Selon l'avocat et défenseur des droits de l'homme, Abdelghani Badi, les acquis d'Octobre 1988 sont vite anéantis par le régime qui revient, depuis quelques mois, à ces anciennes pratiques : interpellations, emprisonnement et retour de la police politique. L'avocat et défenseur des droits de l'homme, Abdelghani Badi, alerte sur la dangerosité du dispositif législatif actuel contre les libertés. Il cite notamment des articles contenus dans le code de procédure pénale (de l'article 70 à l'article 90) qui sont utilisés contre les militants politiques ces derniers mois. «Il y a des textes de loi qui datent de l'époque du parti unique que le pouvoir législatif n'a pas révisé pendant tout ce temps. Le Parlement n'a pas fait son travail et ce sont ces textes qui sont brandis, aujourd'hui, pour mater le hirak», déplore-t-il. Intervenant lors d'une conférence-débat sur le thème «Octobre 1988-octobre 2019 : quelles conséquences ?», animée conjointement avec Me Noureddine Ahmine au siège de l'association SOS disparus, il qualifie ces lois de dangereuses. «Ils (ces textes, ndlr) constituent un danger pour les libertés et pour l'exercice de la citoyenneté. Certains articles du code pénal prévoient la peine capitale pour une accusation vague, telle que l'atteinte à l'unité nationale», alerte-t-il. Selon lui, les acquis d'Octobre 1988 sont vite anéantis par le régime qui revient, depuis quelques mois, à ces anciennes pratiques : interpellations, emprisonnement et retour de la police politique. «Le pouvoir accentue aussi les pratiques arbitraires, comme si nous étions dans un état d'urgence non déclaré. On a vu des arrestations de manière spectaculaire des militants politiques. Il y a eu aussi des gardes à vue et des mandats de dépôt injustifiés», dénonce-t-il. L'avocat revient aussi sur les écarts dans l'application des procédures au niveau des tribunaux. «L'Etat national suppose l'application de la loi de la même manière partout sur le territoire national. Mais nous avons vu le contraire dans l'affaire de l'emblème amazigh et dans le cas de Lakhdar Bouregaâ et d'autres détenus politiques. A Alger, les juges d'instruction ont décidé de garder les gens en détention sous prétexte de poursuivre l'instruction. Ce n'est pas le cas dans d'autres tribunaux. C'est ainsi qu'on met en danger l'Etat national et non pas à travers des déclarations ou le port d'un emblème», lance-t-il. Les deux conférenciers sont revenus par la suite sur l'apport des événements d'Octobre 1988 et leur influence sur le mouvement populaire du 22 février dernier. «Le peuple algérien a tiré les leçons des événements précédents. Il a compris qu'il faut être pacifique et uni pour mettre en échec les plans du régime», souligne Me Noureddine Ahmine.