Le public oranais était au rendez-vous, dimanche soir, au Théâtre régional d'Oran Abdelkader Alloula pour apprécier la pièce Ya lil, produite par le Théâtre régional de Constantine, une troupe qui ne s'est pas produite à Oran depuis bientôt 22 ans. La pièce Ya lil a été produite en 2018 et adaptée de l'œuvre de l'écrivain marocain Abdelkrim Berrechid, Ya lil ya aïn. Elle a été mise en scène par Haroun El Kilani. La pièce raconte le quotidien, ou plutôt les nuits, d'une galerie de personnages évoluant dans les bas-fonds d'une grande ville. Des hommes et des femmes aux destins croisés mais incertains, vivant en marge de la société, dans un monde fait à leur image, où le jour n'existe particulièrement pas pour eux. Les bas-fonds de toutes les villes du monde se ressemblent : on y retrouve à peu près les mêmes personnages, avec la même déchéance, les mêmes déboires, voire la même histoire de loosers, écrasés par une société cruelle, impitoyable, un rouleau compresseur aveugle. Ce qui donne à la pièce une certaine universalité. Dans Ya lil, les quatorze personnages de l'histoire -dix hommes et quatre femmes- cohabitent dans ces bas-fonds et, au fil des minutes, on découvre l'histoire de chacun d'eux, leurs déceptions, surtout, leurs attentes et le peu d'espoir qu'ils sont arrivés, malgré tout, à sauvegarder, comme ils sont arrivés à sauvegarder leur humour, ce qui les rend, parfois, très saisissants. La pièce raconte l'histoire de Safia, une mère célibataire qui attend, sans trop y croire, le retour de son compagnon, voire son futur époux, El Hadi, parti très loin chercher fortune, mais revient transformé, portant dans ses bagages un délire extrémiste inqualifiable. C'est également l'histoire de Lalla, d'un ivrogne, invétéré, d'un derwiche, de policiers, de SDF et d'autres marginaux, rebuts de la société, dont les destins s'entrecroisent. Karim Boutchiche, directeur artistique de la troupe, également régisseur, comédien et metteur en scène, a rappelé à l'APS que la pièce est une adaptation d'un texte de Abdelkrim Berrechid, écrivain marocain, qui a subi une réécriture scénique et dramatique et qui raconte la vie nocturne de plusieurs personnages dans les bas-fonds d'une grande ville. «C'est une projection de la vie dans des quartiers marginalisés dans lesquels vivent des marginaux, avec leur lot d'agressions et de problèmes de sécurité urbaine, ainsi que des histoires personnelles de chacun des personnages, leurs déceptions, leurs aspirations, leurs espoirs de s'en sortir aussi», a-t-il ajouté. La troupe constantinoise a participé avec cette pièce au dernier Festival du théâtre professionnel à Alger, l'an dernier. Sa représentation à Oran fait suite à une invitation du TRO pour le mois de Ramadhan, ce qui préfigure d'un échange fructueux entre les deux théâtres régionaux, a-t-on indiqué. Concernant le TRO, Karim Boutchiche a estimé qu'il est «un théâtre pilote en Algérie où on observe, actuellement, une relance du 4e art national». Pour sa part, Mourad Senouci, directeur du TRO, également comédien et dramaturge, a précisé que le souci de son institution est d'«établir des rapports d'échange avec les autres théâtres du pays. C'est pour cette raison que nous avons invité la troupe de Constantine à Oran et notre troupe se produira, de son côté, bientôt à Constantine, durant ce mois de Ramadhan». «Notre démarche est d'inviter, chaque mois à Oran, une troupe d'une autre wilaya, afin de permettre à notre public de connaître ce qui se fait ailleurs dans les autres régions. C'est un programme que nous avons entamé depuis le début de cette année», a-t-il précisé, ajoutant que «les autres objectifs de cette démarche visent à varier les programmes, inciter l'échange et la mutualisation des moyens».