Le FLN veut-il se doter d'une organisation patronale ? Sinon à quoi rime son initiative visant à regrouper des patrons privés au sein d'un « Club des hommes d'affaires ». Hier, le secrétaire général de l'ex-parti unique, Abdelaziz Belkhadem, a réuni au niveau de son siège une centaine de patrons dont le tout-puissant patron de Cevital, Issad Rebrab, pour installer officiellement ce « club », dont le siège sera l'hôtel Genève, situé à Alger, après rénovation. Ce club se veut comme « un espace de débat et de discussion entre hommes d'affaires pouvant ainsi énumérer tous les obstacles auxquels ils sont confrontés dans leurs activités d'investissement. Le parti peut leur venir en aide et portera ainsi leurs doléances au niveau politique », a expliqué le chef du FLN. Comme si les pouvoirs publics ignorent les difficultés auxquelles font face les investisseurs privés nationaux. Les hommes d'affaires algériens passent, en effet, leur temps à interpeller le pouvoir politique. « Tout le monde sait où ça ne va pas, sauf que les pouvoirs publics n'arrivent pas ou ne veulent pas prendre des mesures pouvant favoriser l'investissement privé national », a commenté un homme d'affaires activant dans l'agroalimentaire présent à la rencontre d'hier. Belkhadem qui a tenu à rassurer les patrons privés sur les positions de son parti par rapport au capital privé, a indiqué que le FLN « a révisé son lexique politique » en abandonnant une certaine « terminologie ». Entre autres le fameux slogan « Le capital exploiteur et la propriété collective des moyens de production ». Paradoxale agitation d'un parti politique qui a la majorité au sein des instances législatives et qui n'a à aucun moment plaidé la cause des patrons. « Nous devons bénéficier des toutes les énergies que recèle le pays, privées ou publiques. Le pays ne peut se relever sans le concours de tous ses enfants », a-t-il déclaré, en direction des patrons présents à la rencontre. Certains cadres du FLN ne cachent pas néanmoins leurs craintes de voir leur parti « glisser vers plus de libéralisme aux dépens des couches populaires qu'il est censé défendre ». Belkhadem, qui a recensé quatre catégories d'hommes d'affaires, les « producteurs, réalisateurs, importateurs et ceux qui sont dans le domaine des services », a jugé nécessaire d'offrir aux patrons « un espace où ils peuvent débattre toutes les questions liées à leur domaine ». Le secrétaire général de l'ex-parti unique est revenu également sur l'évolution de l'économie algérienne, en affirmant que l'Algérie « n'a pas étudié son passage à l'économie de marché ». Issad Rebrab n'a pas attendu le lancement du « club » du FLN pour dire tout le mal qu'il pense de la situation économique du pays et des conditions dans lesquelles évoluent les patrons privés. Il a vivement déploré « l'absence de débat et de dialogue » entre le pouvoir politique et les hommes d'affaires algériens dans la prise de décisions économiques ainsi que sur les questions du développement de l'économie nationale. Il a assuré que « seul avec un dialogue franc qu'on pourrait faire sortir le pays du sous-développement et damer le pion même aux pays européens ». Faisant un discours très critique à l'égard de l'environnement des affaires et de l'investissement, Rebrab dresse un tableau noir de la situation. Belkhadem désapprouve, sans apporter la contradiction. Rebrab continue sa « diatribe » en affirmant que « si on ne dit pas la vérité et on ne laisse pas de côté la langue de bois on ne sortira pas du sous-développement. Je dois leur dire la vérité, comment voulez-vous parler du développement, alors que nous sommes le seul pays au monde où on doit demander l'autorisation pour créer de la richesse ? », s'est interrogé Issad Rebrab, non sans faire remarquer que la responsabilité est partagée entre pouvoir politique et hommes d'affaires.