Cette France-là est le titre d'un ouvrage volumineux et bien fouillé, paru récemment en France en deux volumes, sur la politique migratoire scandaleuse prônée par l'Etat français. Ecrit collectivement par une trentaine d'auteurs, parmi lesquels des chercheurs, des journalistes, des sociologues et des militants associatifs, le livre s'intéresse à la période allant de 2007 à fin 2009. Il met en exergue les travers et les défaillances d'une politique d'immigration faite de surenchère, de provocations et d'exclusion, sans oublier les dépenses faramineuses qu'elle ne cesse d'engendrer aux contribuables français. En 2008 par exemple, le même collectif a chiffré la politique d'éloignement des étrangers sans papiers à près de 2 milliards d'euros. Un montant vite contesté par le ministre de l'Immigration et de l'Identité nationale, Eric Besson. Ce dernier a évalué le prix des reconduites à la frontière à 232 millions d'euros seulement. Mais peu importe le coût réel qu'engendrent les politiques successives d'immigration mises en place par le gouvernement Sarkozy ou les gouvernements précédents, c'est surtout l'utilisation de cette problématique à des fins purement politiciennes et électoralistes qui fait également débat. C'est d'ailleurs l'objet du deuxième volume du livre qui montre comment le gouvernement Fillon, sur instruction du président Sarkozy, tente de focaliser les débats publics sur la politique migratoire et l'identité nationale afin de masquer les difficultés économiques des Français, la remontée spectaculaire du chômage et l'incapacité à tenir les promesses faites lors de la campagne électorale pour la présidentielle de 2007. Ainsi donc, pour Michael Newman, un des participants au projet, « l'objectif de ce long travail est de décrire ce que cette politique fait sur ceux qui la subissent, donc les immigrés, sur ceux qui la créent et l'exécutent, du Président aux administrations, en passant par les préfets et de s'interroger sur sa cohérence ». Riche en témoignages et en portraits de « sans-papiers », la deuxième partie de l'ouvrage de Cette France-là montre comment la suspicion et la peur entourent systématiquement tout regroupement familial ou demande d'asile, lorsqu'ils se font en dehors du cadre de l'immigration choisie que défend l'actuel gouvernement français. Par ailleurs, afin de mesurer l'impact de la politique d'immigration, une commission parlementaire, composée de députés et de sénateurs, a vu le jour. Objectif : auditionner de hauts fonctionnaires, responsables politiques, syndicalistes, patrons ou chercheurs pour décortiquer l'effet de l'immigration sur la démographie en France, les comptes de l'Etat, le chômage et les salaires, la cohésion sociale ou l'Etat de droit. Selon Sandrine Mazetier, députée socialiste, le but des auditions est de montrer l'important fossé existant entre les données des chercheurs et des spécialistes de l'immigration et les « a priori et les fantasmes » qui fondent les politiques européenne et française en matière d'immigration. Dans une interview accordée au journal Le Parisien, cette élue a indiqué que les données qui seront recueillies des auditions, si elles devaient avoir lieu vraiment, porteraient un coup fatal à l'actuel édifice de stigmatisation des personnes en situation irrégulière, contrediraient la construction, à coups de lois, d'une image de l'étranger « forcément » clandestin, fraudeur ou menaçant et démontreraient le caractère inhumain de la chasse aux « sans-papiers ». Une approche que réfute catégoriquement Eric Raoult, député UMP. Cet élu de la Seine-Saint-Denis estime que le débat pour un véritable audit doit abandonner l'idée de cibler Sarkozy ou de salir Besson et de culpabiliser la droite.