Velléité d'interdire tout rassemblement dans la capitale. Pour ce 15e vendredi du hirak, des barrages filtrants étaient dressés, particulièrement à l'entrée est d'Alger. A Dar El Beïda, des véhicules étaient systématiquement fouillés, leurs occupants se sont vu confisquer leurs drapeaux et leurs pancartes portant des slogans antirégime. A la gare routière du Caroubier, un bus transportant des voyageurs venus de la région du M'zab (Ghardaïra) a été immobilisé et les citoyens empêchés de rejoindre le centre-ville. Comme les derniers vendredis, le même dispositif policier a été déployé sur les places fortes d'Alger (Grande-Poste, Audin) et dans les rues menant au Palais du gouvernement et à la présidence de la République. Dès le matin, des policiers en civil ont interpellé plusieurs manifestants qui s'étaient regroupés au centre-ville. «Il y a des barrages filtrants. Toutes les voies d'accès à la capitale étaient fermées. Il y a eu aussi beaucoup d'interpellations», constate Fetta Sadat, députée RCD et avocate qui a défendu des manifestants interpellés et présentés devant les juges du tribunal de Sidi M'hamed. Modus operandi habituel depuis au moins trois semaines : empêcher les premiers manifestants de se regrouper, malmener et interpeller les plus téméraires, avant de céder lorsque la foule devient plus importante en début d'après-midi. «Un policier en civil, pas sympathique du tout, m'a demandé ce que je faisais à la Grande-Poste, je lui ai répondu franchement que je suis là pour marcher comme tous les Algériens. Ma réponse ne lui ayant pas plu, il a exigé de voir ma carte d'identité. Et comme j'ai protesté, il a menacé de m'embarquer», s'offusque un trentenaire. Le vice-président de la LADDH, Saïd Salhi, relève que la police renforce son dispositif, comme chaque vendredi, pour tenter de dissuader les citoyens de protester contre le régime : «Pour le dernier vendredi de Ramadhan, la police était fortement déployée à Alger-Centre, autour de la Grande-Poste. Dès le matin, de la place Audin jusqu'à la Grande-Poste, elle procédait à la dispersion de tout rassemblement, et à l'interpellation des premiers manifestants.» «Dispositif policier injustifié» «Des barrages filtrants sont également dressés aux entrées d'Alger. La tentation d'empêchement et d'interdiction de la marche, avec le même scénario de vendredi passé, le système tente l'étouffement du mouvement populaire, qui reste intact et mobilisé», note le militant dans une publication sur sa page Facebbok. Marchant dans la ville de Béjaïa, Salhi constate que dans cette ville, la présence policière est inexistante. «A Béjaïa, je n'ai pas croisé de policiers, même pas un, le long de toute la marche, comparativement à Alger. Les dispositifs policiers sont injustifiés, c'est une marche pacifique, plus besoin de le répéter», relève-t-il. Vendredi dernier, des dizaines de citoyens, parmi lesquels de nombreux militants politiques et associatifs, ont été interpellés et embarqués vers des destinations inconnues. Si certains ont été libérés avant la rupture du jeûne, d'autres ont été retenus et présentés devant le juge. Le député du RCD, Atmane Mazouz, a dénoncé le traitement réservé par la police aux manifestants ces dernières semaines. «La semaine dernière, j'ai eu à constater de visu plusieurs blessures sur des personnes interpellées, dont se sont rendus coupables des agents des services de sécurité que j'ai d'ailleurs dénoncés le jour même», relève le député. Pour lui, les jeunes interpellés restent «déterminés» à occuper la rue jusqu'à l'aboutissement de leurs revendications…