Les statistiques internationales sur les accidents de la route indiquent que le nombre de morts par mois en Algérie est supérieur au nombre de morts par an dans certains pays de l'OCDE. En 2018, les routes algériennes étaient responsables de plus de 3310 morts, soit une moyenne mensuelle de 303 décès. Certains pays européens enregistrent moins de 300 décès par an, 280 morts en Suède, 171 au Danemark, 253 en Nouvelle-Zélande. Les données de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) nous livrent quelques statistiques assez significatives qui montrent la gravité de la situation, notamment dans les pays en voie de développement, c'est le cas de l'Algérie. Ces données doivent normalement nous inciter à la réflexion et à la recherche de solutions efficaces et à une mobilisation permanente. En effet, le taux de mortalité par tranche de 100 000 habitants est de 23,5% pour l'Algérie, 8,5% pour la Turquie, 9,35% pour la Grèce, la France (5,18%), l'Egypte (10%), le Maroc (20%), l'Allemagne (4,32%), la Suède (2,7%). Ces comparaisons avec les résultats des autres nations nous confirment l'ampleur du désastre causé par nos routes et l'inefficacité des mesures retenues et appliquées à ce jour. Les données de la Banque mondiale confirment cette tendance et la gravité de la situation et la volonté des pays développés à gérer cette situation. Les pays en voie de développement, par manque de moyens et de volonté n'arrivent pas à corriger et à maîtriser cette situation. Ces données indiquent également que 91,5% des décès dans les accidents routiers surviennent dans les pays sous-développés et qu'uniquement 8,5% pour les pays développés, alors que le parc automobile est de 47,9% pour les pays sous-développés et de 52,1% pour les pays développés. C'est une aberration. Il est à signaler aussi que le trafic routier dans les pays développés a été multiplié par 3,4 et que le nombre des accidents routiers connaissait une tendance à la baisse continue depuis 1975. C'est donc une question de volonté et de prise en charge sérieuse, efficace et continue. L'inefficacité des solutions retenues et l'absence de continuité et de rigueur sont les points faibles des pays en voie de développement, c'est le cas de l'Algérie. Les causes sont multiples et relèvent aussi bien de l'individu que de la formation, de l'éducation, des insuffisances de la réglementation, de la qualité des infrastructures et de la gestion quotidienne du trafic routier. La vitesse, le non-respect du code la route, le refus du port de casque pour les motocyclistes et de l'utilisation de la ceinture de sécurité sont les principales causes des accidents. L'erreur humaine est la cause de plus de 90% des accidents mortels. Les accidents de la route coûtent cher à la collectivité, de 3 à 5% du PIB. Les accidents sont la cause première de la mortalité des jeunes de moins de 29 ans. La gravité de la situation et ses conséquences négatives aussi bien sur le citoyen que sur l'ensemble de la collectivité a contraint des organisations internationales et une majorité de pays à retenir des programmes visant la réduction du nombre d'accidents routiers. Tenant compte du nombre des décès et des traumatismes engendrés par les accidents routiers, les Nations unies ont dégagé un fonds spécial pour assister les pays en développement dans le but de réduire le nombre des accidents et des morts. Cette option vient d'être reconduite jusqu'en 2030. Chaque pays a retenu et appliqué des mesures adaptées à son environnement propre en favorisant la sensibilisation et la formation. Certains ont opté pour une politique basée sur la rigueur et l'application tolérance zéro, d'autres en modernisant les infrastructures routières et en instaurant un contrôle systématique de l'ensemble du réseau, une présence d'agents de sécurité permanente et le recours aux techniques de surveillance des plus sophistiquées. Mais essayons de voir l'impact des politiques suivies jusqu'à présent en comparant les données de quelques pays. En Allemagne, le nombre de morts est passé de 7503 en 2000 à 3648 en 2010 et à 3459 en 2018, soit une diminution de 54% sur 18 ans. La rigueur dans l'application de la loi, l'éducation, la qualité du réseau routier et la surveillance systématique ont contribué à cette amélioration. La France enregistrait 8160 morts en 2001, 3963 en 2011, 3259 en 2018, le nombre de morts a été réduit de moitié entre 2001 et 2018. En outre, la réduction de la vitesse à 80 km/h a eu un impact immédiat durant l'année 2018 avec un gain de 189 personnes qui ont évité un accident mortel. L'option française repose sur un dispositif de 26 mesures dans le but de réduire de moitié le nombre de morts à l'horizon 2020. Il s'articule autour de 4 axes principaux : 1)- sensibiliser, prévenir, former (8 mesures) ; 2)- protéger les plus vulnérables (7 mesures) ; 3)- lutter sans relâche contre les infractions graves (8 mesures) ; 4)- améliorer la sécurité des véhicules et des infrastructures (3 mesures). Les mesures concernent notamment la modernisation de la formation, la sensibilisation à l'école, l'utilisation des techniques les plus modernes pour surveiller le réseau routier, moderniser le système radar et utilisation des radars double face pour mieux identifier les auteurs des infractions, recours aux radars mobiles, interdire le port des écouteurs et oreillettes, renforcement des sanctions et tolérance zéro, donner les moyens aux collectivités locales pour moderniser les infrastructures routières, réduire le taux d'alcoolémie… Ce constat d'une amélioration continue est valable pour la quasi-totalité des pays membres de l'OCDE. Le nombre de morts a connu une tendance à la baisse depuis 1975. L'Algérie a enregistré 4500 décès en 2016, 3639 en 2017 et 3310 en 2018. Nous constatons une tendance à la baisse, cela est positif mais insuffisant vu l'ampleur des accidents routiers et leurs conséquences. Il faudrait continuer avec un peu plus de rigueur et de persévérance. Il convient de faire un diagnostic objectif chiffré et prendre les mesures les plus adaptées à la nature des causes et au contexte algérien. Mais une chose est certaine, la sensibilisation, la formation, la responsabilisation, la tolérance zéro et la qualité des infrastructures demeurent des solutions incontournables. La sensibilisation du citoyen est fondamentale pour toute option visant l'amélioration. Il est inconcevable que des fêtes algériennes, victoire de l'équipe nationale, mariages, départs ou retours de pèlerins, se transforment en deuils par la faute et l'irresponsabilité de quelques chauffards qui font passer leur joie démesurée et imbécile avant la sécurité et la vie d'autrui, voire de leur propre vie. Les données statistiques de cette année confirment malheureusement ce constat. Que faire ? Les expériences positives menées par les pays développés nous apprennent que la solution de ce phénomène passe par une approche méthodique basée sur un diagnostic profond, une analyse percutante, une volonté inébranlable, une définition d'un dispositif adapté à l'environnement concerné, l'application sérieuse et continue, la sensibilisation et la responsabilisation. Ces conditions sont les facteurs-clés de succès de toute politique d'amélioration. Ce n'est pas uniquement un problème de textes sans une application rigoureuse, approche appliquée malheureusement par l'Algérie depuis longtemps.