La puissante Organisation nationale des moudjahidine (ONM) a lancé, hier, un appel en faveur de la libération des détenus du mouvement populaire (hirak), dont le militant politique Lakhdar Bouregaâ et les porteurs de l'emblème amazigh. «Nous demandons un geste de tolérance et de fraternité de la part des responsables en direction des détenus emprisonnés à cause des revendications populaires (…). Je parle de ceux qui ont été arrêtés pour un écart de langage ou l'emblème amazigh», a souligné Mohand Ouamar Benelhadj, secrétaire général par intérim de l'ONM, dans un enregistrement vidéo. En évoquant «un écart de langage», celui-ci faisait allusion au moudjahid Bouregaâ. Mercredi dernier, la chambre d'accusation de la cour d'Alger a confirmé le maintien sous mandat de dépôt du moudjahid et militant politique Lakhdar Bouregaâ et de plusieurs porteurs du drapeau amazigh, alors que les collectifs d'avocats chargés de leur défense avaient boycotté une audience de la chambre d'accusation de la cour d'Alger, consacrée à ces deux affaires. «Ces gens ne méritent pas la prison. Cet appel, que nous lançons au nom des moudjahidine, s'adresse aussi aux magistrats. Une personne qui a brandi une pancarte est condamnée à un an de prison, alors que quelqu'un qui commet un faux et vole de l'agent, la justice le condamne à six mois. Il y a un déséquilibre. Je le dis même si je risque des poursuites. Je suis prêt à aller en prison. J'ai passé six ans dans les prisons coloniales. Je suis entraîné», a-t-il dénoncé. Le moudjahid Bouregaâ a été placé en détention provisoire le 30 juin, par un tribunal algérois, pour «outrage à corps constitué» et «atteinte au moral de l'armée» et incarcéré après avoir critiqué Ahmed Gaïd Salah. Il encourt une peine de dix ans d'emprisonnement. Interpellés après la consigne donnée par le général Ahmed Gaïd Salah de ne tolérer aucun autre drapeau que «l'emblème national», plusieurs porteurs de l'emblème amazigh ont été poursuivis pour «atteinte à l'unité nationale», un délit pour lequel ils encourent dix ans d'emprisonnement. Ces arrestations, opérées depuis le 21 juin, ont provoqué un élan de solidarité et suscité la colère d'une partie de la société civile, des responsables politiques de l'opposition et des leaders syndicaux. Réagissant à l'annonce de la détention de Bouregaâ par la Télévision nationale, qui l'avait notamment accusé d'usurpation d'identité, l'ONM avait dénoncé, lundi dernier, une campagne de diffamation visant un des siens. «L'ONM se réserve le droit de poursuites judiciaires contre ceux qui ont donné un nom à ce moudjahid autre que son vrai nom en vue de ternir son histoire honorable», avait estimé l'ONM dans un communiqué, en évoquant avec force détails le parcours révolutionnaire de Bouregaâ et ses faits d'arme, depuis son engagement dans l'ALN en 1956 et sa désignation à la tête de la 2e Région de la Wilaya IV. Par ailleurs, le secrétaire général de l'ONM a démenti les informations selon lesquelles son organisation avait déposé plainte contre Naima Salhi, responsable d'un micro-parti, pour avoir remis en cause le passé révolutionnaire de Djamila Bouhired, héroïne de la Bataille d'Alger. «Il est du devoir des moudjahidine d'être solidaire avec leurs frères moudjahidine (…). Cette femme (Naima Salhi, ndlr) a dépassé les frontières. Elle s'en est même prise aux habitants d'une région du pays. Elle doit consulter un médecin psychiatrique. Peut-être qu'il y a des gens qui la manipulent», a-t-il fustigé. Commentant l'expiration du mandat présidentiel de Abdelkader Bensaleh, Mohand Ouamar Benelhadj a estimé qu'il est nécessaire que les institutions du pays ne s'effondrent pas. «Certains disent que nous sommes dans un vide constitutionnel. Mais, la Constitution demeure encore(est toujours) là ! Les Algériens doivent y aller en fonction de la Constitution. Les institutions de l'Etat doivent continuer à travailler jusqu'à la fin de cette période d'impasse qui dure depuis 4 mois », a-t-il conclu.