment le long des rues Ali Amar (ex-Randon) et Abderrahmane Arbadji et dans les parages du marché des Trois-Horloges à Bab El Oued. Dans ces endroits sus- cités, c'est la foire d'empoigne, au point où cela déborde de partout. Et gare à celui qui ose faire une quelconque remarque à ces accapareurs d'espaces publics qui vous obstruent le passage. Vous entendrez des vertes et des pas mûres. Dans ces lieux « marchands » où la ménagère trouve son compte, l'usage devient loi pendant que la force publique prête le flanc au laxisme. Elle cafouille, sinon préfère fermer l'œil, contrairement — ce qu'on ne comprend pas, d'ailleurs — aux abords du marché communal d'El Biar où les revendeurs sont chassés manu militari. C'est du menu fretin, croit-on savoir. Le plancher est vite débarrassé aussi du côté de Zoudj Ayoûn. La fluidité devient clean et les propriétaires de locaux commerciaux se trouvent, un tant soit peu, soulagés — pour un laps de temps — de cette pratique déloyale qui engrange des dividendes grassouillets, non sans échapper au Trésor public. Toujours est-il que l'éradication du négoce de la rue demeure sélective. On fait dans la campagne de deux poids, deux mesures. Intransigeante par-ci, permissive par-là.