La marche du 33e vendredi du hirak a failli finir mal à Boumerdès. L'arrestation d'une figure du mouvement au niveau local a suscité l'indignation et la colère des manifestants. Abderzak Salhi, un syndicaliste du Cnapest, a été interpellé par des policiers en civil non loin de la place Madaure, peu avant l'entame de la marche. Il a été conduit illico-presto vers le commissariat de la ville, où il a été longuement entendu sur ses activités militantes. La chasse aux têtes engagées dans le mouvement populaire a commencé dès la matinée avec l'arrestation de deux autres personnes : Ali Selmouni et Houcine Marmouchi. Ces derniers ont été libérés en milieu de journée après de longs interrogatoires. «On m'a dit que tu as porté atteinte à la sûreté de l'Etat. Ce que je n'ai jamais commis. Je leur ai dit que nos revendications sont claires et que je fais partie de ces millions d'Algériens qui luttent pour le changement radical du système en place par des moyens pacifiques et que le droit de manifester est garanti par la Constitution. Nous ne pouvons participer à des élections qui consacreront le maintien de ceux qui ont soutenu un 5e mandat pour Bouteflika», précise Ali Selmouni. En fin d'après-midi, la situation s'est envenimée. Sitôt la nouvelle de l'arrestation de Abderzak Salhi confirmée, les participants à la marche du vendredi décident d'aller au siège de la sûreté de wilaya et d'y rester jusqu'à la libération de leur camarade. «Libérez Salhi», «Pouvoir assassin», «Pas d'élections avec les gangs», «Même si vous nous emmenez tous en prison, on ne va s'arrêter», «Y en a marre des généraux», «Etat civil, pas militaire», ont-ils crié à tue-tête. Voyant la procession changer son itinéraire habituel, les policiers, armés de boucliers et de bâtons, dressent un mur à 300 mètres du commissariat central. Les forces de l'ordre ont stationné quatre camions cellulaires à même la chaussée, rendant impossible le passage de la procession. Malgré ce dispositif très musclé, les marcheurs sont restés, comme à l'accoutumée, pacifiques. Certains se mettent à terre tandis que d'autres se positionnent comme une haie devant les policiers en scandant des slogans dénonçant la répression. La tension a monté d'un cran à maintes reprises, mais la sagesse a fini par l'emporter. La mobilisation des manifestants a payé, puisque leur camarade a été libéré un quart d'heure plus tard après d'âpres tractations avec les policiers.