Le ministre de l'Immigration, Eric Besson, a annoncé sa décision de généraliser à partir du 1er juillet la réforme de la procédure de naturalisation qui avait été fortement critiquée à ses débuts. Son avant-projet de loi sur l'immigration prétend s'attaquer aux employeurs. Paris. De notre correspondant La réforme de la naturalisation, mise en œuvre au début de l'année dans 21 départements, s'est traduite par un transfert de compétences de l'administration centrale vers les préfectures afin de raccourcir les délais d'instruction des dossiers. Après avoir dressé un bilan, de son point de vue « très positif », de quatre mois d'expérimentation, Eric Besson a décidé de la généraliser à l'ensemble du territoire national, y compris les Dom-Tom. Avec cette réforme, qui n'a pas modifié les critères d'accès à la nationalité française, les délais de traitement des dossiers « sont plus courts » et les procédures sont « harmonisées », remarque le ministre de l'Identité nationale. Les délais sont passés de 10 mois en 2009 à 4 mois en 2010, pour les dossiers rejetés, et de 12 mois en 2009 à 5 mois en 2010 pour les décisions de naturalisation. « Ces chiffres signent un cinglant démenti à tous ceux qui nous accusaient de vouloir restreindre l'accès à la nationalité française », souligne Eric Besson à l'adresse des experts et des associations qui avaient critiqué la réforme. SOS Racisme avait évoqué les « risques d'une rupture de l'égalité de traitement due à tout administré et d'un arbitraire dû au bon vouloir de la préfecture qui examine la demande ». L'historien Patrick Weil, qui avait coordonné une pétition de chercheurs pour protester contre la réforme, avait estimé qu'elle « représente une atteinte au principe d'égalité et comporte un risque d'abus et de favoritisme politique ». Dans un nouveau projet de loi sur l'immigration adopté en mars dernier en Conseil des ministres, M. Besson souhaite conditionner l'acquisition de la nationalité française à la signature d'une « charte des droits et devoirs du citoyen », une préconisation du séminaire gouvernemental sur l'identité nationale. Il prévoit aussi de récompenser les étrangers qui auront accompli des efforts exceptionnels d'intégration par une procédure accélérée d'accès à la nationalité française, comme les scientifiques ou les sportifs de haut niveau. « Il y a une compétition mondiale et européenne pour attirer des talents, ce n'est pas malsain d'y participer », note le ministre. Affichage plutôt que réalité ? L'avant-projet de loi d'Eric Besson « relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité » qui sera présenté au Parlement à partir du 27 septembre prochain, comporte un volet sanctionnant l'emploi d'étrangers en situation irrégulière. Le volet travail du projet de loi cherche à dissuader un donneur d'ordres d'avoir recours à un sous-traitant employant des sans-papiers. « On peut douter que l'aggravation des sanctions contre les employeurs de sans-papiers et notamment, contre les donneurs d'ordres, traduise une véritable volonté politique de lutter contre ces pratiques », note un collectif d'associations. Elles relèvent aussi le caractère coercitif de l'avant-projet. Le collectif juge que l'ensemble du projet de loi pose problème. La prolongation de la durée de rétention, qui passe de 30 à 45 jours, est bien perçue. « Un étranger placé en centre de rétention devra attendre 5 jours au lieu de 48 heures aujourd'hui avant de comparaître devant le juge de la liberté et de la détention ». Pendant ce délai, le juge administratif aura eu le temps de statuer sur la légalité de la mesure d'expulsion et de la mettre à exécution. Autre point litigieux, selon les associations, la double peine ; elles s'insurgent contre le « bannissement » des sans-papiers expulsés. Ces derniers peuvent se voir interdire de déposer une demande de visa pour entrer dans l'espace Schengen pendant une durée allant de deux à cinq ans. Elles ironisent également sur l'immigration choisie et prennent pour preuve la fameuse carte bleue, dédiée aux immigrés hautement qualifiés dont la France aurait besoin. Devant la multitude des embûches pour la décrocher et le climat politique, seules 600 personnes auraient été intéressées l'an dernier, les autres préférant des cieux plus cléments comme le Canada ou les Etats-Unis.