Si vous aimez le bon cinéma, raffiné, pétillant, original, ne ratez pas ce réalisateur. Le cinéclub de l'association Chrysalide d'Alger est sans doute une référence dans le paysage culturel algérien. Pendant plusieurs années où la vie culturelle était réduite presqu'à néant, il a été (avec celui de Mascara), l'un des rares rendez-vous des cinéphiles. Sa programmation a toujours été marquée par la qualité de ses choix et la mise en valeur d'écoles de cinéma et de réalisateurs novateurs. Le cinéclub a initié de jeunes et moins jeunes adhérents à des écritures cinématographiques rares mais originales. Il propose à partir de ce mois un cycle consacré au réalisateur britannique Peter Greenaway. Le premier acte de ce cycle était prévu hier avec The Belly of an Architect (Le ventre d'un architecte, 1987). C'est le troisième long métrage de ce réalisateur qui, à partir de The Falls (1980) puis de son chef-d'œuvre Meurtre dans un jardin anglais (1982), annoncait une carrière exceptionnelle. Les films de Peter Greenaway ont cela de particulier qu'ils exigent une attention soutenue du spectateur, une participation active à la compréhension de l'œuvre. L'amour des détails, le montage d'horlogerie des scènes, l'enchevêtrement des situations et des faits, et une approche privilégiant la subtilité sur la démonstration, tout cela fait qu'une minute d'inattention ou un plan raté peuvent vous déconnecter. Il y a donc un effort à fournir, mais, au final, le sentiment d'un véritable régal. On se retrouve au cœur de l'humour britannique si fin, si féroce et si élégant à la fois, un humour qui fonctionne encore mieux avec le mystère. Dans des univers liés à l'art, la peinture, la musique ou l'architecture, Peter Greenaway effectue un travail minutieux de mise en scène, chaque plan étant travaillé comme une toile de peinture en privilégiant la lenteur, les développements graduels et l'utilisation symbolique des nombres. Ce sont des puzzles étranges et magnifiques qu'il met en place en demandant au spectateur de patienter, d'accumuler, d'observer pour aboutir à des issues toujours déroutantes. Le parcours de ce réalisateur explique pour beaucoup son cinéma qui puise sa richesse de la multiplicité des postes qu'il a occupés : acteur, monteur, réalisateur, scénariste… aucun aspect d'un film ne lui échappe. De plus, ce Gallois, né en 1942, a débuté dans la peinture (qu'il pratique encore) puis dans la littérature et l'illustration de livres, avant d'aborder le cinéma par des courts métrages expérimentaux. On lui doit une vingtaine de courts et environ 15 longs métrages dont les fameux : Le cuisinier, le voleur, sa femme et son amant (1989), Prospero's Book (1991) inspiré de Shakespeare, The Baby of Macon (1993)… Il faut avoir vu un de ses films au moins pour prétendre avoir une idée du cinéma contemporain. Filmathèque Mohamed Zinet. Ryadh El Feth, Alger. Les vendredis, 17h. Pour recevoir les programmes, écrire à [email protected]