Les milliers de personnes qui ont battu le pavé, hier, dans la ville de Tizi Ouzou, à l'occasion du 47e vendredi de protestation pour le départ du système, ont réitéré leur refus de dialogue avec les décideurs avant la satisfaction des revendications du mouvement populaire. «Non au dialogue», était-il écrit sur les centaines de pancartes brandies par les manifestants qui scandaient, à gorge déployée, les traditionnels slogans du hirak comme «Pouvoir assassin !», «Dawla madania machi askaria !» (Etat civil et non militaire). Ainsi, au moment où les premiers marcheurs commençaient à se regrouper devant le portail principal du campus de Hasnaoua, d'autres se constituaient en carré sur l'axe du stade du 1er Novembre, où nous avons remarqué aussi des jeunes avec des drapeaux aux couleurs de la JSK qui devait affronter, en fin de journée, le Raja de Casablanca, dans le cadre de la Ligue des champions d'Afrique. Les supporters des Canaris qui se sont joints aux manifestants ont justement donné plus de tonus à la foule qui n'a pas cessé de stigmatiser les symboles du pouvoir. La procession s'est, en outre, ébranlée, sous une pluie fine, notamment à la rue Lamali, longeant l'enceinte du CHU Nedir Mohamed. «Il n'y aura pas de dialogue avec le pouvoir au nom du mouvement qui continue de réclamer les mêmes revendications exigées depuis le 22 février 2019. D'ailleurs, on a remarqué, ces dernières semaines, que des gens, qui ne passaient pas inaperçus lors des marches au début du mouvement, quittent, en catimini, le terrain. On ne les voit plus, alors qu'ils étaient toujours au-devant de la scène», a déclaré un marcheur qui estime aussi que «le pouvoir a toujours essayé de soudoyer les opportunistes de tout bord». Sur les multiples panneaux contreplaqués suspendus par les participants à la marche d'hier, dans la capitale du Djurdjura, on pouvait lire : «Le peuple accepte ses différences. Désormais, l'Algérie est au centre de ses préoccupations», «Aimer l'Algérie, ce n'est pas la fanfare à longueur de journée, aimer l'Algérie, c'est de la sortir du sous-développement, lui construire une économie forte et durable, c'est faire place à nos compétences, à nos jeunes qui partent à l'étranger à la recherche de ce que leur pays n'a pas su leur donner.» Des expressions qui reflètent amplement l'éveil des marcheurs qui ne veulent pas aussi céder d'un iota sur l'exigence d'une transition démocratique. «C'est le moment idoine pour engager une transition démocratique sérieuse», écrit un père de famille sur une pancarte. Des participants au 47e vendredi de protestation voient également que «la guerre en Libye est une pièce théâtrale. Elle est orchestrée pour faire peur au peuple et casser le mouvement», commentera un marcheur. «Cette forme de diversion a déjà été utilisée par le passé par le pouvoir quand il voulait étouffer la mobilisation citoyenne», ajoute-t-il. Dans la foule, et comme chaque semaine, la libération des détenus du hirak qui croupissent dans les prisons est exigée par les manifestants qui ont mis en avant, hier, des banderoles avec les portraits des prisonniers du mouvement populaire, encore en détention, à l'image de Karim Tabbou, Samir Belarbi et Fodil Boumala. «Libérez la justice, libérez les otages !» ont-ils scandé, haut et fort. Par ailleurs, notons que la coordination des présidents d'APC de la wilaya de Tizi Ouzou, qui s'est réunie mercredi et jeudi au siège de l'APW, a salué «la mobilisation citoyenne pacifique, ayant déjoué toutes les manœuvres machiavéliques du pouvoir pour imposer sa feuille de route via la mascarade électorale du 12 décembre 2019, en réussissant l'exploit du rejet absolu et historique, tant à l'échelle locale que nationale, ce qui révèle le degré mature de la conscience collective populaire, sonnant la déchéance du régime». Ainsi, dans une déclaration rendue publique à la fin de cette rencontre, la coordination en question dénonce ce qu'elle qualifie de «représailles» du pouvoir à l'égard de la région qui s'est distinguée, soulignent les rédacteurs du document, par «l'acte patriotique asséné au pouvoir en place illégitime». «Effectivement, les restrictions budgétaires drastiques allouées à nos communes quant à l'exercice 2020 ne font que confirmer ce constat, car un dérisoire montant de 15 000 000 DA par commune en PCD ne pourrait répondre aux besoins urgents d'un seul village, eu égard à la situation de sous-développement délibéré que vit notre région depuis des lustres. Pis encore, nos communes demeurent exclues des subventions d'équipement du CSGCL (ex-FCCL) contrairement aux communes d'autres wilayas qui sont dotées de sommes faramineuses dans ce registre», précisent-ils tout en mettant l'accent aussi sur les différents blocages et les lenteurs administratives. La coordination des président d'APC de Tizi Ouzou réitère sa détermination à poursuivre le combat aux côtés du peuple jusqu'à l'instauration d'un Etat de droit. D'ailleurs, elle exhorte tous les maires à venir prendre part à un sit-in prévu, pour mardi prochain, à 10h, dans l'enceinte de la cité administrative de la wilaya, et ce, pour exiger, entre autres, une répartition équitable et transparente des dotations budgétaires pour toutes les communes d'Algérie.